UMP : tripatouillages anti-démocratiques

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Par Thierry Le Gueut Modifié le 19 novembre 2012 à 14h20

Disons le tout de suite, afin qu’il n’y ait pas d’ambigüité. Ma sympathie pour l’UMP est assez limitée. Pour autant, même si la différence sur les projets des 2 protagonistes ne me paraissait pas très évidente au delà des coups de menton de l’un, et de la posture orléaniste de l’autre, le simple fait d’appeler aux urnes les orphelins du sarkozisme me paraissait une légitime et réelle avancée démocratique, dans une famille politique au tempérament bonapartiste, alliant culte du chef et défense intransigeante des avantages acquis…

Que l’UMP, étrange alliance de la carpe centriste et du lapin gaulliste-ou de ce qu’il en reste- recoure au suffrage des militants, balançant aux orties recours à l’homme providentiel et petit pronunciamento entre amis m’avait, je dois le reconnaitre, dérouté. Foin des élections brejneviennes à 96 ou 85 pour cent de Nicolas Chirac ou de Jacques Sarkozy, un peu de débat ne faisait pas de mal dans ce monde de… de je sais pas quoi d’ailleurs. On allait voir ce qu’on allait voir. « Plus légaliste que moi, tu meurs », ringardisant ainsi le fameux congrès de Reims du Parti Socialiste ou fut tant vilipendée la « victoire » de Martine Aubry sur Ségolène Royal, sans oublier l’inoubliable Congrès de Rennes du susdit parti.

Patatras. Quelques traficotages à Nice alliés à quelques magouilles dans le très risqué 16° arrondissement de Paris allaient commencer à mettre à bas le bel ouvrage que les réquisitions préventives d’huissiers avaient déjà commencé à ébranler. Et ensuite, de trucages en fausses signatures et procurations vierges, tout s’est écroulé comme un château de cartes… Comme disait le regretté Georges Marchais « L’union est un combat » et là, pour le coup, on est servis.

Au-delà de l’accident industriel qui permettra sans nul doute au Front National, avec quelque raison, de considérer que l’élection démocratique de sa présidente fut finalement la seule qui se soit bien passée, ce qui ne manque pas de sel, on reste pantois devant tant d’amateurismes, voulu ou subi. Amateurismes au pluriel, soulignons le. Bien sur, l’amateurisme de l’organisation de ce scrutin. 650 bureaux de vote pour 300 000 électeurs potentiels, ce n’était guère raisonnable comme les 3 heures de queue pour départager les soupirants ne l’étaient guère plus. Et on admirera plus le professionnalisme des assesseurs, à la foi bien ancrée, pour se taper ce pensum, que celui des organisateurs sans doute trop préoccupés pour faire voter 1198 électeurs dans un bureau ou il n’y a que 598 inscrits.

Amateurisme des dirigeants, si on peut appeler ça comme ça, vu la dérive du navire censé être piloté. Annoncer à 23H30 ou 23H 45, sa victoire promise, alors que certains bureaux ne sont pas dépouillés ou que seuls 50% des procès verbaux ont été retournés au commissariat des opérations de vote tient tout de même d’un prodige qu’à part le défunt Kim Jong il, seule la grande démocratie américaine s’était permise dans l’Etat de Floride pour l’élection de notre vénéré Georges Bush.

Amateurisme des commentateurs et des sondagiers de toute sorte. La victoire de l’ancien premier collaborateur que Nicolas Sarkozy a donné à la France était annoncée comme large, inéluctable, quasi triomphante sur la foi de sondages qui n’avaient qu’un problème . Ils ne connaissaient rien de l’échantillon… Une paille. Et même si ça a tripatouillé des 2 cotés un peu plus qu’à Henin Beaumont, on peut au moins reconnaitre que Jean François Copé a tout à fait le droit d’être rigolard aujourd’hui, qu’il soit élu ou pas. Il conviendra tout de même, soit dit en passant, de se pencher un peu, un jour sur ces oracles de la prévision, aux ficelles un peu trop grosses pour être tout à fait honnêtes et qui polluent le seul vrai débat démocratique, celui de l’expression libre des citoyens (et ici, des militants) , oracles constamment démentis par la réalité, alimentant sans vergogne les débats médiatiques et les petites musiques de fond.

Soyons clair. Les militants de l’UMP doivent, aujourd’hui se sentir légitimement floués du comportement de ceux qui sont censés les représenter. Quelle que soit la cause, on doit toujours respecter les militants, qui donnent leur temps, leur passion et accessoirement leur argent pour ce qu’ils croient bons pour leur pays, pour leur Nation. Bien loin des « sympathisants » qui volent au secours de la victoire, une fois celle-ci acquise, un militant de parti politique, ou d’une association s’investit dans une cause commune sur laquelle il a légitimement un droit de regard. Et dans le cas présent, le regard est bafoué.

Quant à la Démocratie, n’en parlons même pas… Ou plutôt, parlons en. Que ceux là même qui n’ont que la démocratie en bandoulière, à vouloir en imposer le modèle aux 4 coins du monde, ne parviennent pas à la faire vivre dans les Alpes Maritimes ou dans les Bouches du Rhone, et en viennent à en violer le principe de base qui est le respect du suffrage, laisse un sale gout amer. Oh, bien sur, demain, il y aura un vainqueur, un arrangement qu’on présentera comme une sortie par le haut, ou un 3° larron réconciliateur des fractures, ou on ne sait quelle entreprise pour transformer un Waterloo en Austerlitz. La musique est connue d’avance. Mais le mal, plus profond que l’on pense concernant la première formation politique d’opposition, est fait. Et laissera des traces. Et pas que dans ce parti.

La démocratie représentative est censée représenter. Et éviter ce démon du « populisme » qu’on nous prie de condamner des que le peuple commence à s’exprimer. On ne saurait donc que trop conseiller à nos « élites » actuelles de ne pas trop tirer sur la corde. Et de façon purement imagée bien sur, de rendre une vie nouvelle à cette fameuse 5° strophe (paraphrasée) de l’Internationale « S’ ils s’obstinent ces dirigeants à faire des nous des zéros, ils sauront que nos balles seront pour nos propres généraux »….

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Thierry Le Gueut, vieux routier des médias (20 ans notamment au journal Le Monde) a été dans le civil dirigeant d'un club amateur pendant 17 ans, et est supporter de l'AS Saint Etienne et du Football Club de Rouen.

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