Déficit de 3 % : pourquoi la France, l’Europe ne doivent pas se polariser sur ce niveau

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Par Daniel Moinier Modifié le 20 novembre 2015 à 7h02
France Deficit Regle Bruxelles Sanctions
@shutter - © Economie Matin
3,6 %Le déficit de la France est estimé à 3,6 % pour 2016.

Un titre des Echos m’a encore fait bondir : « France : Le retour du déficit à 3% est loin d’être acquis » Quand et pourquoi l’Europe a-t-elle instituée cette « barrière » ridicule des moins 3% ? Et d’ailleurs pourquoi pas 2 ou 4% ou autres.

Aucun ménage ne pourrait survivre à long terme avec un déficit de moins 3%. Sachant qu’il faut rajouter les intérêts, c’est donc beaucoup plus que -3%. L’exemple de la gestion française depuis 1975, première année de déficit, en est l’exemple flagrant, puisque les seuls intérêts de la dette grève notre budget de 2015 de 44,3 milliards soit 11,2%. Avec nos moins 3,4% prévus en 2016, nous aurons un des solde public les plus désastreux d’Europe (Voir le graphique ci-dessous).

Vous pouvez remarquer que seuls deux pays nous dépassent encore (en négatif) mais de peu, ce sont à égalité, l’Espagne et surtout la Grèce avec moins 3,6%. Seuls quatre pays sont positifs : Le Luxembourg et l’Allemagne avec + 0,5%, l’Estonie + 0,2% et Chypre + 0,1%. POURQUOI alors avoir institué cette fameuse « barrière » comptable complètement ridicule ? C’est la France qui en est à l’origine ! Ce n’est pas étonnant, il fallait bien qu’elle se distingue pour masquer ses déficits récurrents et se donner bonne conscience !

Explications

La plus grave erreur venue de Bruxelles, est d’avoir admis la barrière des moins 3% de déficit. Pourquoi d’ailleurs 3% (Invention, décrite ci-après) : Sous la pression de la France qui n’arrivait plus à boucler son budget ? Mais comment ne pas avoir pensé qu’en cumulant des « moins pourcents », l’endettement ne pouvait que s’aggraver. Des moins + des moins font rarement des + ? ?

Rien qu’en ce qui concerne le remboursement de la dette ; même si la France emprunte actuellement et exceptionnellement, en moyenne à -0.02% pour les emprunts BTF à 3 mois et à 2,2% pour les émissions à 10 ans ; avec 46,9 milliards d'euros elle consacrera plus d'argent en 2015 à rembourser les intérêts d'emprunts à ses créanciers, qu'à former ses enfants: Pour comparatif, le budget de l'enseignement scolaire s'élèvera, quant à lui, à 45,7 milliards d'euros l'an prochain.

Si rien n’est fait pour augmenter le PIB, donc la richesse de la France, il ne sera jamais possible de revenir à flot, ou partiellement avec d’importants emprunts, qui nous replongerons encore un plus tard, dans un plus grand marasme économique.

Histoire de l’origine des moins 3%, une idée franco-française

Comment a été fabriqué cette norme européenne ; la fabuleuse règle d’or. Nous les devons à Guy Abeille, qui fut chargé de mission au ministère des Finances d’abord sous Giscard puis sous Mitterrand d’octobre 1977 à juin 1982. Il s’en expliqua en octobre 2010 lors d’une entrevue avec le journal La Tribune. A l’origine, il s’agissait d’imposer la rigueur aux ministres socialistes. Puis, bien qu’elle fût dépourvue du moindre sens économique, cette référence a fait école au point d’être retenue par le traité de Maastricht.

Description succincte de l’auteur

Après maintes tergiversations et études sur un ratio élémentaire et le déficit sur PIB, objet bien rond, jolie chimère (au sens premier du mot), ce sera ce ratio. Reste à le flanquer d'un taux. C'est bien, 3% ; ça n'a pas d'autre fondement que celui des circonstances. 1% serait maigre, et de toute façon insoutenable: on sait qu'on est déjà largement au delà, et qu'en éclats a volé magistralement ce seuil. 2% serait, en ces heures ardentes, inacceptablement contraignant, et donc vain; et puis, comment dire, on sent que ce chiffre, 2% du PIB, aurait quelque chose de plat, et presque de fabriqué. Tandis que trois est un chiffre solide; il a derrière lui d'illustres précédents (dont certains qu’on vénère). Surtout, sur la route des 100 milliards de francs de déficit, il marque la dernière frontière que nous sommes capables de concevoir (autre qu'en temps de guerre) à l'aune des déficits d'où nous venons et qui ont forgé notre horizon. Nous regardons quelle est la plus récente prévision de PIB projetée par l'INSEE pour 1982. Nous faisons entrer dans notre calculette le spectre des 100 milliards de déficit qui bouge sur notre bureau pour le budget en préparation. Le rapport des deux n'est pas loin de donner 3%. C’est ainsi que ce taux a été lancé pour la France.

Extension du domaine du ratio

Puis un jour le traité de Maastricht parut sur le métier. Ce 3%, on l'avait sous la main, c'est une commodité; en France on en usait, pensez! Chiffre d'expert ! Il passe donc à l'Europe; et de là, pour un peu, il s'étendrait au monde. Effectivement, il fallut tout de même attendre le traité de Maastricht signé en février 1992, ratifié par la France en septembre 1992 par référendum et entré en vigueur le 1er novembre 1993 pour le voir appliquer en Europe.

Il prévoit que les pays de l’Union européenne peuvent participer à l’Union économique et monétaire (UEM) à condition de remplir cinq "critères de convergence". Parmi ces critères, deux concernent le déficit et la dette cumulés de l’ensemble des administrations publiques (État, Sécurité sociale, collectivités territoriales) : L’objectif du critère concernant la dette publique est d’éviter que la dette d’un État de la zone euro ne devienne insoutenable, car l’Union n’aurait alors plus le choix qu’entre des solutions désastreuses :
le renflouement du pays en cessation de paiement par ses partenaires ;
la répudiation de la dette de ce pays ;
l’éclatement de l’Union ;
la renonciation au principe de non-renflouement établi par le traité de Maastricht, d’après lequel la dette publique des pays de la zone euro ne peut plus être financée par les émissions monétaires (c’est-à-dire par l’inflation).

Les critères de Maastricht ont été précisés et complétés par le pacte de stabilité et de croissance adopté par le Conseil européen d’Amsterdam en juin 1997. À travers ce dernier, les États de la zone euro se sont engagés :
à parvenir à une position budgétaire "proche de l’équilibre ou en excédent à moyen terme" afin de pouvoir faire face aux effets des fluctuations conjoncturelles sur les dépenses et sur les recettes publiques, sans dépasser pour autant le seuil de 3% du PIB de déficit public ;
à présenter chaque année au Conseil des ministres de l’économie et des finances (dit aussi "Conseil Ecofin") "un programme de stabilité" dans lequel ils communiqueront régulièrement leurs prévisions de croissance et de politique budgétaire pour les trois années suivantes. Lorsque c’est nécessaire, ces dernières doivent faire apparaître un retour vers l’équilibre des finances publiques.

Par ailleurs, les États de l’Union européenne ont harmonisé (sous l’égide d’Eurostat) leurs modes de calcul de la dette et du déficit publics. Enfin, ils ont mis en place deux types de procédures :
Une procédure d’examen et de surveillance mutuelle
Une procédure de sanction

Confirmés par un nouveau traité entré en vigueur le 1er janvier 2013. Un Traité portant sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire. Cependant, les contraintes du traité ne s’appliqueront qu’aux seuls États l’ayant ratifié, qui seront en outre les seuls à pouvoir bénéficier du mécanisme européen de stabilité (MES).

Analyse

Avec moins 3%, la France avec un PIB de 2065.7 milliards d’euros au 3ème trimestre 2015 aurait un déficit annuel de 62 milliards d’euros. Sans oublier d’ajouter les intérêts qui heureusement, aujourd’hui sont faibles. Toutefois aucun ménage, aucune entreprise ne pourraient survivre longtemps avec ce niveau de découvert. En premier, les banques couperaient les vivres assez rapidement pour ne pas se « couler » elles-mêmes. Alors comment un pays comme la France peut depuis 40 années se trouver en déficit ? C’est inconcevable, c’est monstrueux, sachant que les solutions sont connues par presque tous nos politiques.

Il pourrait être fait un parallèle avec les évènements sanglants et terrorisants qui viennent de se passer chez nous. Tout d’un coup, on met en place les grands moyens. Les services de sécurité, les policiers peuvent agir, ils ne sont plus bridés par des textes mais surtout par des non dits, des appréhensions idéologiques politiques, des ambitions carriéristes. Faudra t-il attendre que notre pays soit en ruines pour qu’un leader, un dirigeant mettre enfin en place les seules lois qui pourront remettre la France sur le chemin de la croissance, mais pas seulement le retour à l’équilibre mais le chemin des bénéfices. Seul possibilité de diminuer les dettes, remonter la France par le bas. Les trois-quarts des français n’attendent que cela. Du courage, Bon sang !

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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