Pour remédier à la crise, il faut changer notre modèle de développement

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Par Bernard Lemoult Publié le 27 septembre 2013 à 2h47

Nous sommes au carrefour d'une mutation profonde de nos sociétés. « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » disait Jacques CHIRAC en 2002 au 4ème sommet de la Terre à Johannesburg. Plus de 10 ans après, le feu s'intensifie, mais il semble désormais qu'un nombre de plus en plus important de citoyens (au moins européens) le regardent et cherchent à l'éteindre, du moins à le circonscrire.

Le constat est aujourd'hui majoritairement partagé, et les nombreux films documentaires sur les différentes crises que traversent nos sociétés y ont largement contribué, de « Une vérité qui dérange » de Davis Guggenheim en 2006, à « Goldman Sachs, la banque qui dirige le monde » de Jérôme Fritel et Marc Roche en 2012, en passant par « Solutions locales pour un désordre global » de Coline Serreau en 2010.

Au-delà de ces constats thématiques, émerge de plus en plus celui d'une crise systémique lié à notre modèle même de développement qui, dans un monde à ressources finies, ne peut être ni viable, ni vivable, ni équitable... pour tous. Certains recherchent encore dans la « croissance » la sortie de crise, alors que nous savons désormais que « la croissance et le PIB nous ont rendu presque aveugle » (Commission présidée par J. E. Stiglitz, 2009). D'autres, en revanche, considèrent que la situation appelle dès maintenant à une mutation profonde de nos sociétés, d'autres encore avancent même un changement de civilisation.

Le temps est désormais à l'action et non plus aux constats

Peu importe les mots, même s'ils ont leur importance de par le sens qu'ils recouvrent, le temps est désormais à l'action et non plus aux constats. C'est en l'occurrence ce que viennent de dire plus de 2 700 personnes qui ont participé aux 86 débats-citoyens réalisés d'octobre 2012 à mars 2013, en région des Pays de la Loire, à l'initiative de la Chaire partenariale développement humain durable & territoires (dhd&t).

Sur la base de ces débats centrés sur la transition énergétique et de plus de 1 500 réponses à un questionnaire individuel post-débat, 9 préconisations principales sont ressorties, centrées sur la vision de société, la gouvernance collaborative et l'engagement des personnes et des organisations.

Après cette première phase de définition collective d'une vision de société en matière d'énergie, se dessinent à ce jour plusieurs pistes d'actions possibles portant sur :
- la formation et la sensibilisation du plus grand nombre aux enjeux individuels et collectifs de la transition énergétique

- des actions de démonstration et d'expérimentation sur quelques pôles du territoire (en urbain et en rural), avec la question du bassin de vie.

Une nouvelle société est en marche, réjouissons-nous !

Qui ne souhaiterait pas vivre dans une société en harmonie entre les humains, en harmonie entre les humains et la nature ? Qui ne voudrait pas d'une alimentation saine, partagée et respectueuse de l'environnement ? Qui ne voudrait pas d'une énergie renouvelable, sans impact sur l'homme et son environnement ? Qui pourrait s'opposer à plus de mesure(s), au sens propre comme au sens figuré,dans le partage des richesses, de solidarité entre les peuples ?...

Cette vision devrait donner envie et non faire peur, elle devrait mobiliser le plus grand nombre et non raidir les comportements individuels, elle devrait libérer les imaginaires et non inhiber les initiatives. Cette vision cependant progresse, l'utopie apparaissant de plus en plus de continuer comme avant, de se réfugier derrière TINA.

Si des doutes s'expriment de plus en plus sur la volonté et/ou la capacité des forces économiques et financières en place, des Etats et de la communauté internationale à apporter des solutions pertinentes à la hauteur des enjeux et dans les temps impartis, le périmètre local, régional, semble beaucoup plus propice à entrer en transition. L'exemple de l'Allemagne avec une régionalisation historique l'illustre bien.

Qu'ils s'agissent d'élus locaux, de salariés-citoyens, de dirigeants d'entreprises, d'habitants, d'associations, d'organisations professionnelles..., la culture de responsabilité et d'engagement sociétal gagne du terrain, et ce beaucoup plus vite qu'on ne le croit. La grande convergence est en marche, elle se fera au rythme et avec les à-coups que nous aurons décidés, mais elle finira par se faire.

Dans cette dynamique de changement, les Pays de la Loire ne sont pas en reste avec les nombreuses initiatives des collectivités territoriales et le dynamisme régional de l'ESS (Economie Sociale et Solidaire), mais aussi avec les Dirigeants responsables de l'ouest d'entreprises engagées, avec les Trophées régionaux du développement durable, avec des formations pour cadres dirigeants telles que le Collège des transitions sociétales, avec la Chaire partenariale développement humain durable & territoires. L'enjeu d'une gouvernance plus ouverte et partagée se fait jour, les expérimentations de transitions émergent également, la nouvelle société est en marche, et elle a toutes les chances d'émerger localement.

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Bernard Lemoult est professeur à l'Ecole des Mines de Nantes, Coordinateur de la recherche action sur la transition énergétique pour la Chaire développement humain durable & territoires.

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