Selon vous, le référendum dans l’entreprise doit-il être privilégié plutôt que la négociation entre les syndicats de salariés et ceux des employeurs ?
• Sous total « oui » : 77 %
• Sous total « non » : 23 %
77% des Français interrogés considèrent que le référendum doit être privilégié à la négociation entre organisations syndicales et patronales.
Il s’agit là d’une mesure que la ministre du Travail Myriam el Khomri a proposée lors d’une interview à la radio cette semaine.
Selon elle, ce dispositif pourrait être actionné par les salariés en cas d’opposition syndicale à un accord négocié au sein d’une entreprise (aujourd’hui, l’opposition syndicale à un accord négocié est possible si l’accord est rejeté par les organisations syndicales représentant plus de 50% des voix au moment des élections internes). Il permettrait ainsi de contourner des positions syndicales de principe… Ce serait donc une arme à disposition des syndicats réformateurs au sein des entreprises pour contrer les organisations les plus contestataires.
Manifestement, cette idée séduit une très large majorité de Français, plus des trois quarts sont favorables à ce type de dispositifs. Ce faisant, on peut considérer que la ministre du travail utilise l’opinion publique contre les organisations syndicales qui ne voient naturellement jamais d’un bon œil toute atteinte à leur pouvoir d’action.
En communication, ce résultat amène deux commentaires :
• D’abord, que Madame El Khomri prend un vrai risque en s’opposant ainsi aux organisations syndicales. D’un point de vue politique, on peut ranger cette mesure dans la liste des propositions libérales du gouvernement. Si la mesure devait être confirmée, il sera intéressant d’en mesurer les effets dans le temps.
• Ensuite, globalement, ce résultat illustre la défiance de plus en plus importante qui existe entre les Français et celles et ceux qui sont censés les représenter. Ce phénomène qui touche les politiques ou les médias atteint manifestement les organisations syndicales. Ce signe de défiance doit être perçu par celles et ceux qui en sont victimes comme le signe d’un besoin de renouvellement des discours et des postures… Beaucoup de travail en perspective.
Q2 : Selon vous, faut-il avoir des relations commerciales avec tous les pays, y compris ceux qui ne respectent pas les droits de l’homme ?
• Sous total « oui » : 36 %
• Sous total « non » : 64 %
64% des Français interrogés se déclarent opposés à ce que la France développe des relations commerciales avec tous les pays, y compris ceux qui ne respectent pas les Droits de l’Homme.
Chacun se souvient de la phrase de Pierre Desproges, procureur général du « Tribunal des Flagrants délires » sur France Inter au début des années 80, qui affirmait que l’on pouvait rire de tout, mais pas avec n’importe qui. Les Français interrogés dans le sondage de ce jour confirment cet adage célèbre en matière commerciale puisqu’ils considèrent, à une large majorité, qu’il ne faut pas avoir de relations commerciales avec tous les pays, notamment ceux qui ne respectent pas les droits de l’homme.
Il n’en demeure pas moins vrai que si les Français placent la morale des Droits de l’Homme au-dessus des impératifs commerciaux. Il faut tout de même constater que le pourcentage de refus (64%) n’est pas aussi élevé que nous aurions pu le penser.
En communication, ce chiffre peut s’expliquer de deux façons :
• par la force de l’habitude ;
• par une conversion à « la realpolitik », liée aux impératifs économiques.
D’abord, il s’agit d’une question récurrente en France, qui s’est posée depuis la fin de la seconde guerre mondiale. De l’URSS de Brejnev, à la Chine de Mao en passant par l’Irak de Saddam Hussein ou Cuba dans la période castriste la plus dure, à chaque fois la question de la compatibilité des Droits de l’Homme et des impératifs commerciaux s’est posée. Régulièrement, les gouvernants de toute nature politique ont davantage cédé à la tentation commerciale qu’à la rigueur morale que le fait d’être un représentant de la « Patrie des Droits de l’Homme » imposerait.
Ainsi, habitués à voir les grands discours théoriques sur les Droits de l’Homme, devenir solubles au contact des impératifs de la balance commerciale, les Français se sont peut être convertis peu à peu au pragmatisme de la realpolitik. Face aux impératifs de l’économie et à la nécessité de la France de rétablir une balance commerciale positive, les Français interrogés considèrent sans doute que les entreprises françaises ont raisons de se rapprocher des Etats qui redeviennent fréquentables. L’Iran, dont le président est actuellement en visite officielle en France, en est un parfait témoignage. Les annonces optimistes de grandes entreprises françaises (Total et PSA par exemple) qui ont conclu des contrats avec ce pays expliquent également ce chiffre.
Pour le gouvernement, tout l’enjeu de communication dans le futur sera de ne pas aller trop loin vers le basculement vers la realpolitik économique et de réussir à maintenir dans le débat public l’image d’un pays héritier des valeurs du siècle des Lumières. Tout l’enjeu pour l’avenir de la France sera de toujours être considéré comme une référence en matière de garanties des libertés publiques pour ne pas devenir « n’importe quel pays commerçant ».
Sondage exclusif TILDER/LCI/OpinionWay du 28 janvier 2016