La Toussaint est le moment de l’année où ressurgissent les sempiternelles statistiques sur la désaffection et le désamour des nouvelles générations pour les cimetières. Il est vrai que malgré des évolutions majeures de la société - familles recomposées, développement de la crémation, flux migratoires de plus en plus importants, expatriations - le secteur funéraire est resté fortement hermétique au changement.
En effet, alors que la plupart des secteurs d’activité ont fait leur révolution digitale (journalisme, voyagistes, shopping, rencontres, etc.) et continuent à proposer des services de plus en plus interactifs, les évolutions sur le marché funéraire sont jusque-là restées timides même si la tendance semble être à l’innovation.
Cela a commencé par le développement de sites simples, sous forme de livres d’or, permettant aux proches de laisser des messages. Facebook ensuite, en permettant de transformer ses pages en pages de commémoration, a transformé ses murs en potentielles pierres tombales virtuelles. Des pages « En souvenir de » abritant aussi bien des artistes célèbres que des inconnus, ont également commencé à voir le jour. Après le choc lié à la disparition et la phase de fuite de la douleur, survient une période où le besoin de recréer le lien avec le défunt se fait sentir. Pour certains, la page Facebook permet de recréer ce lien et de faire progressivement son deuil.
Certaines évolutions technologiques commencent également à émerger mais restent tout de même encore anecdotiques : on peut, dès à présent imprimer une urne en 3D à l’effigie du défunt, intégrer un QR code à une pierre tombale afin de revoir du contenu lié à la personne décédée… voire même bénéficier d’un cercueil connecté aux réseaux sociaux du défunt et diffusant en continu les messages laissés de son vivant. Chaque pays ayant une notion très différente de la mort, le développement de ces innovations se fait plus ou moins rapidement, les pays anglo-saxons étant ceux où le taux d’adoption semble le plus rapide.
D’autres sociétés se veulent encore plus ambitieuses. Leur objectif : créer une base de données de l’ensemble des personnes décédées afin de faire perdurer leur mémoire pour l’éternité. C’est le cas par exemple de eterni.me, qui se propose d’agréger tous les souvenirs liés au défunt et de les intégrer à un avatar intelligent lui ressemblant, ou de quietis.com, cimetière virtuel permettant de choisir un emplacement personnalisé pour le défunt et partager des souvenirs entre proches.
Difficile de dire si le digital favorise ou ralentit le processus de deuil. Mais le digital peut permettre de renforcer des liens entre des proches du défunt qui se sont perdues de vue, d’échanger et partager des souvenirs entre famille et amis du défunt, d’honorer ensemble la mémoire des êtres aimés... Et de transformer ce moment habituellement associé à la tristesse en un processus de commémoration durable et chaleureux, comme au Mexique où la Toussaint est un moment de fête où les esprits défunts reprennent le chemin du pays des vivants…