La détention d’une action, la clé de compréhension d’une entreprise ?

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Par Guillaume Rouvier Publié le 17 novembre 2018 à 6h31
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@shutter - © Economie Matin

La loi PACTE, actuellement en discussion au Parlement, comporte un volet financement dont l’objectif est d’orienter une partie plus conséquente de l’épargne des français vers le financement de l’appareil productif.

Plusieurs modifications seront mises en œuvre notamment au sein des PEA PME et des assurances vie mais le gros du travail portera sur l’épargne retraite. Cet ensemble de mesures sera-t-il suffisant ? Rien n’est moins sûr !

Les incitations fiscales, mesures pertinentes ?

L’objectif est de donner aux entreprises davantage de capital pour se développer. Faut-il pour cela recourir à des incitations fiscales sur l’épargne ? Le capital circule librement sur presque toute la planète : il est disponible en abondance et se dirige vers les placements les plus rémunérateurs.

Si les entreprises françaises offrent de bonnes perspectives financières, il n’y a pas de doute qu’elles trouveront les financements nécessaires à leur développement, qu’il y ait ou pas une loi PACTE.

La réponse la plus efficace au problème de financement est donc de rendre les entreprises françaises plus attractives : la réduction de leurs charges fiscales et des contraintes administratives est la réponse la plus efficace. Le gouvernement s’engage dans ces deux voies, mais à pas comptés.

Une efficacité moindre due à une orientation vers les obligations et non vers les actions

L’instrument privilégié de cette loi devrait être l’épargne retraite, qui représente déjà un encours global conséquent de 220 milliards d’euros.

L’idée est intéressante car le propre de cette épargne est d’être à long terme. Or, d’une part les entreprises ont besoin d’épargne longue et d’autre part les épargnants doivent envisager un placement à long terme lorsqu’ils investissent en actions.

En effet, la bourse est par nature volatile : c’est la contrepartie de la cotation, c’est-à-dire de la liquidité. La volatilité annuelle moyenne des grands marchés boursiers est d’environ 20% par an, soit plus du double de leur tendance haussière à long terme (8 à 10%). D’où l’importance d’être attentif, même si la tendance haussière est favorable à long terme, à court terme, elle peut entraîner une perte conséquente d’argent.

Les Français sont par nature prudents, conservateurs, surtout lorsqu’ils épargnent. Ils craignent de perdre de l’argent avec les actions, et ils pensent que la volatilité est un risque alors qu’il s’agit d’un comportement.

Un exemple s’impose : si vous montez sur un bateau à voile pour traverser l’Atlantique, dès qu’il sera sorti du port, le bateau va tanguer ; cela ne signifie pas qu’il va couler, mais que son comportement naturel est de prendre le vent et de tanguer. Au mieux cela est inconfortable, au pire cela effraie. Ce comportement amène la plupart des gens à préférer un grand transatlantique, qui ne va pas tanguer mais qui, lui, peut couler comme le Titanic.

L’histoire financière nous enseigne que les désastres financiers sont obligataires : assignats français à la fin du 18ème siècle, emprunts russes en 1917, obligations allemandes en 1922, emprunts grecs en 2012. La bourse, elle, renaît toujours, même des crises les plus sévères.

Le gouvernement, s’il veut inciter les Français à investir en action, c’est-à-dire dans ce que l’on appelle l’appareil productif, l’incitation doit se faire dans une démarche d’investissement « long terme ».

L’idée de partir de l’épargne retraite était une idée salutaire, mais celle-ci devrait comporter un investissement en actions minimum en pourcentage de l’épargne. C’est ce qui est très judicieusement imposé dans un PEA.

Or, les mesures phares de la loi PACTE sur l’épargne retraite, la déduction de l’impôt sur le revenu des apports volontaires, la tranférabilité des produits et la possibilité accrue de sortie en capital, ne vont pas dans ce sens.

L'engagement dans un renouveau economique passera nécessairement par un renouveau entrepreneurial

De la même manière que l’investissement en immobilier locatif devrait être fiscalement privilégié par rapport à l’investissement en résidence principale, l’investissement en actions à long terme devrait être fiscalement privilégié par rapport à l’investissement en obligations. Des mesures simples peuvent être prises : déplafonner le PEA, imposer un minimum d’investissement dans les actions d’entreprises de l’Union européenne pour bénéficeir des avantages fiscaux de l’assurance-vie ou de l’épargne retraite, réduire la fiscalité des dividendes, des plus-values….

Il y aurait un autre avantage, immatériel, à cette nouvelle orientation de notre fiscalité : détenir une action apprend à comprendre l’entreprise, ses défis, ce qu’elle apporte comme fruits et ce qu’elle coûte comme efforts.

Renforcer l’esprit d’entreprise en France, notamment par l’investissement en actions, doit devenir aujourd’hui une cause nationale.

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Elève de l’IEP de Paris, Guillaume Rouvier a fondé la société de gestion de capitaux « Rouvier & associés » en 1986 et en a assuré le développement et la présidence jusqu’en 2016. Il a ensuite décidé de se lancer avec Marie De Raismes dans une nouvelle expérience, celle d’hiboo.expert, le bureau d’étude financier 2.0 qui repense l’investissement boursier sur le long terme.

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