A quoi vont servir les directeurs informatiques ?

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Par Ludovic Grangeon Publié le 27 avril 2020 à 6h38
Informatique Quantique Union Europeenne
A quoi vont servir les directeurs informatiques ? - © Economie Matin
52%52% des emplois dans l'informatique en France se trouvent en région parisienne.

Les crises ont l’avantage de révéler dans l’instant des absurdités qui duraient depuis des années. Il en est ainsi du télétravail. Depuis au moins 20 ans, la facilité du travail à distance revenait régulièrement dans les négociations sociales, et dans les rapports avec les grands groupes.

Il y avait toujours de bonnes raisons pour éluder le problème qui se résumait à « la poule et l’œuf ». La fracture numérique avait bon dos, le temps de présence dans l’entreprise, les rapports hiérarchiques, l’organisation des tâches etc… Tous les prétextes étaient bons. Pourtant un accord national était conclu depuis le 19 jullet 2005 mais ne servait pas à grand chose. Le rapport au Gouvernement du député Morel A L'huissier en 2006 n'a eu que peu de retentissement. La question piétinait depuis 15 ans.

En quelques jours, tous ces prétextes ont volé en éclat. Pour ceux qui le peuvent, le télétravail s’est imposé immédiatement. Là où les informaticiens prédisaient des plans d’investissements colossaux, chaque personne a trouvé sa solution avec une grande efficacité. De nombreuses tâches deviennent plus transparentes. les décisions sont visibles et argumentées. Pour une fois, l’activité informatique est façonnée par son utilisateur, L'informatique est au service de celui qui l'utilise et non l'inverse. Et ça marche beaucoup mieux. On remet en cause les processus, les décisions partisanes, on comprend mieux des circuits qui restaient opaques. On élimine des actions inutiles ou obsolètes.

2 leçons à retenir de l’adoption de crise du télétravail :

Tout d’abord, en termes de réduction des coûts de l’entreprise, le pouvoir des informaticiens est mort. On se rend compte que soit ils complexifient les systèmes pour préserver leur pouvoir et leurs revenus, soit ils sont trop isolés et spécialisés pour façonner des outils conviviaux qui permettent simplement de travailler vite et bien. Les informaticiens ne pourront plus rester organisés en divisions autonomes et distinctes. Les sous-traitants informatiques entrainent des pertes considérables de savoir faire, comme l’a encore récemment démontré la grande panne de la BNP. Cette démonstration existe depuis longtemps à travers le paradoxe de Robert Solow, Prix Nobel d’économie 1987 : "l’informatique est partout sauf dans les gains de productivité". Il existe une grande discordance entre la mesure des investissements informatiques et leur résultat dans les comptes de la Nation. On se souvient du formidable coup de bluff de l’informatique avec le « bug de l’an 2000 » qui a englouti des milliards d’investissements dans ce qui semblerait un énorme gag au moindre collégien, avec un téléphone portable, seulement 20 ans plus tard. La valeur ajoutée de l'informatique vire peu à peu du développement de production à la connectique d'entreprise, à la mise à disposition d'outils conviviaux et intuitifs, ainsi qu'au fonctionnement des réseaux.

Deuxième enseignement :la crise Covid explique mieux les péripéties structurelles vécues depuis plusieurs années par la profession informatique. Le Syntec décrit les grandes difficultés de recrutement du secteur, les fuites importantes vers l’étranger, les disparités de salaires de 1 à 10 entre Paris et Seattle, par exemple. Loin de la spécialisation ou de la technicité, les succès informatiques viennent réellement de leur capacité à totalement se fusionner dans l’entreprise, et non d’y créer un carré réservé. La résolution du paradoxe de Solow est dans la fusion totale de l’informatique dans les activités de l’entreprise. Le Syntec nous apprend que la profession comprend environ 600 000 emplois et près de 2500 entreprises dont il représente 80%. La concentration de la moitié de ces emplois (52%) en région parisienne accentue encore cette fameuse fracture entre Paris et les régions qui nuit tant aux activités du pays et contribue aux tensions sociales. Pourrait-on imaginer aujourd’hui qu’il y ait une direction des lavabos ou une direction des interrupteurs dans une entreprise ? Il en est de même de l'informatique.

Conclusion : le télétravail Covid nous apprend que de nombreuses tâches imposées dans le travail étaient en fait injustifiées, inadaptées ou même inutiles. « Plus jamais comme avant », la crise Covid risque d’apporter de grands gains de simplification et d’efficacité à de nombreuses structures.

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Ludovic Grangeon a été partenaire de plusieurs réseaux d’expertise en management et innovation sociale de l'entreprise. Il milite à présent pour le développement local et l’équilibre des territoires au sein de différentes associations. Il a créé en grande école et auprès des universités  plusieurs axes d’étude, de recherche et d’action dans le domaine de l’économie sociale, de la stratégie d’entreprise et des nouvelles technologies. Il a également été chef de mission et président de groupe de travail de normalisation au sein du comité stratégique national Afnor management et services. Il a participé régulièrement aux Journées nationales de l’Economie, intervenant et animateur. Son activité professionnelle a été exercée dans l'aménagement du territoire, les collectivités locales, en France et auprès de gouvernements étrangers, à la Caisse des Dépôts et Consignations, dans le capital risque, l’énergie, les systèmes d’information, la protection sociale et la retraite.

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