Bruno Le Maire a dévoilé hier son projet de réforme de l’épargne. La fiscalité de l’assurance-vie ne devrait pas être touchée, mais l’épargne-retraite devrait être encouragée par la possibilité de sortie en capital…Cette vieille revendication risque de dynamiser des produits majoritairement bancaires, au détriment des placements en assurance-vie auprès des assureurs.
Dans le cadre de sa loi PACTE, Bruno Le Maire devrait réformer l’épargne, et tout spécialement l’épargne-retraite. Au vu de la dégradation des comptes du régime vieillesse, on mesure l’enjeu de cette évolution. Tout laisse à penser que, dans les prochaines années, les salariés devront multiplier les « sources » de couverture du risque vieillesse et solliciter largement les régimes supplémentaires.
L’étrange physionomie de l’épargne retraite en France
En l’état, l’assurance-vie reste le placement préféré des Français pour se préparer une retraite supplémentaire. La défiscalisation des plus-values acquises au bout de huit ans de détention, et la possibilité de sortir du contrat en capital en font un outil souple auquel beaucoup de Français font appel pour préparer leurs vieux jours.
On parle de plus de 50 millions de contrats souscrits, avec un en-cours proche des 1.400 milliards d’euros.
Aux côtés de ce produit phare, les encours de l’épargne retraite entreprises (53 milliards) paraissent évidemment microscopiques.
Le serpent de mer du financement de l’économie
Si l’assurance-vie a les faveurs des Français, c’est largement pour sa sécurité. Les épargnants peuvent en effet choisir de placer leurs avoirs en liquidité, ce qui leur évite de mauvaises surprises en cas de tabac sur les marchés boursiers. Ce choix de la sécurité est régulièrement épinglé pour ses conséquences: dans la pratique, les entreprises à la recherche d’investisseurs se voient privées de sommes importantes. Comme à chaque quinquennat, Bruno Le Maire remet donc sur le tapis la question du financement de l’économie qui pourrait s’améliorer par une réforme de l’épargne.
Lors de la phase de consultation, les assureurs ont senti le danger et proposé une simplification des différents dispositifs existantsdans le domaine de l’épargne d’entreprise: le projet Revavie proposait de fusionner dans un produit unique l’article 83, le Perp et le Madelin avec une sortie en rente excluant le Perco.
L’objectif était évidemment de rendre plus lisible le maquis existant aujourd’hui dans ce domaine, sans ouvrir la sortie en capital, qui constitue une sérieuse menace pour l’assurance vie.
Le Maire arbitre en faveur des banques
Le choix final opéré par Bruno Le Maire fait la part belle aux revendications bancaires. Le ministre devrait en effet favoriser la « portabilité » des produits, c’est-à-dire la transformation d’un produit réglementé en un autre produit réglementé. En outre, l’épargne retraite pourrait donner lieu à une sortie en capital.
Pour l’assurance-vie, le danger est flagrant. Et pour les assureurs encore plus. Rien ne devrait s’opposer à un mouvement de transformation des « articles 83 » en plans gérés par des banques et donnant lieu à un versement de capital.
Bruno Le Maire vient d’ouvrir une brèche dans le règne tout puissant de l’assurance vie.
Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog