Réunionnite, courrielite et accessoires : des excès qui coûtent cher

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Par Jacques Martineau Publié le 17 mai 2015 à 5h00
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Savoir communiquer, informer, écouter et échanger sont les données de base de la réussite dans un environnement concurrentiel où la compétitivité reste une priorité. Par définition, c’est un besoin.

Il existe aujourd’hui une kyrielle d’outils, de mécanismes structurels et conjoncturels qui sont sensés faciliter cette relation à l’autre dans des contextes très différents. L’Entreprise, dans son acception la plus large, n’échappe pas à la maîtrise de ces choix. C’et sa vie, qui en dépend. Le problème qui se pose est simple : quelle est la part d’excès, de gâchis en terme de temps perdu et peut-on en évaluer le coût ?

La réunionnite tient encore sa place et de loin

Le monde du travail et des affaires justifie cette croissance démesurée du nombre de réunions pour trois raisons : l’immédiate nécessité d’information réciproque, le besoin de coordination entre les activités de plus en plus interdépendantes, enfin le développement de la participation aux décisions de l’entreprise.

Les réunions dans l’entreprise, publique ou privée, administration et vie politique incluse, occupent dans l’emploi du temps de chacun une place qui frise le ridicule. À tel point que les responsables qui ne savent pas déléguer, c’est-à-dire la plus grande majorité d’entre eux, ont les pires difficultés à suivre ce rythme absurde. Qu’il s’agisse aussi du « conseil de… », du « comité de… », ou de la « commission du… », les exemples ne manquent pas. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication n’ont rien amélioré. Cette addiction à la réunion sévit partout, à des degrés divers du plus petit microcosme au plus grand ensemble. Entités publiques et privées se retrouvent sur ce terrain. ??

Si l’excès comme toujours est condamnable et ses effets pervers, ce moyen de communication entre individus est un outil de fonctionnement quasi-indispensable dont le manager doit connaître et maîtriser le mode d’emploi. C’est cette boulimie de réunions que l’on qualifie de réunionnite.

Internet et la gestion des courriels

Avec Internet, le courriel a pris une ampleur extraordinaire dans la vie des affaires. Tous les acteurs administratifs, financiers, économiques et sociaux, sont désormais quasi dépendants du courrier électronique. Quel que soit le niveau dans l’unité, sa nature et sa taille, TPE, PE, ME, GE ou TGE, artisanats ou commerces, comme professions libérales, le « virus » est partout. La valeur ajoutée est incontestable. Les gains de temps, alliés aux réductions des coûts peuvent se chiffrer. Les excès le sont tout autant. D’aucuns sauront vous le montrer.

Une nouvelle maladie est née avec cette addiction au courriel. Indépendamment des dizaines de courriels, hors sujet, « spam ou autre », reçus au quotidien, pour ne pas dire plus, qu’il faut trier, rejeter ou classer, d’autres dizaines concernent le « boulot ». Après un certain nombre à caractère informatif dont plus des 2/3 sont des redites ou inutiles, il y a ceux qui vont mobiliser toute l’attention, qui ne peuvent rester sans suite et auxquels il faut répondre, sachant faire la différence entre « priorité » et « urgence ».

Dans une entreprise de taille moyenne, on estime aujourd’hui à l’équivalent d’une demi-journée par semaine de travail par personne concernée qui est consacrée essentiellement à ces tris sélectifs dont plus de la moitié est de la perte de temps. Il va de soi que le temps voué aux réponses correspondantes fait partie du travail. Ceci exclut tous les écarts d’initiative individuelle pour aller « se promener » sur Internet. L’abus dans ce sens, ajouté à la présence permanente sur le courrier électronique s’apparente à une forme d’addiction qualifiée de courrielite.

Et si on parlait des accessoires

Parmi toutes les capacités de communication, on peut citer dans la série des contacts à l’autre, les entretiens, les rencontres, les visites et les réunions structurelles, formelles ou improvisées. Avec les progrès en la matière, cette communication a pris des formes totalement différentes. Le contact peut se faire grâce au téléphone ou en vidéo et téléconférence. Skipe, Hangouts, Facebook, Messenger et Twitter, entre autres, ont changé la relation à l’autre pour ne citer que ces systèmes et réseaux. Le virtuel dans la forme n’exclut pas le réel du contenu. Les médias se délectent dès lors que l’information a un caractère public.

Le « smartphone » avec ses attributs est évidemment très précieux. L’utilisation au travail, à titre professionnel ou privé, est reconnue. L’usage d’un mobile « professionnel » ne se comprend qu’en termes de coûts. Le contrôle (au sens intelligent) est impossible. Il dépend en priorité de la personne qui l’utilise. Mais cela peut être dérangeant avec les abus qu’il engendre. Facebook et Twitter occupent la place publique. Les médias s’en gargarisent. La gestion des messages et des « texto » si elle n’est pas instantanée, elle n’est pas sans conséquence. En entreprise, le téléphone portable est considéré comme un outil indispensable.

Près de 20% de temps perdu en termes de coût pour tous ces excès ! Rajoutez à cela les redites, les repas superflus et les déplacements laborieux inutiles, nuits d’hôtel, etc… on peut presque doubler en nombre de journées de travail perdues l’évaluation précédente. À titre d’ordre de grandeur, au delà du temps utile des réunions, des courriels et des « texto » indispensables pour leur objet on estime à près de 20% pour les dirigeants, les cadres, les techniciens et les gestionnaires, la perte effective de temps de travail annuel ! Ce gâchis qui a un coût direct, s’il caractérise surtout les grands ensembles, publics et privés, atteint désormais de plus en plus les petites et moyennes entreprises. Ce qui peut devenir encore plus inquiétant dans les années à venir. ?

Et pourtant, loin des automatismes, pour l’essentiel qui nécessite « consultation » ou « concertation », un simple échange de courriels quel qu’en fut la qualité n’est pas suffisant. La rencontre, le face-à-face, la réunion sont des outils indispensables qui actent les décisions, permettent de mieux les comprendre voire de s’y opposer. La relation interpersonnelle est affectée. En un mot, on ne replace pas la réunion. Mais encore faut-il en comprendre le sens ?

Alors avant de résumer la problématique uniquement à la lourdeur des charges patronales et du coût du travail, un effort de conduite, de prise de responsabilité individuelle et de management est indispensable en termes de réduction de la perte de temps pour pouvoir retrouver cette compétitivité dont la France a tellement besoin en cette période de crise… ?

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Après un long parcours scientifique, en France et outre-Atlantique, Jacques Martineau occupe de multiples responsabilités opérationnelles au CEA/DAM. Il devient DRH dans un grand groupe informatique pendant 3 ans, avant de prendre ensuite la tête d'un organisme important de rapprochement recherche-entreprise en liaison avec le CNRS, le CEA et des grands groupes du secteur privé. Fondateur du Club Espace 21, il s'est intéressé aux problèmes de l'emploi avec différents entrepreneurs, industriels, syndicalistes et hommes politiques au plus haut niveau sur la libération de l'accès à l'activité pour tous. Il reçoit les insignes de chevalier de l'Ordre National du Mérite et pour l'ensemble de sa carrière, le ministère de la recherche le fera chevalier de la Légion d'Honneur.

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