Les bons comptes de la France en Egypte

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Par Antoine Thirion Modifié le 29 novembre 2022 à 9h24
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@shutter - © Economie Matin
60%Les moins de 30 ans représentent près de 60% de la population égyptienne.

Pour la France, l’Egypte n’est pas seulement le premier client à l’export du Rafale qui a permis de lancer les ventes de l’avion de combat à l’international. Les secteurs de l’énergie, de la santé ou de la formation sont également au cœur de la relation entre Paris et Le Caire.

« La France et l’Egypte entendent concrètement approfondir le partenariat de confiance que nos deux pays entretiennent ». C’est le message que le Quai d’Orsay a souhaité faire passer le 24 octobre dernier, à l’occasion de la visite officielle en France du président égyptien Abdel-Fatah al-Sissi.

Entachée dans la presse par l’organisation opportune d’une conférence de presse par un groupe d’ONG sur les droits de l’homme, la visite du Président Al-Sissi a été principalement couverte sous l’angle de la coopération militaire et sécuritaire. Or, si la question des droits de l’homme est centrale, la comparaison hâtive et même hasardeuse, entre le pouvoir égyptien et un régime militaire démontre une méconnaissance profonde de la réalité égyptienne contemporaine.

Car le Caire multiplie les initiatives pour améliorer la vie de ses citoyens et plus particulièrement de sa jeunesse, désenchantée par les années Morsi. Aujourd’hui, les moins de 30 ans représentent près de 60% de la population. Pour le gouvernement égyptien, le partenariat économique avec la France est donc vital pour renouer avec une force vive en attente de changement. La visite du maréchal Sissi, loin des seules considérations sécuritaires, était donc, avant tout, l’occasion de consolider les réformes structurelles dans les secteurs clés que sont l’éducation, la santé ou encore la transition énergétique.

Révolution socio-économique

Car la visite en France du président égyptien a été l’occasion de signer plusieurs contrats concrétisant les nouvelles orientations économiques et sociales du pays arabe.

Comme l’a signalé le ministère français des Affaires étrangères, les accords signés fin octobre entre les deux pays visent « à accompagner les réformes socio-économiques menées par le gouvernement égyptien », en particulier dans les domaines des réformes sociales et du développement des énergies renouvelables. Les deux pays souhaitent également renforcer leur coopération « au service de la formation de la jeunesse égyptienne ».

La liste des accords signés reflète la diversité des domaines dans lesquels Paris et Le Caire souhaitent avancer ensemble. Les deux pays prévoient notamment la création et le développement d’une université franco-égyptienne, le renforcement de la coopération en matière de formation des cadres dirigeants de l’administration égyptienne et l’établissement d’une convention relative à la construction d’une Maison d’Egypte à la Cité internationale universitaire de Paris.

Les accords sont tout aussi importants dans le domaine de l’énergie. Le groupe français EDF Energies Nouvelles va construire et exploiter avec le groupe égyptien Elsewedy Electric deux centrales photovoltaïques en Egypte, d’une puissance installée de 100 mégawatts (MW) au total. Les deux projets sont assortis d’un contrat de vente d’électricité d’une durée de 25 ans signé avec la Société égyptienne de transport d’électricité (EETC).

Voltalia, spécialiste français de la production d’électricité renouvelable, devra pour sa part construire et opérer une centrale solaire de 32 MW sur le site de Benban, dans la région d’Assouan (Haute-Egypte). Baptisée Râ Solar, la centrale bénéficiera également d’un contrat de vente d’électricité de 25 ans avec la société nationale EETC.

Dans ce partenariat élargi entre les deux pays, l’Agence française de développement (AFD) joue aussi son rôle. Elle a en effet signé un premier prêt de 175 millions d’euros pour accompagner la transition énergétique en Egypte à travers la modernisation de la gouvernance du secteur de l’énergie, le développant des outils de gestion de la demande et la diversification du mix énergétique pour sécuriser l’approvisionnement.

Proparco, filiale de l’AFD dédiée au secteur privé, participe quant à elle au financement de la construction et de la mise en service de cinq centrales solaires (dont celles d’EDF EN et Voltalia) d’un total de 225 MW pour un montant équivalent à 116 millions d’euros.

Partenariat gagnant - gagnant

Au total, l’AFD et sa filiale mobilisent plus de 437 millions d’euros sous la forme de différents instruments financiers : prêts de politique publique, dons, coopération technique, financements de projets publics et privés… Ces ressources serviront à financer le secteur de l’énergie, les centres de soins de santé primaires dans cinq gouvernorats égyptiens, l’extension de la station d’épuration d’Alexandrie sous concession Suez, la réforme de la protection sociale en Egypte ou encore la mise en place d’un programme d’assistance technique auprès du ministre de l’Electricité.

Mais la relation n’est pas qu’unilatérale. La France y gagne également : les nombreux contrats signés représentent à la fois des gains économiques majeurs mais aussi servent de vitrines pour les entreprises françaises dans le monde arabe, principalement en termes de transition écologique.

Alors certes, le président de la République française a insisté sur les défis sécuritaires et sur le combat « que nous souhaitons ensemble conduire dans toute la région » contre le terrorisme. Mais il également tenu à aller plus loin.

« Au-delà de la sécurité, la stabilité passe évidemment par un développement économique durable », a affirmé Emmanuel Macron. « Forte de son bilan très positif et alors que ses engagements approchent les 2 milliards d’euros en Egypte, l’Agence française de développement y continuera ses activités tant au moyen de prêts que de dons. Mais notre souhait est de faire encore davantage », a-t-il ajouté. Preuve que ces accords sont appelés à s’approfondir dans le cadre du partenariat stratégique entre les deux Etats.

Preuve aussi qu’il serait temps d’arrêter de penser l’avenir de l’Egypte à l’aune de ses seuls défis sécuritaires ?

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chargé de développement et responsable commercial (Europe)

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