Depuis plus d’un siècle les temps de travail et d’activité n’ont eu de cesse de diminuer sous la pression des syndicats, mais aussi par pure idéologie politique.
Ils ont diminué également au fur et à mesure de l’industrialisation, automatisation, informatisation et maintenant digitalisation, numérisation et même tout dernièrement avec le télétravail pour certaines professions !
Histoire du travail en France depuis 1840
En 1841, la France était gouvernée par le roi Louis Philippe avec un régime parlementaire. Depuis longtemps les enfants travaillaient très jeunes, notamment dans les mines, usines…Une première loi est votée interdisant le travail des enfants de moins de 8 ans dans les entreprises de plus de 20 salariés ! Elle limite aussi à 8 heures par jour la durée pour les 8 à 12 ans et 12 heures jusqu’à 16 ans et interdit le travail de nuit jusqu’à 12 ans. C’est la première loi encadrant le travail en France.
A cette époque, les temps de travail s’échelonnaient entre 84 et 105 heures par semaine.
Il faut attendre 1906, pour qu’arrive une nouvelle loi imposant le repos dominical : repos de 24 heures après 6 jours de travail.
En 1919, c’est la journée de 8 heures qui est votée et la création du premier ministère du travail. Le principe des trois huit est créé : 8 heures de travail, 8 heures de repos, 8 heures de loisirs pour tous les salariés. Cette loi instaure également la durée du travail à 48 heures par semaine.
En 1936, le front populaire instaure la semaine de 40 heures de base et les deux premières semaines de congés pour tous les salariés.
Après 1950, le Salaire Minimum Garanti, 1956, la troisième semaine de congés payés, 1958, la création de l’Assurance Chômage, 1968, forte augmentation du Smig et création de la 4ème semaine de congés, 1982 sous Mitterrand : 39 heures, 5ème semaine de congés payés, retraite passant de 65 à 60 ans, 8 mai remis férié supprimé par Giscard d’Estaing, puis 2000, les 35 heures de Martine Aubry.
Après 2002, la moyenne travaillée des employés et ouvriers est tombée à 35,9 heures par semaine.
En 1950, les salariés horaires Français travaillaient 1952 heures par an, alors qu’en 2019 ils ne faisaient plus que 1451, soit 501 heures en moins.
A cela il faut prendre en compte la durée d’activité sur la durée de vie car en France on démarre plus tard et l’on termine beaucoup plus tôt, surtout avant 2017, passage à 62 ans de départ en retraite, la différence s’est accentuée fortement avec les autres pays.
Ci-dessous deux graphiques représentant :
Les durées de travail hebdomadaires en Europe en 2019.
La durée totale d’activité en heures sur la durée d’une carrière en 2019.
Comparons les temps travaillés dans les différents pays européens et mondiaux
Aux Etats-Unis :
La moyenne travaillée se situe aux alentours de 41 heures par semaine, tout en ne prenant que deux semaines de congés par an, soit 2050 heures par année. En Europe, la moyenne travaillée est de 36,4 heures. En France, nous sommes à 35,9 heures semaine soit 1656 heures par année = 394 heures de moins qu’aux Etats-Unis ! A cela il faut ajouter un nombre important de congés spéciaux : mariage, mariage des enfants, naissance-enfant, décès-proches, décès-enfant, arrivé enfant handicapé, jour annuel, congés maternité…Même s’ils sont rémunérés, ils font chuter la productivité : des jours payés non travaillés qui font augmenter les charges et diminuer les marges entreprises. Autre conséquence, les avantages sociaux étant élevés en Europe et encore plus en France, les taux de prélèvements sont nettement plus élevés notamment pour la santé : les retenues sur salaire dépassent les 22% pour les salariés auquel il faut ajouter la mutuelle. A titre indicatif ce taux était à moins de 7% avant 1970 !
Les charges sociales entreprises sont également plus élevées que les autres pays ce qui n’arrangent pas leur marge ! 10% de plus pour la France que l’Allemagne !
Nota : La très importante dette américaine est en grande partie due à son hégémonie mondiale, guerres, armements, implantations de troupes et non à ses temps travaillés supérieurs à tous ceux d’Europe.
Cette différence d’intensité du travail a donné lieu à un débat animé sur ses causes. Les explications concurrentes incluent des taux marginaux d’imposition relativement élevés en Europe, un goût plus marqué des Européens pour les loisirs (Blanchard : une réglementation du temps de travail plus rigoureuse et un pouvoir syndical plus puissant en Europe ayant pour effet, selon les points de vue, de restreindre l’offre de travail ou d’atténuer les défaillances du marché).
L’écart du nombre annuel d’heures de travail entre les États-Unis et l’Europe est dû à un temps de travail hebdomadaire plus faible (surtout pour les femmes), à une année de travail plus courte en Europe et une durée d’activité sur la durée de vie nettement inférieure en France.
Le PIB par habitant plus élevé aux États-Unis qu’en Europe s’explique davantage par le nombre moyen d’heures travaillées que par les différences de taux d’emploi des deux côtés de l’Atlantique. Les raisons pour lesquelles les taux d’emploi en Europe sont inférieurs à ceux observés aux États-Unis et dans d’autres pays non européens membres de l’OCDE ont été largement étudiées (OCDE, 2017 ; Bassanini et Duval, 2017). Pour permettre une meilleure évaluation de l’impact des politiques sur l’utilisation totale de la main-d’œuvre, le présent chapitre complète ces études en examinant les déterminants du temps de travail moyen par salarié, et notamment l’effet que les facteurs qui influent sur les taux d’emploi peuvent également avoir sur le nombre d’heures travaillées.
Autres effets négatifs, une réglementation du travail très contraignante en France y compris dans d’autres pays européens, limite fortement les possibilités d’heures travaillées et surtout un coût du travail trop élevé dû aux avantages sociaux qui n’ont pas arrêtés au fil des années d’augmenter. Suite aux baisses successives des temps de travail et d’activités les gouvernements n’ont jamais trouvé d’autres solutions que d’augmenter la pression fiscale directe sur le travail : salariés et entreprises et indirectement sur la société et les consommateurs.
En ce qui concerne, les trois classements ci-dessous, la France est au dessus pour ces trois critères, mais c’est sur l’impôt propriété que nous dépassons nettement les autres en étant plus du double que la moyenne de l’U.E à 27 !
Taux d’Impôts consommation | Taux implicite sur le travail | Impôts propriété en % PIB | |
Allemagne | 16,2 | 38,6 | 1,1 |
Belgique | 18,0 | 41,2 | 3,3 |
Danemark | 25,0 | 34,6 | 0,8 |
Espagne | 13,8 | 34,2 | 2,6 |
Finlande | 22,5 | 39,2 | 1,5 |
France | 17,9 | 40,9 | 4,6 |
Italie | 15,7 | 42,7 | 2,4 |
Pays-Bas | 19,0 | 33,2 | 1,7 |
Suède | 21,2 | 39,6 | 1,1 |
Moyenne U.E. | 17,3 | 38,2 | 2,2 |
Déficit et dette des 27 pays européens en 2019
Seize pays dégageaient des résultats positifs : Danemark 3,7%, Luxembourg 2,2%, Bulgarie 2,1%, Pays-Bas et Chypre 1,7%, Grèce 1,5%, Allemagne 1,4%, Autriche 0,7%, Malte, Slovénie et Suède 0,5%, Irlande et Croatie 0,4%, Tchéquie et Lituanie 0,3%, Portugal et Estonie 0,10%,
Onze pays avaient des Déficits : Chypre - 4,4%, Roumanie -3%, France -2,8%, Hongrie -2,10%, Belgique -1,9%, Espagne -1,8%, Italie -1,6%, Finlande -1,1%, Pologne -1,5%, Slovaquie, -0,68%, Lettonie -0,6%,
U.E : - 0,6%.
En termes de dette, tous les pays en ont.
En 2019, en commençant par les plus endettés dans un ordre décroissant on trouve : Grèce, Italie, Portugal, Chypre, qui, avant le Covid, dépassaient déjà le niveau de leur PIB. Au milieu, France et Belgique frôlaient les 100%. En dessous on trouve : Espagne, Finlande, Allemagne (59,8%), Irlande et sous les 50% : Pologne, Suède, Danemark, Lituanie, Tchéquie, Bulgarie, Luxembourg, Estonie.
Les pays qui vont le mieux en termes de PIB et résultats avec moins de dette sont en général ceux dont les salariés travaillent le plus sur l’ensemble de leur carrière. Mais ayant tous des dettes, il a manqué à tous les pays un nombre suffisant d’heures travaillées (payées) pour n’avoir aucun déficit et dette structurel.
Un exemple l’Allemagne qui était proche de la France en termes de dette, a pris un virage prenant des mesures radicales sur les indemnités chômage, en augmentant ses durées de travail et d’activité, notamment en passant les départs en retraite de 65 à 67 ans et en cours à 68 ans. Elle a réussi ainsi à passer d’un déficit à des comptes positifs depuis plus de 6 ans, en diminuant fortement son endettement de près de 30%.
Pour conclure, il est possible de s’appuyer sur les travaux de Jean-Marc Burniaux et Orsetta Causa qui ont établi que l’utilisation totale de la main d’œuvre avec moins de limites, est un déterminant très important du PIB par habitant. Ils estiment dans « Objectif croissance » que les mesures qui suppriment les obstacles à l’emploi accroîtront le taux d’utilisation de la main d’oeuvre et donc augmenteront le PIB par habitant. Ces mesures sont considérées comme une priorité pour remettre les pays à flot, réduire les déficits, puis retrouver des résultats positifs, ce qui diminuera la dette de chaque pays et surtout augmentera le bien-être global.
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