Exilés fiscaux : où et pourquoi partent-ils ?

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Par Manon Sieraczek-Laporte Modifié le 10 juin 2013 à 19h00

L'exil fiscal est un sujet abordé de façon récurrente mais trop souvent caricaturé. C'est la thèse que propose Manon Sieraczek-Laporte, avocate fiscaliste spécialisée dans le contentieux fiscal, dans son dernier livre "Exilé Fiscaux. Tabous, fantasmes et vérités". Dans cet extrait, elle dresse le profil des exilés et leurs destinations favorites.

Une fois prise la décision de partir, après la vague de doutes et de rancœur mêlés, il reste à déterminer vers quelle destination. On ne choisit pas son pays d'adoption comme un lieu de villégiature et beaucoup de facteurs sont à prendre en compte indépendamment de la fiscalité. Hormis les avantages fiscaux, ils varient selon les lieux. Qualité et coût de la vie, environnement linguistique, climat, réseau routier, ferroviaire, aéroportuaire, offre culturelle, opportunités professionnelles... tout est considéré avant de fixer un choix.

Parmi les éléments personnels qui influencent les choix de destinations, l'âge, et donc la volonté ou la capacité de recréer de la richesse, est décisif. Ceux qui en sont, entre trente-cinq et cinquante ans, dans la force de l'âge et de l'ambition créatrice, et veulent entreprendre, s'investir, préféreront des endroits propices à la prise de risques. Où dynamisme et audace seront appréciés à leur juste valeur. Ils iront plutôt vers la Grande-Bretagne, le Moyen-Orient et l'Asie* (Singapour ou Hong-Kong). Au-delà de cette génération, ceux qui ont une famille, des enfants travaillant en France, ne partiront pas très loin et opteront plutôt pour un environnement francophone, la langue à un âge avancé pouvant être une vraie barrière : la Belgique, le Luxembourg, la Suisse... Quels sont donc les attraits respectifs des pays qui « nous volent » – ou au mieux nous empruntent – les meilleurs de nos entrepreneurs ?

Les pays les plus paradisiaques ne sont pas toujours ceux que l'on croit

Au niveau des taux d'imposition, qu'il s'agisse des revenus, des bénéfices des sociétés, de la plus-value, du capital ou du patrimoine, des droits de succession ou de donation, la France se place parmi les pays les plus gourmands (mais elle offre un système de santé performant, une scolarité gratuite, etc., ne l'oublions pas). En outre, la création d'une zone monétaire unique a supprimé les restrictions principales à la mobilité du capital et, en vertu du traité de Rome**, chacun en Europe est en droit de décider de son lieu de résidence en fonction de critères qui lui appartiennent. Comment fonctionnent les régimes fiscaux de nos principaux concurrents. Quels avantages offrent-ils à leurs résidents étrangers ?

Les pays les plus « paradisiaques » ne sont pas toujours ceux que l'ont croit. Aujourd'hui, on peut parler de concurrence fiscale entre Etats, et même de concurrence dommageable. En particuliers entre ceux de l'Union européenne. Autrement dit, entre alliés.

[...]

La Suisse, première destination des Français à l'étranger

La Suisse est la première destination des Français à l'étranger***, environ 200 000 personnes selon les statistiques helvétiques, binationaux compris, dont 50 000 à Genève. Il ne faut pas croire qu'il s'agit de « riche Français » exclusivement, on n'entre pas dans le pays comme dans un moulin, on n'entre pas dans le pays comme dans un moulin. Pour être domicilié finalement en Suisse, il faut pouvoir y justifier de plus de la moitié du temps de séjour dans l'année, ce qui ne fut pas sans poser problème à Johnny Hallyday, qui n'a pas rempli les conditions parce qu'il partage son temps entre Los Angeles, Saint-Barthélemy, Paris et Gstaad.

Le foyer doit être en Suisse. En cas de conflit de résidence, c'est le centre des intérêts vitaux, critère essentiel qui prévaut****. Par ailleurs, il faut avoir un permis de séjour, le permis B qui est un permis de résidence longue durée (annuel, renouvelable sur cinq ans), ou le permis C qui est délivré aux ressortissants de l'Union européenne qui ont un emploi et qui résident en Suisse.

* Surtout les 30-35 ans.

** Le traité de Rome prévoit quatre libertés fondamentales : les libertés de circulation des marchandises, des capitaux, des personnes et des services.

*** Environ 10% des Français domiciliés à l'étranger vivent en Suisse.

**** Le seul fait d'établir que l'on a en Suisse un domicile, un frère ou des voitures, ne suffit pas à déterminer la résidence suisse en l'absence de toutes précisions sur les relations personnelles de. l'intéressé dans le pays.

Extraits du livre « Exilés fiscaux : Tabous, fantasmes et vérités » aux Editions Du Moment, par Manon Sieraczek-Laporte.

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Docteur en droit fiscal, Manon Sieraczek-Laporte est avocate au barreau de Paris. Elle fonde en 2006, un cabinet spécialisé en contrôle et contentieux fiscal. Experte reconnue sur les questions de fiscalité, elle est régulièrement sollicitée par des institutions, think tanks et médias où elle y défend une fiscalité équilibrée, simplifiée et harmonisée à l'échelle européenne.

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