Un mauvais mois de novembre pour la consommation, mais un rebond est attendu pour la suite

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Par Charlotte de Montpellier Modifié le 13 décembre 2022 à 20h38
Revenu Universel Crise Sanitaire
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11%Bercy s'attend à une récession de 11% en France en 2020.

Le confinement du mois de novembre a conduit à un découplage entre production manufacturière et consommation des ménages. Si la production n'a pas été impactée par le deuxième confinement, la consommation des ménages en biens a chuté fortement (-18.9% sur un mois). Le choc de novembre sur la consommation a néanmoins été deux fois moins important que celui d'avril. Grâce à la réouverture des commerces et au rebond de la confiance des ménages, l'activité économique française devrait rebondir en décembre et au premier trimestre 2021, contrairement à d'autres pays européens comme l'Allemagne. Néanmoins, ces perspectives pourraient être revues à la baisse si la détérioration de la situation sanitaire conduisait à de nouvelles restrictions. Nous restons optimistes sur la deuxième partie de 2021 et tablons sur une croissance de l'ordre de 4.5 à 5% pour 2021.

Découplage en novembre

Les données du mois de novembre indiquent que le deuxième confinement en France a conduit à un découplage entre production manufacturière et consommation des ménages.

Ainsi, avec la fermeture des magasins non-essentiels, la consommation de biens par les ménages a très fortement diminué en novembre. La baisse du volume est de 18.9% sur un mois, après une hausse de 3.9% en octobre, notamment en raison d'une forte chute des achats de biens fabriqués (–30.1%) dont principalement les biens d'habillement, mais aussi d'une diminution des dépenses en énergie (–19.2%). En raison de la baisse d'achats de voitures neuves, de meubles et d'électroménagers, la consommation de biens durables a baissé de 24.7% sur un mois. La consommation de biens alimentaires se contracte également (–5.8%), après une forte hausse en octobre qui avait probablement été causée par la préparation des ménages au confinement.

Par rapport à la consommation de biens qui prévalait avant la crise, le recul de novembre est bien moindre que celui observé en avril pendant le premier confinement : -16.2% en novembre contre -32.7% en avril par rapport à la moyenne des dépenses sur les trois derniers mois avant la crise. Le choc de novembre a donc été deux fois moins important que celui d'avril en terme de consommation de biens.

Dans le même temps, la production manufacturière a bien mieux résisté car, contrairement à la situation qui prévalait en avril, les usines n'ont pas été obligées de fermer. La production manufacturière a ainsi augmenté de 0.5% en glissement mensuel en novembre, après une hausse de 0.8% en octobre. La production industrielle a par contre diminué de 0.9% en novembre par rapport à octobre. Cette baisse est principalement causée par une diminution de la production dans les industries extractives, énergie, eau et dans la cokéfaction-raffinage. Enfin, la production du secteur de la construction a augmenté de 3.6% en novembre.

Par rapport au niveau de production qui prévalait avant la crise (février 2020), le niveau de la production manufacturière est 4.2% inférieur, tandis que celui de la production industrielle est 4.1% plus faible en novembre, ce qui n'est pas très différent des niveaux observés en octobre. Lors du confinement d'avril, la production manufacturière avait chuté 37.3% en dessous de son niveau d'avant crise (34.2% pour la production industrielle). In fine, les données de production de novembre nous enseignent qu'il n'y a quasiment pas eu d'impact du deuxième confinement sur le secteur industriel, contrairement à ce qui avait été observé en avril.

Amélioration prévue en décembre

La bonne nouvelle est que la situation devrait s'améliorer en décembre, notamment pour la consommation des ménages. En effet, grâce à la réouverture des commerces et aux perspectives des déconfinement, la confiance des ménages a fortement augmenté en décembre pour retrouver son niveau de septembre. L'indice a gagné 6 points pour atteindre 95. Cette hausse est notamment due à un très fort rebond de la proportion de ménages estimant qu'il est opportun de faire des achats importants. L'indice est revenu à son niveau d'avant crise. La forte hausse de cet indicateur nous permet de croire en un rebond solide de la consommation des ménages en décembre, mais aussi en 2021. En outre, les ménages semblent plus enclins que précédemment à consommer plutôt que constituer de l'épargne de précaution, ce qui devrait renforcer le rebond de la consommation. La part des ménages estimant qu'il est opportun d'épargner baisse ainsi nettement, même si il est encore largement supérieure à son niveau d'avant crise.

Un premier trimestre très incertain

Compte tenu du confinement de novembre, le PIB devrait chuter de 4 à 5% au quatrième trimestre 2020 par rapport au troisième trimestre. C'est donc un nouveau choc majeur, mais bien moindre que celui observé au deuxième trimestre 2020 (-13.8%). Compte tenu de la réouverture des magasins, le mois de décembre devrait déjà marquer un rebond important dans la consommation des ménages, ce qui permettra de commencer 2021 d'un bon pied. Notons que la situation est ici fondamentalement différente en France que dans d'autres pays européens tels que l'Allemagne et les Pays-Bas. Ces pays n'ont pas connu de fermeture des magasins en novembre. Par contre, la fermeture des magasins a été ordonnée aux alentours de Noël et se prolongera en janvier. Ces pays sont donc susceptibles de connaitre de bien meilleures performances économiques que la France au quatrième trimestre, mais de biens pires performances au premier trimestre.

La croissance économique française du premier trimestre dépendra néanmoins, encore une fois, quasiment uniquement de l'évolution de la situation sanitaire. En effet, le gouvernement a indiqué clairement que la situation pandémique était fragile. Le couvre-feu est toujours en vigueur partout dès 20h et dès 18h dans certains départements. Si les magasins non-essentiels sont ouverts en journée, les bars, restaurants ne pourront en tous cas pas rouvrir avant la mi-février. Les remontées mécaniques des stations de ski restent également toujours fermées et un nouveau point sera fait sur le sujet le 20 janvier (juste avant la très cruciale période des vacances de février, qui représentent entre 35% et 50% des revenus annuels des stations de ski).

Nous estimons que, si les magasins et les écoles restent ouvertes, la croissance du PIB devrait être positive au premier trimestre grâce au rebond de la consommation des ménages. Les exportations nettes risquent par contre de peser négativement sur le PIB, notamment en raison des confinements strictes en vigueur dans d'autres pays européens. Le Brexit risque aussi d'avoir un impact négatif, dans la mesure où les entreprises de part et d'autre de la Manche ont effectué beaucoup d'achats pour augmenter les stocks au quatrième trimestre à mesure que la deadline approchait et que les craintes de ne pas avoir d'accord augmentaient. Ces stocks vont désormais devoir baisser avant que les échanges entre la France et le Royaume-Uni puissent reprendre. In fine, nous envisageons une croissance de l'ordre de 1.5% par rapport au quatrième trimestre sous l'hypothèse que les restrictions restent à leur niveau actuel. Un renforcement des mesures restrictives, par exemple via la fermeture des commerces ou celle des écoles, conduirait probablement la croissance du PIB à basculer en-dessous de 0% au premier trimestre.

Une reprise solide prévue en 2021 à partir de la fin du printemps

Pour la suite de l'année, nous restons plutôt positifs. A mesure que la campagne de vaccination avancera, les mesures restrictives devraient être levées en France et en Europe, permettant des réouvertures, un rebond de la consommation des ménages et une augmentation du tourisme. L'utilisation d'une partie de l'épargne accumulée par les ménages pendant les confinements devrait donner un véritable boost à l'activité économique. En outre, en seconde partie d'année, les plans de relance français et européens devraient également avoir un impact positif sur la croissance économique. Nous tablons sur une croissance entre 4.5 et 5% pour l'ensemble de 2021, toujours sous l'hypothèse qu'un troisième confinement ne soit pas mis en place cet hiver. Le reste de la reprise s'effectuera en 2022 et il faudra attendre mi-2023 pour que l'activité économique revienne à son niveau d'avant crise.

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En tant que macroéconomiste chez ING depuis février 2018 dans le département belge de Recherches Économiques, Charlotte de Montpellier travaille à comprendre, analyser et prévoir les évolutions économiques (croissance, inflation, taux, marché du travail, banques centrales...) dans le monde, la zone euro, la France et la Belgique.

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