Amusant! il paraît que, pour éviter aux ouvriers d’Alstom à Belfort de déménager dans une usine alsacienne (soit moins de deux kilomètres), l’Etat va commander 16 rames de TGV à 500 millions d’euros entièrement inutiles (puisqu’elles ne rouleront pas sur une ligne à grande vitesse) et totalement payées par le contribuable (comme je l’avais annoncé, d’ailleurs). Et voici les fournisseurs de la SNCF sauvés par une cotisation obligatoire imposée aux clients du transporteur! Elle est pas belle la vie?
Une solution inventée par les eurolatres
Qui a concocté cette décision totalement suicidaire pour l’économie française? Le groupe des eurolatres qui colonisent le pouvoir en nous expliquant jour après jour qu’il n’existe pas d’alternative à l’Europe, que l’Europe, c’est la prospérité, et que l’avenir de la France passe forcément par l’Europe.
Rien n’est plus amusant que cette homélie quotidienne en faveur du nouveau dieu européen qui pourvoit à tout, de notre naissance à notre mort, et qui compose notre horizon indépassable. Mais aucun des eurolatres ne prend soin de préciser que l’ensemble des problèmes rencontrés par Alstom aujourd’hui tient essentiellement aux procédures d’achat public imposées par cette fameuse européenne dont on nous dit tant de bien.
L’Europe a tué Alstom
Rappelons ici que l’idée de fermer Alstom à Belfort est venue immédiatement après les résultats d’un appel d’offres européen lancé par Akiem, une filiale de la SNCF, qui a préféré des locomotives allemandes aux locomotives françaises. C’est le jeu du marché unique européen, que nos eurolatres passent savamment sous silence: tout achat public au-delà d’un certain montant doit faire l’objet d’un appel d’offres européen transparent.
Et voilà comment la religion de la construction communautaire entre en conflit avec la religion du « il faut sauver l’emploi en France ».
Au demeurant, on attend avec impatience que tous ces grands défenseurs de l’Europe, du peuple européen, de la conscience européenne, viennent expliquer aux ouvriers d’Alstom (et à l’opinion publique française) que, si l’on ferme leur usine, c’est parce qu’une autre usine du peuple européen a remporté le marché. Et qu’il faut donc se réjouir, nous qui sommes européens, de cette procédure qui conduit à produire dans l’entité européenne appelée Allemagne ce qu’on produisait avant dans l’entité européenne appelée France.
L’Europe attaquera-t-elle la solution Valls?
Au passage, Valls et consors, qui vont nous ressortir un grand poème jaculatoire sur les bienfaits de l’Europe, devront rapidement justifier auprès de la Commission Européenne que l’Etat français vient, en dehors de toute procédure réglementaire, de procéder à un achat de 500 millions d’euros. Ce genre de commande, répétons-le, suppose un appel d’offres européen.
Incontestablement, la France vient de violer les traités en accordant une aide d’Etat à Alstom. La ficelle est tellement grosse qu’elle ne devrait d’ailleurs pas durer longtemps, et qu’elle relève d’un amateurisme politique confondant.
Oser expliquer l’Europe
On peut penser ce qu’on veut du droit communautaire et de tout le tra-la-la qui l’entoure, l’attitude duplice du gouvernement français n’en reste pas moins confondante.
Dans une démocratie normale, un gouvernement qui prétend relancer l’Europe après les Brexit devrait expliquer aux syndicats français que la construction communautaire n’autorise plus la préférence nationale dans les commandes publiques. Et il devrait assumer son choix europhile devant l’opinion publique. Cette franchise éclairerait les Français sur ce que signifie réellement être européen aujourd’hui.
Si le gouvernement français continue à pratiquer la préférence nationale dans ses commandes, il prouve ainsi qu’il n’assume pas ses engagements européens, et il doit l’expliquer clairement.
Face à cette exigence de transparence, nos élus, une fois de plus, préfèrent mentir et ménager la chèvre et le chou. Et on s’étonne, après, du discrédit qui frappe la politique.
Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog