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Les défauts généralisés sont les seules solutions : l’exemple du Portugal #BESTOF
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Modifié le 16 juillet 2013 à 9h31
On a tous rêvé de l’Europe mais le 25 mars 2012, quand la Grèce a récemment célébré sa journée d’indépendance dans la révolte sociale et dans l’accalmie des marchés financiers des questions se sont de nouveau posées comme par réminiscence perpétuelle. Le Président de la BCE Mario Draghi n’avait-il pas affirmé que le plus mauvais était derrière nous. Cet optimisme est prématuré. Le problème de la dette souveraine est tout simplement en train de changer de curseur pour se diriger vers le Portugal.
Le Portugal est le prochain pays de la liste et il inquiète à juste titre. Les taux d’intérêt à 10 ans en forte hausse avant le second plan de sauvetage grec, ont de nouveau diminué après : les rendements du 10 ans italiens sont passés de 7,2% à 5%. En Espagne, ils sont passés de 6,7% à 5,4%. En Irlande de 9,7% à 6,9%. L’exception a été le Portugal. Les bonds portugais ont dépassé les 11% en moyenne au cours des 4 derniers mois et ont touché plusieurs fois le seuil des 13% pour finir à 14% en mars. Plus que cela, les projections du gouvernement portugais s’établissent à -3,3% pour l’année 2012.
Certes le Portugal a assez d’argent jusqu’en 2013 malgré la hausse brutale des taux et la récession économique mais pour plusieurs raisons il semble que l’on s’achemine tout droit vers un second défaut souverain. Pourquoi ?
1. La dette totale du Portugal est en fait supérieure à celle de la Grèce. Si la Grèce détient essentiellement une dette publique élevée, par contraste, l’Espagne, le Portugal et l’Irlande ont beaucoup d’endettement privé. Alors que la dette gouvernementale du Portugal rapportée au PIB est moins élevée que celle de la Grèce, la dette totale qui inclut l’endettement des sociétés non financières et des ménages est beaucoup plus élevée. Du fait de cette dette privée, les entreprises portugaises vont se mettre à faire défaut. Défauts des entreprises, défaut d’un Etat, il s’agit là du principe des vases communicants. Si les entreprises se mettent à faire défaut, comment expliquer que les finances d’un Etat puissent s’améliorer dans ce contexte ? 2. Comme la Grèce, le Portugal souffre de fraude fiscale et d’un dysfonctionnement bureaucratique colossal. 3. Il faut ajouter à cela le fait que la plupart des emprunts de l’économie portugaise a été financé par des banques espagnoles. Cela crée la possibilité d’un nouvel effet domino ou la faillite possible du Portugal entrainerait un crash en Espagne. 4. Enfin, dernière raison, l’idéologie et le déni de réalité qui consiste à continuer dans un système de ni-Europe, ni-défaut qui nous conduit à des mécanismes de pare-feux insuffisamment dotés. C’est la théorie du puits sans fond.
Bien sûr que la croissance est essentielle : On peut trouver les sources de la croissance dans la théorie OGDG (offre globale, demande globale) : la création - en l’absence de réelles marges de manœuvre de la politique publique - d'un choc d’offre pour faire baisser les prix et augmenter la production des entreprises. Pour cela deux canaux : augmenter les taux de marge des entreprises, la production et les salaires en même temps. Pour limiter les risques inflationnistes sans faire augmenter le chômage, il faut restreindre les négociations salariales avec les syndicats, et remettre à plat le code du travail pour lui apporter plus de flexibilité. Coté demande, les politiques monétaires de la BCE doivent aider la situation portugaise, par le biais d'une politique monétaire certes laxiste, mais non annoncée pour éviter que les anticipations inflationnistes ne dérapent en une spirale infernale, pour le moins à court terme. Enfin, la théorie de la croissance endogène nous dit que priorité doit être faite à l'éducation, la recherche et développement, la réforme globale des institutions.
Malheureusement aujourd’hui, le problème est celui des montants en jeu, les montants colossaux des niveaux d’endettement et le rattrapage sacrificiel en nombre d’années à réaliser pour retrouver ne seraient-ce que les critères de Maastricht (3% de déficit rapporté au PIB, 60% d’endettement). Autant proposer une solution définitive : dans l’immédiat, il est vrai que la généralisation d’un système de décotes pour tous les pays du sud constitue à nos yeux la seule solution viable. Prendre sa perte, accepter le défaut est la seule solution tenable faute de quoi on s’oriente vers une vingtaine d’années d’austérité et de sacrifices. Les désaccords sur cette solution sont bien naturels lorsqu’ils proviennent de ceux qui sont à l’origine de la crise.
Article initialement publié le 01/05/2012