Après la seconde guerre mondiale, les pouvoirs publics ont engagé une politique volontariste visant à réduire la « fracture » entre Paris et « le désert français ».
La France, l’un des pays développés les plus centralisés, découvrait les politiques dites « d’aménagement du territoire », dont, paradoxalement, l’efficacité dépendait en grande partie de l’engagement de l’Etat central - et non de la volonté des territoires eux-mêmes. La démarche était, de ce point de vue, conforme à la culture française de la centralisation. Paris et sa région, qui affichaient un PIB par habitant nettement supérieur à celui du reste du pays, finançaient le développement de la province.
Le mouvement de décentralisation politique engagé dans les années 70 – et dont le point d’orgue politique fut la loi Defferre de 1982 – a modifié la donne. En rendant plus autonomes – y compris sur le plan fiscal – les collectivités territoriales, la décentralisation a rendu les territoires davantage acteurs de leur propre développement. Un impôt comme la taxe professionnelle, particulièrement productif, a pu accompagner le financement de l’attractivité de certains territoires. Les inégalités entre territoires sont plus clairement apparues. On invente alors de concept de « péréquation », sans jamais d’ailleurs en donner une définition précise, et en essayant de surmonter une difficulté majeure : la péréquation, entendue strictement comme le moyen de compenser des inégalités, est source de dépendance, et se trouve donc en contradiction avec le principe d’autonomie de gestion, voire même de décision, qui est reconnu par ailleurs.
Quoiqu’il en soit, la mécanique ainsi créée va produire d’indéniables résultats. La puissante structuration intercommunale des agglomérations autour de la ville centre, la productivité fiscale de la taxe professionnelle, l’émergence de leaders politiques locaux – s’appuyant souvent sur le cumul avec un mandat national qui leur permettait de drainer une partie de la richesse nationale vers leur territoire – ont permis à une grosse dizaine de villes de devenir de véritables métropoles régionales, gagnant en autonomie et en puissance économique, au risque de provoquer de nouvelles inégalités régionales. Cela a plutôt bien fonctionné tant que l’Etat gardait la capacité d’intervenir pour « corriger » la répartition des richesses avec les territoires moins favorisés, notamment les territoires ruraux ou le réseau des petites et moyennes agglomérations, qui tiraient une partie importante de leur activité des services publics.
Mais le système s’est déréglé à la fin des années 2000, faute de vision de la part du pouvoir politique national et de la prise du pouvoir – à la faveur de la crise des finances publiques – par la technocratie d’Etat tournée vers elle-même. Ainsi, l’affaiblissement considérable des moyens d’action de l’Etat, les réformes des services publics – elles-mêmes accélérées par la révolution numérique -, le mouvement de « métropolisation » - que les lois récentes n’ont fait que constater car il correspond à une tendance sociétale de fond -, la disparition progressive de l’autonomie fiscale des territoires et l’insuffisante structuration régionale – en clair, la réticence toujours vive au fédéralisme –, sont en train de créer sous nos yeux ce que l’on appellera demain « les métropoles et le désert régional ».
Printemps de l’économie – Paris du 8 au 14 avril 2016
Pour sa 4° édition le Printemps de l’économie s’intéresse à « L’Economie en quête de territoire(s) ». Ce fil rouge se décline en plusieurs thèmes - Territoire & entreprises ; Des activités, des hommes, Mondialisation & Europe, Politiques publiques, Innovation & industrie et Métropoles – qui seront abordés à l’occasion de plus de 40 conférences organisées du 8 au 14 avril 2016 à Paris. L’ambition est d’offrir au grand public la possibilité de réfléchir et d’échanger pour mieux saisir les enjeux et agir… L’un des intervenants à cet événement unique vous livre ici son point de vue…