Qu'est-ce que désire le marché lorsqu’il « contemple » son environnement ? Avant tout de la lisibilité, afin de pouvoir caler ses anticipations. En est-on là aujourd’hui ? Pas trop, d’où une certaine nervosité qu’on retrouve dans les niveaux de volatilité sur les marchés d’actions. Ceux-ci sont certes plus bas qu’au plus fort de la correction de marché du mois dernier. Mais ils n’ont pas retrouvé les niveaux de fin septembre. Il faut dire que les questions le long de l’axe allant de la croissance à la politique en passant par l’action des banques centrales sont nombreuses et les réponses à apporter, incertaines.
Commençons par la croissance. La journée de mercredi 14 novembre a ressemblé un peu à une « foire à la grimace ». Il y a d’abord le recul de la croissance du PIB au Japon et en Allemagne pour le troisième trimestre. Dans les deux cas, il y a un argumentaire solide pour défendre l’idée que la contre-performance n’est pas extrapolable : un passage à vide de la production automobile allemande pour raison de changement de normes techniques et l’impact d’une série de catastrophes naturelles dans l’Archipel nippon. Il n’empêche qu’une confirmation par les faits (des chiffres économiques meilleurs) sera la bienvenue. Et puis, il y a la Chine. Tout le monde s’accorde pour reconnaître qu’un scénario économique mondial « satisfaisant » pour 2019 passe par une croissance chinoise qui « tient le choc ». D’où l’attente un peu anxieuse de la publication des indicateurs conjoncturels chinois. Disons que le jugement, à la lecture de ceux publiés entre ce mercredi et ce jeudi 15 novembre, est partagé. En octobre, les dépenses des ménages ont ralenti (consommation et logement), mais l’investissement, qu’il soit manufacturier ou en infrastructure, se comporte mieux. Ce meilleur dynamisme des infrastructures publiques rassure ; n’a-t-on pas envie d’y voir le signe que la politique de relance porte ses fruits ? Il n’empêche que le point principal d’attention est sur les exportations. Celles-ci se comportent très bien à l’heure actuelle. Sans doute au titre d’une accélération des livraisons à l’étranger, avant un éventuel alourdissement des taxes américaines en début d’année prochaine. Bref, les relations commerciales sino-américaines sont un enjeu majeur en termes d’anticipations de marché. Nous allons y revenir.
Passons à la politique monétaire. C’est actuellement la Fed qui retient le plus l’attention. Rappelons les épisodes précédents. D’abord, un Jay Powell, le Président du Board à Washington, à la forme résolument optimiste au début du mois d’octobre (une « économie particulièrement brillante » et une banque centrale qui pourrait « aller au-delà de la neutralité »). Ensuite, un communiqué au sortir du dernier comité de politique monétaire (en date du 8 novembre) quasiment inchangé par rapport au précédent. Mercredi 14 novembre au soir, au cours d’un colloque organisé par le district de Dallas de la Fed, il a insisté sur les « vents contraires » que l’économie américaine pourrait rencontrer l’an prochain : le ralentissement de l’activité au niveau mondial, la réduction du stimulus budgétaire et l’effet décalé de la remontée du taux directeur de la Fed. Un premier pas vers une inflexion baissière dans le rythme de remontée de ce dernier ? Oui, a-t-on envie de répondre ; mais à confirmer. En insistant qui plus est sur la question du réglage budgétaire. Le moindre soutien à la croissance en 2019 paraît acquis. En revanche, le resserrement aujourd’hui projeté pour 2020, année électorale, est sans doute une perspective un peu aventureuse ; au moins aux yeux du Président Trump.
Finissons par la politique. Le dossier le plus important aux yeux du marché est très probablement celui des relations commerciales entre Pékin et Washington. Les signaux positifs, même s’ils restent faibles, s’accumulent. Le dernier en date pointe un certain nombre de concessions que la Chine serait prête à faire. Mais on ne sait pas lesquelles. Cela permet toutefois de cultiver les anticipations positives en vue de la réunion entre les Présidents Trump et Xi en fin de mois en Argentine. Avec l’idée-clé qu’entamer les négociations, même si elles sont longues et difficiles, gèlera toute décision d’augmenter les taxes à l’importation de part et d’autre. Ce qui rassurerait sur la croissance, chinoise d’abord et mondiale, ensuite. CQFD.
Les autres dossiers politiques « chauds » sont européens ; on le sait tous. L’actualité est britannique ce matin. La démarche itérative de la Première ministre May remporte sa première victoire : son Cabinet a donné son accord pour signer l’accord entre Londres et Bruxelles sur les conditions de la sortie du RU de l’UE. Gagner une bataille ne fait cependant pas toujours gagner la guerre. Reste à gagner la bataille de l’opinion publique britannique pour espérer gagner celle de Westminster et ainsi remporter le « match ». Il va y avoir du suspens, mais le marché paraît plutôt confiant.