La France s’enfonce dans une dépression dispendieuse

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Par Simone Wapler Publié le 5 novembre 2014 à 6h18

On croyait le budget tamponné « bon pour accord » par la Commission européenne, cette case cochée 'OK' pour de bon après les ronds de jambe de Michel Sapin et d'Emmanuel Macron à Berlin fin octobre pour « dissiper quelques malentendus ».

Voilà qu'il faudrait déchanter ! On nous cherche des poux dans la tête. Le déficit augmenterait au lieu de diminuer en 2016, il manquerait quelques milliards de recettes par ci ou par là et la croissance a été surestimée : 1% en 2015 et 1,7% en 2016 pour Bercy contre 0,7% en 2015 et 1,5% en 2016 pour la Commission. Mais que fait donc Pierre Moscovici, notre gentil commissaire européen à nous, censé arrondir les angles sur place, à Bruxelles ?

De toutes façons, toutes ces prévisions sont fausses. La Fed, la Banque des règlements internationaux, de plus en plus d'organismes l'admettent. Laissons la parole à un personnage emblématique, Alan Greenspan, ancien gouverneur de la Banque centrale américaine qui, rétrospectivement, doit à peu près savoir de quoi il parle :

« La méthode conventionnelle de prédiction des développements macroéconomiques – la modélisation économétrique, les racines mêmes sur lesquelles se sont développés les travaux de John Maynard Keynes – a échoué là où l'on en avait le plus besoin, au grand dam des économistes. Dans la période qui a précédé la crise financière, le système de prévision sophistiqué de la Federal Reserve n'a pas su prévoir les risques majeurs qui se posaient à l'économie mondiale. Ni le modèle développé par le Fonds Monétaire International qui a conclu à la fin du printemps 2007 que les risques avaient diminué depuis septembre 2006 et que dans l'ensemble l'économie américaine se portait bien (...) tandis qu'ailleurs les signaux étaient encourageants ». (1)

La seule façon d'éviter les mauvaises surprises serait de s'habituer à dépenser ce qu'on a plutôt que ce qu'on espère avoir ou ce qu'on pense mériter. La Commission européenne a tort de nous chercher noise sur le terrain des prévisions. Elle ferait mieux de mettre la pression sur le déficit, les dépenses. Comme disait Hemingway « avant de parler, écoutez. Avant de réagir, réfléchissez. Avant de dépenser, gagnez... ». Pour un gouvernement, vous remplacez « gagnez » par « taxez ». Mais les fonctionnaires de la Commission européenne ne peuvent pas s'inviter en politique, donc ils (sauf notre gentil Moscovici, bien sûr) se contentent de critiquer des prospectives fausses. On ne touche pas au présent, on critique un peu le futur.

De déficit en déficit, les dettes gonflent, le principal ne sera jamais remboursé, les intérêts poseront des problèmes dès que les taux monteront. L'inflation - qui permettrait de ronger la dette et de rembourser en monnaie de singe - n'est plus possible car l'argent ne circule plus et reste bloqué dans l'industrie financière. Sans croissance ni inflation, le merveilleux modèle social français s'effondre. Avant qu'il ne sombre définitivement, il restera la phase ultime de la spoliation qui est en train de s'organiser sous vos yeux. La répression financière va s'intensifier, la faillite, ce sera quand il n'y aura vraiment plus d'argent nulle part, quand l'Allemagne dira « nein ». Êtes-vous préparé ?

(1) fin 2013, magazine Foreign Affairs, Never Saw It Coming

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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