Raccourcir le congé parental pour mieux le partager : une fausse bonne idée

Marielauregageydesbrosses
Par Marie-Laure des Brosses Modifié le 20 novembre 2013 à 6h24

Le projet de loi sur l'Egalité homme-femme, adopté en 1ère lecture au Sénat et qui doit être voté début janvier 2014 à l'Assemblée Nationale inclut une réforme du congé parental : pour mieux inciter les pères à prendre une part de ce congé, le versement de l'allocation de congé parental (CLCA) sera limité à 2 ans et demi au lieu de 3 ans si les deux parents ne prennent pas chacun au moins 6 mois de congé parental.

Le Mouvement Mondial des Mères France (MMM France) souligne l'incohérence de la mesure préconisée, notamment pour les 280.000 parents qui prennent chaque année un congé parental à plein temps.

Une étude de la DREES de janvier 2010 indique en effet que 40% des parents qui bénéficient de l'allocation de CLCA n'ont pas de travail fixe : ils étaient avant le congé parental en CDD, en intérim ou au chômage. Comment imaginer que le 2ème parent prenne à son tour 6 mois de congé parental si le 1er parent n'est pas assuré d'avoir un emploi pendant ce temps-là ?

Même si de nombreuses raisons conduisent des parents à faire le choix du congé parental, l'aspect économique est toujours pris en compte : une étude de la CAF (Caisse d'allocations familiales) de janvier 2013 indique que les femmes en congé parental à plein temps avaient avant ce congé un salaire mensuel moyen de 783 €. Ce sont donc des femmes modestes ou très modestes. Dans 79% des cas, leur conjoint gagne mieux ou beaucoup mieux sa vie. On comprend aisément que ces familles ne pourront pas se passer du revenu principal de leur foyer et que la probabilité que le père prenne à son tour un congé parental est très faible.

Dans un certain nombre de famille, l'un des deux parents a un métier qui complique ou interdit de prendre un congé parental : artisan, commerçant, agriculteur, profession libérale, chef d'entreprise, frontalier,... Impossible d'imaginer que ces parents puissent prendre 6 mois de congé parental quel que soit leur désir de le faire.

Que feront alors les parents lorsqu'ils se verront privés de l'allocation de CLCA aux 2 ans et demi de leur enfant ? Difficile d'imaginer qu'ils trouveront tous un mode de garde, surtout lorsqu'on sait que l'une des raisons de prendre un congé parental est l'absence de mode de garde disponible (dans 30% des cas) et que l'on imagine bien que les crèches et les assistantes maternelles ne prendront pas en priorité des enfants pour quelques mois seulement.

Plus de 26.000 parents ont signé la pétition refusant le raccourcissement du congé parental. Elles demandent avant tout le droit de s'organiser librement en fonction des aspirations propres à chaque famille.

Le MMM France se mobilise pour faire entendre leur voix et demander au gouvernement :

- de laisser les familles s'organiser librement

- de maintenir le versement de l'allocation de CLCA jusqu'à l'entrée en maternelle de l'enfant

- de favoriser la parité professionnelle en s'attaquant en priorité à la précarité du travail féminin (contrats précaires, faibles rémunérations, discriminations envers les femmes enceintes ou ayant des enfants,...)

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Marielauregageydesbrosses

Marie-Laure des Brosses est diplômée d'HEC. Après 15 ans dans le marketing et la publicité, elle se met à son compte en 2002 comme Conseil en Management de l'Innovation. Passionnée par les solutions pour concilier vie professionnelle et vie familiale, elle est engagée chez Make Mothers Matter (ex Mouvement Mondial des Mères) depuis plusieurs années pour faire entendre la voix des mères auprès des pouvoirs publics. Présidente de MMM France de 2011 à 2017, puis porte-parole de cette association de 2018 à 2023, elle participe aujourd'hui à des groupes de réflexion sur l'avenir de la politique familiale.

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