Frappée de plein fouet par la crise économique, l'Espagne enregistre pour la première fois depuis 17 ans une baisse de sa population. Albert Esteve, démographe au Centre d'études démographiques de Barcelone, revient sur ces chiffres rendus publics lundi 22 avril.
Explosion du taux de chômage
Avec un taux de chômage qui atteint les 25%, et qui dépasse les 50% chez les jeunes de moins de 25 ans, trouver un travail en Espagne relève de l'exploit aujourd'hui. Dans ce contexte difficile, les résidents étrangers sont de plus en plus nombreux à quitter la péninsule ibérique en quête de travail et d'avenir meilleur.
D'après les chiffres de l'Institut national des statistiques (INE), la population espagnole qui était de 47,1 millions de personnes en 2012, aurait baissé de 205 788 personnes, dont de nombreux résidents étrangers.
La péninsule ibérique moins attractive
Pour Albert Esteve, démographe au Centre d'études démographiques de Barcelone, cette diminution est liée à la conjoncture économique du pays qui entame sa cinquième année de récession : « En pleine crise économique, les perspectives à court et moyen termes ne sont pas encourageantes », explique-t-il.
« La population espagnole a considérablement augmenté pendant la première décennie des années 2000 : conséquence de l'arrivée massive d'immigrants en Espagne, attirés par la croissance de l'économie espagnole », souligne Albert Esteve. Les immigrés hispanophones, venus pour la plupart travailler dans le secteur économique du bâtiment et des travaux publics (BTP), sont ainsi passés de 3 millions en 2004 à 5,5 millions en 2013. « Mais la crise économique a bouleversé ce cycle économique ainsi que l'immigration », ajoute-t-il.
Ralentissement de l'immigration
Aujourd'hui, on assiste à un ralentissement de l'immigration et à une stabilisation de l'accroissement de la population espagnole, et même à « une diminution de cette population », souligne le démographe.
Entre 2011 et 2013, l'Espagne a enregistré une baisse de 300 000 résidents de nationalité étrangère. Cette diminution comprend les étrangers partis d'Espagne mais également ceux qui ont obtenu la nationalité espagnole.
En quête de travail
Pour Albert Esteve, il est difficile de savoir exactement qui sont ces personnes qui partent : « Il s'agit d'une combinaison de résidents étrangers qui retournent dans leurs pays et de ceux qui s'exilent dans des pays où il y a du travail », explique-t-il, soulignant que les « Espagnols aussi s'exilent, en quête de travail ». « Il y a toujours eu ce flux d'entrée et de sortie du territoire, mais, aujourd'hui, les sorties sont supérieures aux entrées en Espagne ».
Vers une amélioration ?
Selon le quotidien espagnol El Pais, les Equatoriens, les Colombiens et les Roumains sont les plus nombreux à quitter le pays. Et la situation de l'Espagne ne laisse présager aucune amélioration. Selon la Banque d'Espagne, l'économie devrait encore reculer de 1,5% cette année et ne renouera pas avec la croissance avant l'an prochain.