Ce jugement marque une première étape vers la clarification des droits et devoirs des VTC et des taxis, en attendant la publication des décrets d'application de la Loi Thévenoud.
Le 16 octobre dernier, la 31e chambre correctionnelle de Paris a condamné Uber à une amende de 100 000€ pour pratique commerciale trompeuse. Elle a considéré que l'offre « UberPOP » ne relevait pas d'une activité de covoiturage, mais bel et bien d'une offre payante de transport de particuliers. Les juges ont souligné l'existence d'une tarification prédéfinie, calculée en fonction de la distance parcourue et du temps de voyage, ainsi que d'un prix minimum, ce qui « ne correspond absolument pas à un partage de frais mais s'apparente bien au paiement d'une course », selon les termes du jugement.
Les juges vont même plus loin : ils considèrent que la société Uber avait conscience, en lançant un tel service, d'enfreindre la loi française sur le transport routier de particuliers et a démontré son intention manifeste de contourner la législation qu'il connaissait parfaitement, ajoutant que « ce comportement caractérise une parfaite mauvaise foi dissimulée derrière un discours qui se veut progressiste ».
Nous ne pouvons que nous réjouir d'une telle décision. Si l'activité de covoiturage non rémunérée est positive, voire nécessaire à la réduction de l'empreinte des voitures individuelles sur les déplacements urbains, dans le contexte d'une réduction impérative de l'empreinte écologique des activités humaines, le covoiturage professionnel est désormais officiellement assimilé à l'organisation d'une activité de taxi clandestin. En clair, l'activité de co-voiturage ne peut s'exercer à titre professionnel, c'est-à-dire en étant rémunérée. Ce principe est d'ailleurs réaffirmé dans le projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, actuellement en discussion au Parlement.
Cependant, ce jugement n'est qu'un premier pas vers la clarification des droits et devoirs du secteur. Il fera date à une condition : que les décrets d'application de la loi sur les taxis et les VTC (Loi Thévenoud) promulguée le 2 octobre dernier soient publiés rapidement. Afin d'éviter toute ambigüité source de tensions possibles sur le terrain – on l'a hélas encore vu récemment avec l'agression d'un chauffeur de taxi – il est nécessaire qu'ils précisent clairement la distinction entre « maraude électronique » et « réservation préalable », et qu'ils définissent clairement la notion de « contrat client ». C'est à cette condition que le flou juridique encadrant notre profession sera effacé.
Innover... vraiment
Seuls des textes réglementaires clairs permettront de tourner la page. Le projet de loi sur la transition énergétique constitue une excellente opportunité pour l'ensemble du secteur d'avancer vers de nouveaux sujets et de lancer ensemble des projets novateurs en matière de mobilité urbaine durable ; projets tournés à la fois vers le bénéfice écologique et celui des consommateurs.
A ce sujet, l'amendement de M. Plisson à la loi Thévenoud consistant à imposer aux sociétés de transport de personnes de disposer de 10% de leur flotte en véhicules hybrides ou électriques, nous parait aller dans le bon sens. C'est déjà le cas de la plupart des acteurs légitimes du secteur.
Mais nous sommes également prêts à aller beaucoup plus loin, par exemple en constituant une flotte de 1000 à 2000 véhicules 100% électriques d'ici à 2017. Il suffirait pour cela qu'une même licence puisse être exploitée par deux chauffeurs sur deux véhicules distincts, à condition qu'ils circulent alternativement et que l'un des deux utilise uniquement un véhicule tout électrique. La circulation alternative de ces deux chauffeurs, garantie par le contrôle des taximètres connectés, permettrait de développer une offre de taxis disponibles tant aux heures creuses qu'aux heures de pointe. Il permettrait aussi de réduire significativement les charges inhérentes au véhicule et à sa licence pour le chauffeur.
On le voit, la bataille n'est pas encore gagnée. L'innovation est certainement la meilleure réponse à la nécessité de nous développer et d'offrir le meilleur service possible à nos clients. Mais cette innovation ne consiste pas à chercher par tous les moyens à contourner les lois nationales pour développer une activité de transport de personnes au détriment de la qualité de service et du bien-être de ses propres salariés. Le jugement du 16 octobre le prouve.