Nos éleveurs n’ont pas besoin d’aide mais de prix

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Par Daniel Moinier Publié le 29 juillet 2015 à 5h00
France Eleveurs Crise Prix Marges
@shutter - © Economie Matin
7,2 %La part des agriculteurs dans la vente de produits alimentaires a diminué de 7,2 % entre 2013 et 2014.

Un confrère vient d’annoncer en titre: "Et si la solution était chez les consommateurs ?" C’est exactement ma réflexion depuis toujours, avec en plus, un coup de pouce législatif de l’état.

Nos agriculteurs sont une nouvelle foi en colère, et c’est peu dire. Ils s’expriment comme toujours avec leurs moyens habituels : blocage des routes et des rentrées de denrées sur le territoire national.... Mais cette exaspération exprime cette foi un ras le bol jamais atteint. Pourquoi ?

Il existe des distorsions et incompréhensions entre le prix vendu et le prix payé à l’étalage. Et pourtant, sauf exception, les marges ne sont pas extraordinaires pour chacun des intermédiaires et vendeurs finaux. D’une façon générale, les sociétés françaises avec un taux de marge d’un peu plus de 29% se trouvent en queue de peloton de tous les pays européens, alors que la moyenne européenne se situe à 37%. Le taux de marge est de 34 % au Royaume-Uni, de 40,4 % en Italie, de 41,2 % en Allemagne et de 41,4 % en Espagne.

En ce qui concerne nos agriculteurs, depuis quelques années, les marges n’ont jamais été aussi faibles. Et la concurrence s’est fortement amplifiée, notamment avec l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, l’Amérique du Sud et bien d’autres pays mondiaux. Si l’on prend l’exemple du porc, la marge des abattoirs se situait en 2011 à 8,6% du prix total. Si cette marge a baissé en 2012 à 7,4%, elle est remontée en 2013 à 7,5% et a atteint 9,15% en 2014, est repartie à la baisse en 2015. Le prix d'achat de la viande aux éleveurs a diminué en 2014. Une baisse jugée insupportable par les agriculteurs.

Créé en 2010, l'Observatoire de la formation des prix et des marges, qui dépend de France Agrimer, est en charge d'analyser les prix des produits alimentaires. Les chiffres donnés sur cette période font le constat que la part revenant aux agriculteurs est passée de 38,6% du prix final en 2001 à 36,3% en 2014. Même si, en valeur absolue, le prix payé aux éleveurs a légèrement augmenté, passant de 2,43 à 2,50 euros. Mais celui-ci a régressé entre 2013 et 2014 (-7,2%).

Et même les nouvelles modifications et aides qui viennent d’être apportées par l’état pour réprimer leur mécontentement, ne seront comme d’habitude que des pis-aller qui ne résoudront pas le problème de fond. C’est pour cela que le mouvement a du mal à s’éteindre. Depuis 1962, date de mise en place de la PAC (Politique Agricole Commune), nos agriculteurs ont reçu en permanence des aides et subventions qui devaient entre autres permettent de moderniser et développer l’agriculture. 53 ans plus tard, malgré ses aides nationales et européennes, la situation s’est encore fortement dégradée !

A l’échelle européenne, ces aides ont représenté jusqu’à 45% du budget européen, si l’on compte les 10% consacré au développement rural. Toutefois, celles-ci ont nettement diminué depuis quelques années. Elle a toutefois permis, d’isoler l’agriculture européenne des variations des prix mondiaux en lui accordant des avantages en matière de prix par rapport aux produits importés. La PAC a été en permanence critiquée en raison de la difficulté à stabiliser son budget, des problèmes de fonctionnement posés par l’élargissement à vingt-huit et de l’inégalité des aides qui profitent aux pays producteurs et aux propriétaires d’importantes exploitations, puisque les aides sont proportionnelles aux surfaces de l'exploitation. Depuis 2003 le montant du budget est stable car non indexé sur l'inflation, et en baisse par rapport au budget total de l'UE.

Analyse de l'échec

Depuis 40 ans, nous assistons à une lente dégradation de l’économie européenne, liée à une perte d’hégémonie mondiale. Et même si certains pays semblent, par les politiques misent en place, atténuer le mouvement, le déclin général continue. Pourquoi ? La plupart des pays se sont socialisés à outrance sans s’occuper des rentrées à mettre en parallèle. La facilité de manœuvre des politiques ont été d’augmenter la pression fiscale par tous les moyens sans percevoir qu’ils asphyxiaient de plus en plus l’économie des pays. La France, dans ce registre a pris de très loin la tête de fil. Les années 82/83 ont été catastrophiques avec les 60 ans, 39 heures, 5ème semaine de congés, 8 mai remis férié. Il s’en est suivi 3 dévaluations, puis la création de la CSG/RDS. Le coût de grâce est arrivé en 2000 avec les 35 heures et les cinq années suivantes en régression. Nous avons été les seuls des pays industrialisés, au niveau mondial, à adopter une retraite à 60 ans et les 35 heures. L’exemple n’était donc pas forcément à suivre ! Un seul exemple, les retenues sur salaires sont passées de moins 7% à presque 22% ! Soient multipliées par plus de 300% ! Cela a été catastrophique pour le pouvoir d’achat, la consommation, les marges des entreprises, l’export pour ne citer que ceux-là.

Cette baisse se révèle également insupportable pour les agriculteurs. Avec un pouvoir d’achat fortement en baisse, comment voulez-vous que les acheteurs ne se tournent pas vers des prix les moins chers, entre autres, le low-cost, y compris agricole ? Les distributeurs se sont dirigés vers les producteurs étrangers les moins chers. Et une lente détérioration des prix s’est mise en marche. Le même problème s’est révélé chez nos industriels surtout nationaux. Alors que faire : Augmenter les marges, Comment ? Il faut faire exactement l’inverse de ce qui s’est fait depuis des décennies : diminuer les prélèvements. Pas globalement, l’état sur le champ n’y survivrait pas, mais en pourcentage. Comment ? Compte tenu du niveau des prélèvements, des marges trop faibles, des difficultés d’investissement qui s’en suivent, les entreprises n’ont plus de marge de manœuvre. Seul le gouvernement a encore la possibilité de faire passer les réformes nécessaires.

Puisqu’il nous manque 25% de PIB, soit 25% d’heures travaillées, payées pour que notre pays retrouve au minimum l’équilibre des comptes, augmentons les temps de travail et d’activité sur l’ensemble de la durée de vie. Soit 11.500 heures de travail en plus. Ensuite, il faudra compenser la durée de vie qui augmente de 7h1/2 par jour à compenser. Le simple fait de passer à 40 heures, augmenterait le pouvoir d’achat des salariés base 35 heures de 14,3%. Quelle bouffée d’air pour les commerces, agriculteurs et autres. Cela diminuerait de suite, le coût horaire jusqu’à plus de 13% pour une bonne partie des entreprises. Agriculteurs, entrepreneurs…ne vous trompez pas de combat : Il faut pousser par tous les moyens nos dirigeants à changer ces lois ridicules qui ont mis à bas l’économie, la notoriété, et l’influence française ainsi que celles de l’Europe. Pourquoi depuis trois années, la Suisse a été reconnue meilleure économie mondiale ?

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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