Quels changements en crédit immobilier au 1er juillet 2016 ?

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Par Laurent Denis Publié le 1 juillet 2016 à 14h08
Credit Immobilier Securite Conseil Professionnels Regles Consommation
cc/pixabay - © Economie Matin
37%Le montant du prêt pour la résidence principale a augmenté de 37 % en cinq ans.

Mutations en vue pour le droit du crédit immobilier. Nouvelles obligations pour les professionnels, signifie donc nouveaux droits pour les emprunteurs. L’ensemble se mettra en oeuvre progressivement, dès le 1er juillet 2016, puis au 1er octobre 2016, au 1er janvier 2017 et le 21 mars 2017.

Les obligations précontractuelles recouvrent une série d’actes que le professionnel bancaire, en l’occurrence, doit nécessairement accomplir, dès la prise de contact avec le client et jusqu’à la signature du contrat (ici, de crédit).

Ce professionnel de la distribution fait partie du personnel soit d’une banque, d’un établissement prêteur, soit d’un Intermédiaire bancaire, un Courtier en crédits ou un Mandataire en crédits, qui sont des « IOBSP ».

Les nouvelles obligations que ceux-ci délivrent viennent renforcer la qualité du processus de vente du crédit immobilier, pour permettre la bonne compréhension du crédit par l’emprunteur, et pour faciliter son choix.

En tête des nouvelles dispositions, dès le 1er juillet 2016 :

  • Une obligation d’explication et d’analyse de la solvabilité,
  • Une obligation de mise en garde,
  • Un service facultatif de conseil en crédit,
  • Un service facultatif d’expertise (ou d’évaluation) du bien immobilier à financer.

Quels sont ces prestations que le consommateur-emprunteur en crédit immobilier trouvera auprès de son distributeur bancaire ?

Deux sont donc impératives, deux sont facultatives. Quatre raisons supplémentaires de bien emprunter.

1/ L’obligation d’explication et d’analyse de la solvabilité

Jusqu’au 30 juin 2016, le Code de la consommation en vigueur jusqu’à cette date, se préoccupait surtout de la forme du contrat de crédit, de la qualité de la publicité pour les crédits immobiliers, et, depuis peu (2013 et 2014) du choix éclairé du consommateur en assurance-emprunteur.

Depuis le 1er juillet 2016, les articles L. 313-1 et suivants du nouveau Code de la consommation présentent une « Section 4 » : « Explications fournies à l'emprunteur et évaluation de sa solvabilité ».

L’objectif de cette obligation d’explication consiste à assurer la bonne adéquation entre le contrat proposé et le profil du client. En clair : le profil financier de l’emprunteur est-il bien adapté au contrat proposé ? La question de l’analyse de la solvabilité de l’emprunteur occupe la première place, dans cette question d’adéquation entre le client et le crédit.

En théorie, la solvabilité est définie comme la « probabilité qu’il [l’emprunteur] remplisse ses obligations au terme du contrat de crédit ». Vérifier la solvabilité consiste donc à « prendre en compte les facteurs pertinents permettant de vérifier » cette probabilité.

Pour conduire cette analyse de solvabilité, rien de changé en pratique ; le distributeur, prêteur ou IOBSP, doit collecter des éléments d’information : revenus de l’emprunteur, épargne, dépenses, dettes,…

Attention :
la coopération « de bonne foi » du demandeur à la collecte de ces données est inscrite dans le Code de la consommation.

A l'issue de la vérification de la solvabilité, le prêteur informe, dans les meilleurs délais, l'emprunteur du rejet, le cas échéant, de sa demande de crédit. Si la décision se fonde sur la consultation du fichier des incidents bancaires (FICP), le prêteur doit en informer l'emprunteur et lui communiquer le résultat de cette consultation.

En cas d’acceptation, le professionnel doit préciser clairement à l’emprunteur les conséquences d'un défaut de paiement ; en ce cas, par exemple, il arrive que le bien immobilier financé puisse faire l’objet d’une saisie-immobilière.

L’emprunteur est donc en droit d’attendre, dès le 1er juillet 2016, des explications plus détaillées sur son profil de solvabilité et sur l’ajustement de celui-ci au crédit envisagé. En cas de refus, la production d’une réponse formelle, écrite, s’impose.

2/ L’obligation de mise en garde

Assez difficile à saisir par la plupart des emprunteurs particuliers, elle se résume ainsi : « le prêteur ou l'intermédiaire de crédit met en garde gratuitement l'emprunteur lorsque, compte tenu de sa situation financière, un contrat de crédit peut induire des risques spécifiques pour lui ».

Cette formulation ampoulée, adoptée à la demande des banques, permet d’octroyer un crédit un « peu juste », mais sans engager la responsabilité de la banque, puisque l’emprunteur, qui a décidé en connaissance de cause, a été « mis en garde ».

La mise en garde est donc un concept très faible, du point de vue de la protection des consommateurs.

L’analyse approfondie de la solvabilité, et les informations à restituer à l’emprunteur est bien plus éclairante.

Ce devoir de mise en garde est à délivrer à tous les emprunteurs. La distinction antérieure entre « emprunteur averti » ou « emprunteur non-averti » s’efface.

En cas de mise en garde, le candidat à l’emprunt devra bien peser sa décision. S’il opte quand même pour le contrat de crédit, ses recours seront plus faibles, en cas de difficultés de remboursement.

3/ Le conseil indépendant en crédit immobilier

Il s’agit d’un nouveau « service », optionnel, à la discrétion des professionnels bancaires. Ses chances de succès sont très faibles.

« Le service de conseil consiste en la fourniture à l'emprunteur de recommandations personnalisées en ce qui concerne un ou plusieurs contrats de crédit adaptés aux besoins et à la situation financière de l’emprunteur ».

Ce conseil se concrétise par une recommandation, « fondée sur des informations actualisées et sur des hypothèses raisonnables quant aux risques encourus par l'emprunteur pendant la durée du contrat proposé. Cette recommandation est établie au regard d'une gamme de produits comportant au moins trois contrats distincts de crédits ».

La rémunération du conseil indépendant en crédit est mise à la seule charge du consommateur.

Le conseil en assurance-emprunteur, lorsque l’emprunteur la demande (ce n’est pas une assurance obligatoire), est impératif.

L’emprunteur devra donc bien vérifier si son « interlocuteur commercial » (qui n’est donc pas nécessairement un « conseiller) propose, ou non, du conseil en crédit. Les Courtiers-IOBSP ont, eux, l’obligation de conseiller les emprunteurs, ce qui constitue une sécurité supplémentaire pour l’emprunteur, outre leurs compétences relationnelles généralement très bonnes.

Et même si le concept n’est pas dans les usages français, le fait de rémunérer un conseiller indépendant pour recevoir une analyse et des recommandations précises, n’est pas une mauvaise chose en soi. Les crédits peuvent ensuite être souscrits séparément (puisque le conseiller indépendant ne peut les vendre). Malheureusement, peu de consommateurs ont le réflexe de payer pour être conseillés. C’est bien dommage.

4/ L’expertise (ou évaluation) du bien immobilier

Il s’agit du deuxième service optionnel qui peut être proposé par les professionnels, aux consommateurs.

« L'évaluation […] consiste à déterminer la valeur du bien immobilier après analyse de toutes les pièces communiquées par le prêteur et qui sont utiles à la réalisation de l'évaluation selon les normes en vigueur ».

Lorsque ce service est fourni, le professionnel doit respecter certaines conditions strictes de sa mise en œuvre. Notamment, il suppose obligatoirement le recours à un expert indépendant et compétent, donc, extérieur au professionnel bancaire.

L'évaluation donne lieu à la rédaction d'un document d'expertise, remis au client. Le professionnel peut répercuter le coût de l’expertise au client.

L’emprunteur veillera donc à bien s’informer des possibilités et des conditions de réalisation de l’expertise, afin d’évaluer l’intérêt de celle-ci pour son dossier.

Clairement, l’expertise immobilière peut conforter une demande un peu juste, même si la valeur du bien financé ne peut être le seul facteur d’octroi d’un crédit.

La protection des consommateurs, y compris des emprunteurs, passe par le bon équilibre entre les intérêts du client et celui du professionnel. Les intérêts du client et ceux du professionnel doivent trouver « un terrain d’entente ». Le respect de cet équilibre incombe au professionnel. Il sera surveillé par les Juges de la protection des consommateurs. Le nouveau Droit de la consommation en crédit immobilier en procure à tous le cadre précis.

La prochaine tranche de nouvelles obligations des professionnels en crédit immobilier bancaires arrivera le 1er octobre 2016 ; c’est sans doute la plus substantielle (obligation d’information, FISE, TAEG, mentions publicitaires). D’autant qu’elle s’accompagne de la réforme du droit des contrats.

Avec le niveau très bas des taux d’emprunt immobilier, avec la refonte réussie du Prêt à Taux Zéro en 2016, les nouveaux droits des emprunteurs participent clairement au souffle de vents favorables à l’acquisition immobilière, que ce soit en premier achat, en revente/réacquisition d’une résidence principale plus confortable, ou en investissement.

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Maître Laurent Denis pratique et enseigne le droit. Conjuguant expérience bancaire et exercice juridique, il contribue aux nouvelles formes d'activités bancaires et financières, spécialement dans les domaines des crédits et de l'intermédiation. Auteur de plusieurs ouvrages, dont, avec Bruno Rouleau, consultant, « Courtiers en crédits et IOBSP : défenseurs d’intérêts » (juin 2018), lequel dépeint la profession d’IOBSP, analyse la situation présente et ses perspectives, pour détailler concrètement les pistes d’amélioration de son efficacité au service de l’économie. Son site : www.endroit-avocat.fr.

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