Coronavirus et canard à l’orange

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Par Bill Bonner Modifié le 28 février 2020 à 6h06
Chine Croissance Marques Developpement
@shutter - © Economie Matin
2%Le Coronavirus pourrait amputer la Chine de 2% de croissance au premier trimestre 2020.

Le coronavirus ne signera sans doute pas la fin de l’humanité… mais il va faire beaucoup de mal à l’économie mondiale – et les marchés sont en train de s’en rendre compte.

Les marchés ont tenté un rebond hier, après un début de semaine paniqué. La chute de ces derniers jours a fait les gros titres – même dans la presse grand public.

CNBC explique :

« ‘La deuxième plus grosse économie au monde est complètement à l’arrêt. Les cours n’en tiennent pas totalement compte’, déclare Larry Benedict, PDG de The Opportunistic Trader, ajoutant qu’une correction boursière de 10% à 15% a peut-être démarré. Il affirme également que certains secteurs du marché, en particulier les grosses capitalisations technos, semblent surévaluées. ‘On dirait que ce n’est pas fini, et de loin’. »

Qu’est-ce qui fera couler le marché boursier US ? Nous n’en savons rien – mais quelque chose s’en chargera.

Quand est-ce que cela arrivera ? Nous ne le savons pas – mais c’est inévitable.

Et ensuite ?

Un monde de doute et d’ignorance

Dieu merci, « on dirait » existe. « C’est », ça va pour la science, la technologie, les mathématiques et des choses simples comme deux plus deux font quatre.

Mais si vous voulez savoir pourquoi les cours chutent… pourquoi vous n’avez pas eu d’augmentation… pourquoi votre femme vous en veut… ou pourquoi le pays est en pleine déconfiture, il vous faut le terme « on dirait ».

Il est même utile pour des choses que vous n’avez jamais personnellement vécues. Ce matin, par exemple, vous vous êtes peut-être dit « on dirait que j’ai 90 ans ». Vous savez ce que cela signifie même si vous n’avez pas encore eu 90 ans.

« On dirait » nous relie au monde incertain dans lequel nous vivons… un monde de doute et d’ignorance. Un monde où nous n’avons quasiment aucune certitude.

Il y a pourtant des schémas récurrents. C’est là que « on dirait » entre en scène.

C’est ainsi qu’on reconnaît les changements de températures : « On dirait qu’il fait froid. » C’est aussi ainsi qu’on sait que quelqu’un se comporte comme un crétin : « On dirait qu’il est complètement idiot. » C’est ainsi qu’on sait qu’il est temps de sortir du marché boursier ou de quitter une fête : « On dirait qu’il est temps de partir. »

Depuis quelques jours, nous examinons de nombreux graphiques… qui montrent tous un schéma familier. Les courbes grimpent et rebondissent… pendant des mois, des années… puis chutent soudain à pic, en ligne droite.

La plupart de ces graphiques proviennent d’Extrême-Orient… où nous voyons que tout semble chuter comme une pierre dans un puits. Or l’Extrême-Orient est désormais le plus grand bloc économique de la planète. Ce qu’il s’y passe a peu de chance de s’arrêter au terminal portuaire de Yangshan.

On dirait un canard…

Des problèmes se préparent, en d’autres termes – sur les bateaux de croisière comme sur les navires de transport.

Le coronavirus n’est pas une menace pour la race humaine. Il pourrait se propager partout dans le monde et tuer 2% de la population, quasiment tout fonctionnerait comme si de rien n’était. Deux pourcents, c’est marginal. Le lundi suivant le Super Bowl, par exemple, quelque 11% de la main d’œuvre américaine ne sont pas venus travailler.

Mais personne ne veut faire partie des 2% qui meurent. Les gens évitent donc les endroits publics. Ils se mettent en congé maladie et ne vont pas travailler. Ils ne font pas de courses.

L’économie américaine ne se développe que de 2% par an environ – quand tout est allumé. Maintenant, imaginez que les centres commerciaux soient barricadés. Imaginez qu’il n’y ait plus de matchs de baseball. Imaginez que les gens refusent purement et simplement de travailler… ou de monter dans un avion.

… Qu’arriverait-il aux actions des compagnies aériennes ? Aux commerçants ? Aux chaînes de restauration ?

Imaginez que l’économie tout entière soit verrouillée, comme une bonne partie de la Chine. Que se passe-t-il alors ? Les ventes, les profits, les bénéfices – tout s’effondre. Importations, exportations… restaurants, cinémas, stations de bus… tout se vide – y compris les aéroports.

Ce qu’on a alors n’est pas un simple revers ; on dirait plutôt une dépression. CNN :

« Le coronavirus continue de se propager et il y a des signes que certaines des plus grandes économies au monde pourraient glisser dans la récession, l’épidémie venant aggraver des faiblesses préexistantes. »

Nous parlons de ces « faiblesses préexistantes » dans ces lignes. Mais le marché boursier est valorisé comme s’il n’y avait pas de faiblesses du tout.

Ou, pour dire les choses autrement, il y a tant de faiblesses préexistantes que toute infection sera probablement fatale. On dirait qu’on est de retour en 2000… ou en 2008.

« On dirait » n’est pas aussi précis ou fiable que « c’est ». Cependant, en amour comme en guerre, en politique ou en économie… c’est le mieux que nous puissions faire.

Comme dirait les avocats, si on dirait un canard… si ça marche comme un canard… si ça cancane comme un canard… bon sang… c’est un canard.

Est-ce bien un canard ? Nous n’en savons rien. Mais nous allons garder la sauce à l’orange à portée de main.

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Fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information financières pour les investisseurs particuliers.

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