A ne vouloir contrarier ou ne contraindre personne, on finit par rester figé. Il se dégage une image perçue d’impuissance et d’indécision. A cela, s’ajoutent les avis et les mises en garde, tombant trop souvent mal à propos, de la Cour des comptes, de la BCE, de la Commission européenne ou du FMI.
Le tout se déroule sous les regards d’une opposition à l’affût, de partenaires sociaux, patronat et syndicats, en attente et d’une opinion publique inquiète en perte de confiance. Tous sont en attente de résultats. A chaque instant arrive le temps des décisions et des actions. L’arbitrage final tarde souvent à venir. Il est autobloquant par nature.
En fonction des "petites" phrases, des fuites "organisées", sans parler du "non-dit" interprété au gré de chacun, les rumeurs vont bon train. Ces informations alimentent le quotidien de la plupart des "gazettes". Les journalistes, les commentateurs et les éditorialistes, partisans ou non, des politiques engagées appuient ou contestent les différentes propositions du gouvernement. Ils affichent une mauvaise foi et une pseudo "langue de bois" aussi peu convaincante d’un côté comme de l’autre. Majorité et opposition n’en finissent pas de se rejeter la responsabilité de la situation, comme à l’accoutumée. Chacun ne veut voir que l’aspect négatif dans le point de vue de l’autre. Se faire sa propre opinion, à travers la presse et les médias est devenue aujourd’hui quasi-impossible.
Une technique "bien rodée" au service des pouvoirs
La querelle politique prend trop souvent le pas sur les problèmes de fond. Le souci de préserver l’opacité de notre système parlementaire sert de liant entre nos élus. Cela confirme qu’il y a peu de chance que cette majorité ou une autre, soit en mesure d’appréhender enfin sur le fond le problème de l’emploi et par conséquent de proposer des solutions crédibles, pérennes et mobilisatrices. La politique du "report à nouveau" est dans les faits l’un des moyens de clore des débats qui n’ont pas encore eu lieu ou de remettre à plus tard l’absence de décision, surtout quand le pouvoir manque d’idées concrètes consensuelles. L’Exécutif trouvera les arguments nécessaires pour présenter un projet de réforme, flattant l’opinion publique, en référence à un proverbe bien connu : "l’intention vaut l’action".
Après de multiples "essais médiatiques", lorsque une décision est prise, c’est l’effet d’annonce prend le pas. La dette et son déficit servent de toile de fond et sont souvent prétexte à l’immobilisme.
Cependant, des projets de loi vont être élaborés avec plus ou moins de discrétion pour apprécier les retours "politiques" et d’opinion publique. Enfin ils seront présentés à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, conformément à un calendrier précis après discussion en commissions avec le nombre d’amendements nécessaires. Le texte final est adopté, édulcoré trop souvent de l’essentiel. L’objectif est de ne pas déplaire. La mise en scène se complète avec le Sénat autour d’une commission mixte paritaire. Quant à la publication des décrets d’applications au Journal officiel, il faut être patient. Entre l’intention, l’annonce, le projet de loi, l’adoption et l’application, cela oscille entre 1 à 3 ans. Encore faut-il savoir que des lois votées n’ont toujours pas et n’aurons jamais de décrets d’application. Cela reste un dernier recours.
Quand la politique politicienne l'emporte
La récente utilisation de l’article 49-3 pour faire adopter la loi "Macron" avant l’envoi devant le Sénat a donné lieu à un triste spectacle. Il faut rappeler qu’il y a eu plus de 200 heures de débats, un millier d’amendements discutés. Tous ceux présentés dans la loi ont été adoptés par une majorité en séance. Majorité divisée, opposition aux "anges", la politique politicienne l’emporte. La motion de censure est rejetée. Pour une fois qu’il était question d’aller de l’avant, le gouvernement a été mis en grande difficulté.
Sous la Vème république, jamais une opposition n’a contribué à relever un défi important dans l’intérêt national. C’est d’autant plus regrettable dans la période actuelle où les problèmes ne manquent pas. Mais cela n’a rien d’étonnant après une nouvelle alternance politique lorsque la défense de chaque camp, comme par habitude, consiste à faire porter le plus souvent la faute soit sur les prédécesseurs, "au pouvoir pendant 10 ans", responsables de la situation, ou soit sur les "nouveaux arrivants", jugés sans expérience, même après 32 mois d’exercice. Les uns tentent dans la pagaille la plus totale de se rassembler autour d’une hypothétique "reconquête du pouvoir" en 2017 qui viendra, si c’est le cas, en son temps. Quant à la majorité, son souci principal est de se maintenir au pouvoir à tout prix dans l’attente de quelques clignotants de retour au "vert".
Or le seul enjeu, c’est la France. Nos responsables politiques sont loin de nous laisser paraître qu’ils en ont toujours conscience dans le passage à l’action.