Comment on tue la France qui gagne : l’exemple des Musiciens du Louvre Grenoble

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Par Philippe Herlin Publié le 12 décembre 2014 à 3h28

Le nouveau maire de Grenoble, Eric Piolle (EELV), a des idées bizarres : il bannit, dès janvier 2015, tous les panneaux publicitaires de sa ville, et se prive ainsi de 600.000 euros de recettes annuelles. Puis, pour compenser le manque à gagner, il coupe la subvention des Musiciens du Louvre (438.000 euros), un ensemble de musique baroque qui jouit d'une réputation internationale !

Les Musiciens du Louvre dirigés par Marc Minkowski, avec Les Arts florissants de William Christie, est l'une des formations françaises les plus prestigieuses dans le domaine de la musique baroque. Sa notoriété rayonne bien au-delà de nos frontières, tous les « baroqueux » de la planète connaissent cet ensemble. Fondés en 1982 et placés sous la direction Marc Minkowski, Les Musiciens du Louvre enregistrent régulièrement pour les grands éditeurs de disques et de DVD et jouent dans les grandes salles de concerts à travers le monde, ils se produiront en été 2015 au Festival de Salzbourg, le plus important festival de musique classique. On pourra les entendre à Paris à l'Opéra Comique dans La Chauve-Souris de Johann Strauss du 21 décembre au 1er janvier. Et ils donnent bien sûr de nombreux concerts à Grenoble.

Prestige d'un côté, donc, c'est-à-dire de nombreuses invitations à se produire à l'étranger, avec les recettes qui vont avec, et structure allégée de l'autre (peu de permanents, les musiciens sont embauchés en fonction des besoins), voilà qui au final permet à cette formation musicale de présenter des performances financières enviables. Sur un budget de 3,4 millions d'euros, les 2/3 proviennent des recettes propres (vente de billets, de tournées, de disques) et 1/3 des subventions publiques (Grenoble et l'Etat). Des chiffres peu courants en France, les orchestres de régions affichant plutôt un ratio inverse (1/3 de recettes propres, dans le meilleur des cas, 20% en moyenne nationale). L'argent public n'est pas dépensé en vain, et si tous les organismes subventionnés parvenaient à générer 2/3 de recettes propres, il y a longtemps que les déficits publics auraient disparu en France... Les Musiciens du Louvre Grenoble, c'est la France qui gagne !

Malgré cela, la ville de Grenoble veut couper intégralement la subvention, avant même l'échéance de la convention, ce qui ne laisse pas le temps à la formation de trouver d'autres sources de financement. Une façon de lui dire « dégagez ». Quand il y aurait tant de subventions abusives à supprimer, celle-ci concerne une structure qui obtient d'excellents résultats, on marche sur la tête. Sans doute la musique classique est-elle considérée par le nouveau maire comme trop « bourgeoise », trop élitiste, trop rattachée à un électorat qui ne vote pas pour lui. Une telle vision clientéliste, sectaire et antiéconomique est affligeante.

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Philippe Herlin est économiste, Docteur en économie du Conservatoire National des Arts et Métiers, il a publié plusieurs ouvrages chez Eyrolles et rédige des chroniques hebdomadaires pour Goldbroker. Il écrit tous les vendredis un article sur l'art et la culture vus à travers l'économie, et intervient ponctuellement sur d'autres sujets. Son site : philippeherlin.com.

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