Droits humains en entreprise : l’Europe dans le collimateur des ONG

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Par Michel Delapierre Modifié le 14 octobre 2019 à 18h38
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Si les principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme ont été adoptés par les Nations-Unies le 16 juin 2011, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour protéger les droits humains. L’Union Européenne pourrait jouer un rôle fondamental dans l’avancée des textes législatifs mais les décisions tardent à être prises, s’inquiètent les ONG.

Les ONG montent au créneau pour faire pression sur l'UE

« Nous devons choisir entre un marché global dirigé par le calcul de profits à courts termes et un marché global à visage humain » déclarait Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU, en 1999 à Davos. Vingt après, Le choix reste à faire. Dans un rapport publié en septembre, Amnesty International estimait que « L'Union européenne et ses Etats membres n'en font pas assez pour soutenir et protéger les défenseurs des droits de l'Homme soumis à des menaces et des attaques de plus en plus fréquentes à travers le monde ». Ce rapport s’ajoute à la lettre envoyée en début d’année par huit ONG au premier ministre finlandais dans laquelle elles appellent à « mettre en place un agenda au niveau européen pour la mise en œuvre des principes des Nations-Unies sur les droits de l’homme en entreprise ». Le courrier soulignait le caractère urgent de la situation en précisant qu’en 2017, « 300 défenseurs des Droits de l’Homme ont été assassinés dans le monde, la majorité de ces victimes ayant été tuées alors qu’elles protégeaient leurs terres et ses communautés de méga projets d’affaires ».

Depuis 2015, 2000 meurtres, passages et tabac et autres formes d’intimidation à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme travaillant sur les questions liées aux entreprises ont été recensés par le Business and Human Rights Resource Center.

La présidence de l’Union Européenne par le premier ministre finlandais en juillet dernier laissait espérer l’opportunité d’une prise en compte sérieuse de la situation et la rédaction rapide de textes visant à protéger les droits humains en entreprise. En juin, le nouveau gouvernement finlandais s'était engagé à rendre obligatoire la législation en matière de droits de l’Homme aux niveaux national et européen. La Finlande est l’un des premiers pays à avoir instauré un plan d’action national à ce sujet, porté par un fort mouvement de groupes issus de la société civile, de syndicats et de sociétés appelant à une loi de diligence raisonnable en matière de droits de l'homme.

D’autre part, de nombreux signaux ont montré l’intérêt croissant des Européens à ce sujet. Les Allemands ont lancé une campagne pour une législation sur les droits de l’homme et la diligence raisonnable en matière d’environnement et prévoit, d’ici 2020, la mise en place d’une loi si moins de 50% des entreprises allemandes mettent en œuvre des vérifications nécessaires concernant les droits de l’Homme. En Hollande, une loi oblige les entreprises à déterminer l’existence ou non du travail des enfants dans leur chaîne d’approvisionnement. La Suisse, le Luxembourg, l’Autriche étudient des propositions législatives pour examiner l'introduction de telles lois. La France n’est pas en reste puisqu’elle a été le premier pays à adopter, en 2017, sa loi sur le devoir de vigilance.

Besoin d'une législation contraignante

Mais ces obligations sont des solutions au coup-par-coup, s’exaspèrent les ONG, favorables à une harmonisation. Et les normes internationales relatives au respect des droits de l’Homme n’ont qu’une force non contraignante. Il y a donc encore du pain sur la planche pour le premier ministre finlandais et seulement trois mois avant de passer le relais de la présidence de l’Union Européenne à la Croatie.

En attendant, le Conseil européen a réaffirmé le 7 octobre son engagement en faveur de l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). Sur le site de la Présidence finlandaise du Conseil de l’Union Europénne, Maria Guseff, conseillère législative principale et Jenna Oja de la Représentation permanente de Finlande auprès de l'UE à Bruxelles, se sont réjouis de cet engagement : « L'adhésion de l'UE garantira une protection solide et cohérente des droits fondamentaux dans toute l'Europe. Grâce à cette adhésion, tout individu et toute entreprise pourra faire appel à la Cour européenne des droits de l'homme pour demander le réexamen des actes des institutions européennes. En même temps, elle réaffirme l'engagement de l'UE dans les valeurs communes, la démocratie et l'État de droit. Le respect des droits de l'homme, de l'État de droit et des principes de la démocratie au niveau national est également essentiel pour renforcer la coopération multilatérale fondée sur des règles ».

Cela suffira-t-il à convaincre les ONG ? On peut en douter.

Nota bene : une conférence sur le droit humain en entreprise organisée par l’Union des Entreprises Luxembourgeoises (UEL) et l’Institut National pour le Développement Durable et la Responsabilité sociales des entreprises (INDR), en partenariat avec le Ministère luxembourgeois des Affaires étrangères et européennes, se tiendra le 22 octobre à la chambre de Commerce, Luxembourg-Kirchberg.


 
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