Réaction face à l’épidémie : back to basics

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Par Hervé Goulletquer Modifié le 24 février 2020 à 15h27
Bourse Fonds Communs Placement
@shutter - © Economie Matin
3%Le CAC40 a cédé près de 3% à l'ouverture le 24 février 2020 à cause du coronavirus.

Entre-t-on dans une deuxième phase de la maladie ? La genèse de celle-ci serait à rechercher dans une propagation rapide de la maladie dans d’autres pays que la Chine. Tant qu’on ne saura pas répondre, la prudence qu’implique l’incertitude prévaudra. L’ambiance sera risk-off sur les marchés.

Comment ne pas considérer que le marché va devoir réviser sa position sur la course à la présidence américaine ? Un Démocrate clairement positionné à gauche peut se retrouver face au Président sortant ; avec qui plus est des chances sérieuses de l’emporter.

On l’a dit et sans doute redit ; la crise du coronavirus expose l’observateur, dont les marchés financiers, à une incertitude, pas à un risque. On « probabilise » les conséquences du second, alors qu’on extrapole et qu’on compare les hypothèses formulées aux réalités observées lorsqu’on est confronté à la première.

C’est bien cette méthode qui a été employée tout au long de la première phase de l’épidémie (le mot est-il bien choisi ?), durant laquelle les cas étaient concentrés en Chine. Le ralentissement du nombre de malades et aussi du nombre de décès, repérable dès les premiers jours de février, a rassuré. Le retour à la normale devrait arriver dans pas trop longtemps et l’économie ne serait donc pas trop durement affectée.

Aujourd’hui, on s’interroge : entre-t-on dans une deuxième phase de la maladie ? La genèse de celle-ci serait à rechercher dans une propagation rapide de la maladie dans d’autres pays que la Chine. Ainsi en Corée du Sud, le nombre de malades est passé de 31 le 18 février à 104 le 20 et à 602 le 23. De même en Italie, entre le 21 et le 23 février, le nombre de patients contaminés a augmenté de 3 à 76.

Tout observateur de se poser alors deux questions. Premièrement, quand va s’arrêter cette dynamique exponentielle et deuxièmement est-ce que d’autres pays vont « subir le même sort » ? Tant qu’on ne saura pas répondre, la prudence qu’implique l’incertitude prévaudra. L’ambiance sera risk-off sur les marchés.

Même si l’investisseur est en droit de s’interroger sur la « fraicheur » des signaux envoyés, il est nécessaire de revenir sur la publication des enquêtes PMI de février. Les investisseurs l’attendaient avec une certaine fébrilité. N’était-ce pas la première information un tant soit peu exhaustive sur les conséquences économiques dans le reste du monde de la crise du coronavirus en Chine ? Disons que les résultats ne sont pas homogènes et n’envoient pas un message complètement clair. Pas tant sur le sens de l’impact ; il est évidemment baissier. Mais bien davantage sur l’ampleur ; avec des divergences qui suggèrent une difficulté à prendre la mesure précise de ce qui est en train de se passer. Au Japon, la baisse de l’indice composite est sévère et suggère que l’activité sera assez profondément affectée en Chine et dans le reste de l’Asie. En Zone Euro, ce même indice fait de la « résistance », avec une petite hausse de 0,3 point (à 51,6). Il n’empêche que certains détails portent déjà les « stigmates » de la crise sanitaire. Il en est ainsi en Allemagne dans le secteur manufacturier, avec une réduction des commandes à l’exportation et un allongement des délais de livraison. Aux Etats-Unis, le résultat a été plus mauvais qu’attendu. Ainsi, l’indice composite a reculé de près de 4 points à 49,6. Les répondants aux enquêtes mettent en avant l’épidémie, avec la crainte d’un ralentissement économique généralisé ; mais aussi les incertitudes liées aux élections de novembre prochain.

Disons donc deux mots de là où en est la campagne des primaires démocrates. Bernie Sanders a largement gagné le caucus du Nevada : 47,1% des suffrages contre 21% à Jo Biden. Les autres candidats sont en-deçà de la barre des 15% et n’engrangeront donc pas de nouveaux délégués. Le prochain rendez-vous est en fin de semaine en Caroline du Sud. Les deux favoris sont une nouvelle fois Sanders et Biden. Si le second a l’avantage, la dynamique des derniers jours est en faveur du premier. Comment ne pas considérer que le marché va devoir réviser sa position sur la « course à la présidence » ? Celui-ci est parti avec une double idée :

  • Un duel Trump contre Biden est sans impact car dans les deux cas la politique économique déclinée sera Wall Street compatible et un match Trump – Sanders ou Trump – Warren se terminera à l’avantage du premier ;
  • In fine, la primaire démocrate prendra la forme d’une compétition entre un centriste et un « gauchiste ».

C’est cette deuxième certitude qu’il faut sans doute revoir et qui met alors à mal la tranquille assurance ressentie avec la première. Il y a trois lignes politiques qui s’affrontent à l’intérieur du Parti démocrate et pas deux : le Centre avec Biden et Klobuchar, la Gauche avec Bloomberg (eh oui !) et Buttigieg, et l’Extrême-gauche avec Sanders et Warren. A la convention de juillet, la désignation peut tout à fait se porter sur une personnalité assez marquée à gauche et à même de mener la vie dure au candidat Trump. Le point soulevé par les réponses à l’enquête PMI de février est légitime : la campagne électorale est pleine d’incertitudes !

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Hervé Goulletquer est stratégiste de la Direction de la gestion de La Banque Postale Asset Management depuis 2014. Ses champs d’expertises couvrent l’économie mondiale, les marchés de capitaux et l’arbitrage entre classe d’actifs. Il produit une recherche quotidienne et hebdomadaire, et communique sur ces thèmes auprès des investisseurs français et internationaux. Après des débuts chez Framatome, il a effectué toute sa carrière dans le secteur financier. Il était en dernier poste responsable mondial de la recherche marchés du Crédit Agricole CIB, où il gérait et animait un réseau d’une trentaine d’économistes et de stratégistes situés à Londres, Paris, New York, Hong Kong et Tokyo. Il est titulaire d’une maîtrise d’économétrie, d’un DEA de conjoncture et politique économique et diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris.

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