Concurrence déloyale : les signes distinctifs au service de la répression

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Par Antoine Chéron Publié le 31 mai 2017 à 5h00
Concurrence Deloyale Action Justice Signes Distinctifs
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1382L?exploitant du nom commercial ou du nom de domaine disposera alors d?un droit personnel en réparation sur le fondement de l?article 1382 du code civil.

Par un arrêt en date du 3 mai 2017 la Cour d’Appel de Paris rappelle les options d’action en justice laissées au titulaire d’un signe distinctif.

Une société anciennement membre d’un Groupement d’Intérêt Economique (GIE) dénommée Five Auction fut dissoute, ce qui entraîna la transmission universelle de son patrimoine au profit de son associé unique, non membre du GIE Five Auction, à savoir la société Alcopa Auction.

Le GIE Five Auction constata qu’une requête « Five Auction » effectuée sur un moteur de recherche déclenchait l’affichage d’un lien commercial vers le site exploité par la société concurrente Alcopa Auction, accompagné d’un message énonçant que « Five Auction devient Alcopa Ventes aux Enchères de Véhicules ».

Après avoir été débouté de leurs demandes par le Tribunal de Commerce de Paris, le GIE Five Auction et ses membres ont interjeté appel, entendant faire juger la société Alcopa Auction responsable de pratiques commerciales trompeuses ainsi que d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme. La Cour d’appel reconnaissant la compétence du Tribunal de Commerce fit droit à la plupart des demandes des appelants.

Reconnaissance de la concurrence déloyale

L’utilisation d’un signe distinctif par un concurrent à titre de mot-clef dans le service Adwords d’un moteur de recherche ayant pour effet de provoquer l’affichage d’une annonce sur la même page internet que le concurrent n’est pas en soit prohibé. Cependant, un tel usage peut devenir illicite lorsqu’il s’accompagne d’actes déloyaux de nature à générer un risque de confusion pour l’internaute normalement informé et d’attention moyenne. L’exploitant du nom commercial ou du nom de domaine disposera alors d’un droit personnel en réparation sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Au cas présent, le moteur de recherche affichait l’annonce « Five Auction devient Alcopa Auction Ventes aux enchères », présentant cette dernière comme la nouvelle dénomination du GIE Five Auction. De plus, tout mot correspondant aux différents sites des appelants renvoyait au site de la société Alcopa Auction et créait donc une confusion pour l’internaute d’attention moyenne et normalement informé. C’est donc sans difficultés que la Cour d’Appel a retenu l’existence d’acte de concurrence déloyale commis par Alcopa Auction afin de s’approprier le prestige et de l’image du GIE Five Auction.

Reconnaissance de pratiques commerciales trompeuses

Selon l’article L. 121-1 du code de la consommation, une pratique commerciale peut s’avérer trompeuse si elle créé une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commerciale ou un autre signe distinctif d’un concurrent, lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur.

Ainsi le message litigieux dépourvu de toute ambiguïté : « Five Auction devient Alcopa Aution Ventes aux Enchères de Véhicules » vers lequel l’internaute était inévitablement renvoyé, témoignait en outre de la volonté spécifique d’induire le consommateur en erreur. La Cour d’appel a alors reconnu l’existence de pratiques commerciales trompeuses.

L’action en concurrence déloyale et pour pratiques commerciales trompeuses : une voie parallèle aux actions sur les droits de marque

L’intérêt majeur de cet arrêt tient à ce que la Cour d’appel de Paris expose ici qu’un signe distinctif peut être protégé aussi bien en se fondant sur le droit des marques, sur la concurrence déloyale et le parasitisme ou encore sur le fondement d’une pratique commerciale trompeuse, pour peu que le signe en question soit déposé pour une dénomination totalement ou partiellement semblable en tant que marque, dénomination sociale, nom commercial et enseigne commerciale.

Les appelants soutenaient que le Tribunal de Commerce avait outrepassé sa compétence en statuant sur les questions afférentes au droit des marques. Ils revendiquaient en plus des droits privatifs sur la dénomination litigieuse distincts des droits portant sur la marque, des droits sur la dénomination sociale et le nom commercial. En effet, les appelants soutenaient que la dénomination litigieuse correspondait la dénomination sociale et le nom commercial du GIE « Five Auction » ainsi que de ses trois membres. A ce titre, les appelants ont donc agit sur le fondement de la concurrence déloyale et le parasitisme ainsi qu’au titre de pratiques commerciales trompeuses, et non le droit des marques.

A cet égard, la Cour d’Appel a reconnu que l’abstention des appelants d’avoir attrait la partie adverse sur le fondement de la protection de la marque ne saurait être interprétée comme une renonciation à faire valoir leurs droits en matière de concurrence déloyale. En conclusion, un signe peut être utilisé par une entreprise à différents titres (marque, dénomination sociale…) et le titulaire pourra agir pour le protéger en choisissant parmi différentes actions en justice sur des fondements indépendants, relevant respectivement du code de la propriété intellectuelle, du code de la consommation et du code civil, lorsque les conditions seront remplies.

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Antoine Chéron est avocat spécialisé en propriété intellectuelle et NTIC.

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