Ce n’est vraiment pas pour faire de la gloriole, mais il est assez fatigant et pour tout dire déprimant d’avoir assez souvent raison.
A la suite des attentats sanglants du vendredi 13 novembre, je me suis mis à travailler sur un numéro spécial de ma lettre STRATEGIES pour le mois de décembre et consacré à « l’économie de guerre ».
Si l’allocution présidentielle traditionnelle des vœux de fin d’année est passée relativement inaperçue, il n’en demeure pas moins qu’une phrase bien particulière prononcée par Hollande a particulièrement attiré mon attention et l’interview donnée aujourd’hui par le ministre de l’économie Emmanuel Macron est l’occasion rêvée de revenir sur ce sujet.
Hollande a en effet déclaré qu’il y avait dans notre pays évidemment un état d’urgence sécuritaire mais aussi un état d’urgence économique et cette petite phrase, ce petit glissement sémantique va s’avérer vraisemblablement très lourd de sens mais surtout de conséquences dans les mois qui viennent !
Macron: «Nous devons être à la hauteur de l’état d’urgence économique»
C’est le titre de cet article du Figaro qui revient sur les points essentiels de l’interview donnée par Macron dans le Monde (mais l’article est payant, du coup pour savoir ce qui est écrit dans le Monde il suffit de lire le Figaro, nous vivons vraiment dans un monde extraordinaire de paradoxes et de crétineries).
« Déterminé, Emmanuel Macron ne semble rien vouloir lâcher. Dans son entretien accordé au journal Le Monde, le ministre de l’Économie entend poursuivre les réformes pour répondre aux faiblesses économiques de la France.
Un engagement qui l’a conduit à façonner de nouvelles mesures principalement axées sur le marché du travail et qu’il aurait déjà présentées au chef de l’État et du gouvernement. «Nous devons être à la hauteur de l’état d’urgence économique: c’est le moment pour engager de nouveau de grandes réformes», souligne-t-il avant d’ajouter que «les Français veulent non pas d’un optimisme béat mais savoir où on va, ce qu’on propose pour le pays.»
A votre avis c’est quoi une « grande réforme » ?
Je pense qu’une grande réforme c’est évidemment plus de droits sociaux, plus de protection pour les gens et pour les travailleurs. Une grande réforme c’est sans doute des salaires en hausse, une retraite que l’on peut prendre plus vite et plus jeune, c’est aussi sans doute, plus de médicaments remboursés… Ce que je viens d’écrire est une boutade puisque vous constatez bien depuis des années que le processus à l’œuvre n’est pas celui du progrès social mais du détricotage consciencieux de l’ensemble de l’héritage du Conseil National de la Résistance.
Une réforme c’est un concept positif, difficile d’être « contre » les réformes. Sauf qu’elles n’ont qu’un seul objectif, aligner notre droit social sur le moins disant social… et le moins disant social c’est au choix, la Bulgarie ou la Chine.
Alors on dérégule, on explique que pour faire baisser le chômage il faut encore plus de précarité, encore moins de retraite, travailler encore plus longtemps alors que tout le monde sait très bien qu’il n’y a plus assez de travail pour tout le monde.
Nos dirigeants ne luttent pas contre le chômage. Ils luttent contre le coût du travail.
Nos dirigeants ne luttent pas contre le chômage. Ils luttent contre les éléments sociaux qui empêchent la maximisation du profit des multinationales.
Nos dirigeants ne veulent pas relancer la croissance en émettant de la monnaie (les QE de la BCE). Ils luttent pour sauver les banques de leur propre insolvabilité.
Lorsque j’affirme cela, non seulement j’en suis sûr, mais cette affirmation n’est ni de droite, ni de gauche. Elle n’est pas idéologique. Cette affirmation c’est l’observation des faits. L’observation de la réalité.
J’ai 41 ans. Et depuis que je suis petit j’entends nos dirigeants m’expliquer qu’il faut lutter contre le chômage et la pauvreté. Année après année, le discours est le même, les postures de communication identiques et le mantra répété à l’infini. Macron, lui aussi, veut lutter contre le chômage. Plus ils luttent, plus le chômage monte. Plus ils luttent contre la pauvreté plus cette dernière augmente. Et la raison est simple. Ce n’est pas de l’incompétence, c’est du mensonge. Ils ne luttent pas contre nos maux. Ils utilisent des mots pour faire croire qu’ils combattent nos maux, mais en réalité, les objectifs poursuivis sont radicalement opposés à ce qui nous est annoncé.
L’état d’urgence économique c’est la Grèce !
L’état d’urgence sécuritaire, c’est avant tout la suppression des droits fondamentaux. Peu importe les objectifs poursuivis, peu importe la justification ou l’ânerie intellectuelle du type « si t’as rien à cacher t’as rien à craindre »… c’est avec ce type de raisonnements que l’une des plus grandes démocraties du monde, les États-Unis d’Amérique a embastillé pendant 5 ans tous ses citoyens (60% étaient américains de nationalité) d’origine japonaise après l’attaque sur Pearl Harbor. Je peux vous garantir que ces « Américains » qui n’avaient pas la bonne couleur de peau, n’avait rien à cacher. Ils ont quand même tous terminés dans des camps d’internement femme, et enfants compris. Et c’est l’une des réflexions que je menais justement dans ma lettre du mois de décembre sur l’économie de guerre.
Alors l’état d’urgence économique c’est la Grèce ! Qu’est-ce que cela veut dire ? Que c’est une suspension du libre droit à l’autodétermination des peuples. Si l’on considère que les peuples ont le droit de choisir leur destin et leurs priorités économiques (même si je ne suis pas d’accord) alors force est de constater qu’évidemment, sous la pression de la dictature européenne, la Grèce n’est plus une démocratie mais un protectorat européen. Une simple province.
Quel que soit le parti pour lequel vous votez, le résultat est le même. La politique menée est identique. Vous avez l’illusion du choix, mais en réalité c’est une imposture économique, c’est du marketing !! Vous achetez un emballage différent, mais le produit est rigoureusement identique. Ce produit c’est l’austérité, le mondialisme et l’enrichissement des multinationales. Votre avis ne compte plus.
L’état d’urgence sécuritaire permet déjà de supprimer le droit de… manifester. Pratique. Les voeux de Monsieur de Juniac, le pédégé d’Air-France sont enfin exaucés, le droit de manifester, dans les faits n’existe plus.
Il ne reste plus qu’à justifier les pires des réformes sociales par « l’état d’urgence économique ». Au nom de ces états d’urgence, qu’ils soient sécuritaires ou économiques, on vous imposera ce que l’on veut et ce ne sera pas dans votre intérêt. Tout devient justifiable. Embastiller un écolo fut-il radical, augmenter les impôts pour financer la guerre contre le terrorisme, pensez-donc ma brave dame, ça coûte cher la guerre, ou interner d’office des gens par centaines, ou par milliers… cela se finira comme à chaque fois par des millions. Vous n’aurez plus de retraite, faudra travailler plus et gagner moins, la mise à niveau par le bas de la mondialisation est à ce prix.
Vous ne croyez pas que nous serons compétitifs avec un pays comme la Chine en restant de gentille démocratie avec un droit social et des salaires élevés alors que la Chine est une dictature avec des salaires faibles. Ce qui s’impose dans le monde, c’est un modèle totalitaire. Le totalitarisme marchand.
Cette partie des propos de Macron est également importante : « Le ministre de l’Économie a également réaffirmé la volonté de «soutenir les TPE et PME dans leur parcours de croissance sur le plan fiscalo-social et réglementaire» mais également, sur un plan plus social, de «revenir sur les prud’hommes avec l’instauration d’un plafond pour les indemnités prononcées.»
Au nom de l’état d’urgence, on ne laissera plus les juges, juger d’un préjudice. Le préjudice maximum sera fixé… D’ailleurs avec l’état d’urgence sécuritaire on n’a plus besoin ni de juge, ni d’avocat.
Heureusement, que c’est un gouvernement de gauche qui est au pouvoir, parce que franchement quand je vois les images que mes yeux me renvoient, ou que j’entends ce que j’entends, nous poursuivons une glissade malsaine vers le plus insidieux des totalitarismes. La démocratie en France est officiellement morte le 13 novembre 2015 et par une ironie exquise de l’histoire les socialistes bêlant et bien-pensants en sont les fossoyeurs.
En attendant mes chers amis, préparez-vous, il est déjà trop tard !
Article écrit par Charles Sannat pour son blog Insolentiae