Huit juges allemands ont du avoir du mal à s'endormir, la nuit dernière. Ce ne sont pas n'importe quels magistrats : ces huit-là siégeront ce matin à partir de 10 heures à la Cour fédérale constitutionnelle allemande qui a ni plus ni moins à décider aujourd'hui si le plan de sauvetage de l'euro et de l'Europe est compatible avec la loi fondamentale germanique. Ils portent sur leurs épaules le poids de l'avenir de l'Europe et de la monnaie unique. Sans plaisanter.
Saisis par plusieurs dizaines de députés allemands, mais aussi par des associations et même des citoyens rassemblés dans des collectifs ad hoc, ces juges devront donner leur feu vert ou au contraire agiter un carton jaune, ou rouge, devant le nez du Mécanisme européen de stabilité. La question posée est en effet simple : alors que les traités internationaux conclus ces derniers mois entre les pays européens l'ont été par les gouvernements, donc, le pouvoir exécutif, la cour fédérale allemande a posé à plusieurs reprises le parlement allemand (Bundestag) sur un piédestal, estimant qu'il devait ratifier toute mesure prise par le gouvernement et engageant la responsabilité et de facto les finances du pays sur plusieurs années, et sur des montants par nature... inconnus.
Conséquence, toute décision d'importance prise au niveau européen se trouve condamnée à se voir approuvée ou rejetée par le Parlement allemand. Si les spécialistes du droit constitionnel allemand tablent sur un accord sous conditions des juges aux derniers traités européens, l'hypothèse d'un rejet pur et simple du MES n'est pas totalement écartée... Un scénario qui remporte la majorité des suffrages dans les sondages d'opinion, outre-Rhin.