Fracture éducative : un autre numérique est possible

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Par Anne-Laure Monier Publié le 22 octobre 2021 à 5h00
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@shutter - © Economie Matin
48%48% des parents ouvriers estiment que leur enfant a subi un retard scolaire irrattrapable

Parmi ses nombreuses conséquences négatives, la crise sanitaire que nous traversons depuis plus de dix-huit mois a considérablement accentué les inégalités scolaires. Au cours des différents épisodes de confinement qui ont contraint les familles à pratiquer l’école à la maison, la fracture numérique s’est en effet peu à peu transformée en une fracture éducative extrêmement marquée. Pourtant, les outils numériques ne sont pas voués à creuser inévitablement les inégalités en matière d’accès à la culture scolaire. Concevoir et promouvoir des applications pédagogiques accessibles à tous pourraient au contraire contribuer à démocratiser l’éducation et à freiner les effets des inégalités sociales sur les parcours scolaires.

Un impact à long terme sur le devenir scolaire des élèves

Selon une étude IPSOS, les parents d’élèves de classes populaires ont rencontré bien plus de difficultés dans l’organisation technique de la scolarité à distance mais aussi dans le suivi pédagogique des devoirs de leurs enfants. Ainsi, 42% des foyers de classe populaire ne disposaient pas d’ordinateurs ou de tablettes en nombre suffisant (contre 33% en moyenne) et 52% ont eu du mal à comprendre les documents transmis par les professeurs (contre 38% en moyenne). Sur le long terme, ces difficultés pourraient avoir un impact sur le devenir scolaire de ces enfants : 48% des parents ouvriers estiment que leur enfant a subi un retard scolaire irrattrapable, contre seulement 33% des parents cadres supérieurs, lesquels peuvent plus souvent avoir recours à des offres de soutien scolaire à domicile.

Le numérique entretient-il forcément la fracture éducative ?

Le confinement a donc influé différemment sur la scolarité des enfants de différents milieux. Cela ne signifie cependant pas que, du fait de la fracture numérique, les usages pédagogiques du web ne pourraient qu’entretenir et accentuer la fracture éducative. En effet, chaque jour des applications pédagogiques accessibles à tous contribuent au contraire à mettre le numérique au service d’un accès plus égalitaire à l’éducation. A condition de mettre à profit les atouts spécifiques du numérique en matière éducative.

Rendre l’apprentissage plus amusant

L’une des forces du numérique en matière d’éducation réside dans les vertus de la ludification. Plus qu’aucun autre support, les applications numériques se prêtent à un apprentissage amusant et autonome, débarrassé des rigidités du cadre scolaire et du regard parfois intimidant des professeurs. La fusion entre les applications d’apprentissage et le gaming est ainsi l’une des perspectives qui pourraient permettre de rendre la culture scolaire plus accessible à tous.

Les vertus pédagogiques de l’intelligence artificielle

Si le numérique peut avoir un effet positif sur les trajectoires scolaires des enfants, c’est également du fait de l’intégration des dernières découvertes en matière de neurosciences et d’intelligence artificielle. De nombreuses études ont en effet montré que le fait de présenter à intervalles une information à un individu selon un intervalle précis facilite son assimilation. Les applications pédagogiques peuvent désormais tirer profit de ces connaissances grâce à des algorithmes déterminant précisément le moment optimal pour présenter à nouveau une information de façon à l’ancrer profondément dans la mémoire de l’élève.

Réconcilier des familles divisées par le numérique

L’usage des outils numériques, tablettes, ordinateurs ou smartphones, constitue le principal sujet de conflit au sein de 72% des familles françaises. Beaucoup de parents considèrent en effet le temps passé sur les écrans comme du temps perdu et ne peuvent s’empêcher de comparer les heures passées par leurs enfants sous l’influence des algorithmes des GAFA au peu de temps consacré à leur travail scolaire. En faisant fusionner apprentissage, gaming et contrôle parental, les applications pédagogiques pourraient bien contribuer à réconcilier ces familles. Conditionner le visionnage de vidéos ou l’usage de réseaux sociaux à un passage par les applications pédagogiques, pourraient notamment permettre à des parents fatigués par les conflits de s’assurer que l’usage numérique de leurs enfants ait un impact positif sur leur scolarité.

Parce que tout enfant, quelle que soit son origine sociale, a droit à une éducation de qualité et à une chance de réussir, la fracture éducative entraînée par la pandémie de COVID-19 devrait nous alerter et lancer une réflexion collective sur les usages pédagogiques du numérique. Pour que les applications web et mobiles deviennent un véritable facteur de démocratisation de la culture et des savoirs scolaires, il est nécessaire de les rendre accessibles à tous, mais aussi de faire leur promotion auprès des publics qui en ont le plus besoin.

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Anne-Laure Monier est Co-fondatrice et CEO de Nanaba

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