Un vent de folie souffle-t-il sur l’économie en ce moment ? On pourrait le croire tant certaines décisions, certaines actions, voire certains comportements des acteurs économiques semblent parfaitement insensés.
Ainsi, phénomène fréquent lorsqu’on traverse une période de troubles économiques et politiques comme c’est le cas actuellement, on recommence à entendre ici ou là les thèses hallucinées de prophètes auto-proclamés qui annoncent à qui veut les entendre une fin du monde imminente. On évoquera à peine la probable découverte d’une nouvelle planète massive aux confins de notre système solaire, venant brusquement raviver les craintes jusqu’ici assoupies de ceux qui voyaient déjà la Planète X/Nibiru/Nemesis interférer brutalement avec l’orbite terrestre au point de nous expédier, dans le meilleur des cas, vers une mort certaine mais rapide (des variantes nous promettent au contraire une joyeuse panoplie d’agonies aussi longues que douloureuses avant l’issue fatale, de toute façon inéluctable).
Mais le monde économique, que l’on suppose à tort parfaitement froid et dépassionné, n’est pas épargné par cette démence croissante. En effet, comment considérer autrement cette nouvelle tendance aux taux d’intérêt négatifs, et qui fait que désormais un quart de la dette d’État mondiale… rapporte de l’argent au lieu d’en coûter ? Allons-nous entrer dans un monde étrange où on nous versera des intérêts quand on contractera un crédit ? Et où notre épargne nous coûtera de l’argent au lieu de nous en rapporter ?
Et que penser de cette nouvelle tendance des Japonais (qui n’en sont plus à une folie près, c’est vrai) qui les pousse à retirer leur argent des banques pour ensuite stocker des billets chez eux, en dépit de toute logique ? Ou des Russes qui se mettraient à brandir la menace nucléaire comme aux heures les plus sombres de la Guerre Froide, mais cette fois pour dissuader les occidentaux de jouer en Syrie le jeu militaire d’un État Islamique qu’ils sont pourtant censés combattre partout ailleurs ? (on sait maintenant que le coup des ripostes nucléaires est surtout né dans l’esprit un peu malade des journalistes du Washington Post)
Enfin, tandis que certains cherchent des signes pouvant les renseigner sur l’ampleur de la prochaine crise à venir (dans l’évolution de l’once d’or exprimée en barils de pétrole par exemple, ce qui reviendrait presque à la deviner dans le marc de café), notre gouvernement s’acharne à dépenser des sommes qu’il n’a pas pour booster un investissement qui n’existe pas et inciter des entreprises qui n’en veulent pas à acheter de nouvelles machines… alors qu’elles souhaitent juste avoir suffisamment d’argent à distribuer à la fin de l’année. Ce que les nouvelles aides vont probablement les aider à obtenir. Ironie du sort.
Alors cette folie n’est-elle que passagère, simple effet fugace d’un stress généralisé devant une situation qui nous échappe totalement ? Ou bien s’agit-il au contraire d’un symptôme plus durable qui nous place à peine au tout début d’une monumentale dégringolade ? Certains le pensent, et d’autres sont déjà engagés sur la pente savonneuse (comme le Venezuela par exemple, en faillite pure et simple), contraints de se rabattre sur leurs ultimes richesses pour essayer de glisser moins vite. L’or, évidemment, tient une place de choix dans cette stratégie de la dernière chance. Mais il ne faudrait pas pour autant le condamner trop rapidement à cette seule fonction de dernier recours. Ce noble métal, qu’on qualifie encore souvent de « relique barbare », est avant tout un formidable outil de sécurisation par sa seule valeur intrinsèque, laquelle ne dépend ni des monnaies ni des États.
Et s’il est « barbare » c’est surtout dans le sens romain du terme, à savoir étranger à l’empire. Ce qui n’est peut-être pas une si mauvaise chose, lorsque l’empire semble sur le point de disparaître…