Le Rescrit CIR Roulant : la réforme en cours facilitera-t-elle le recours au Rescrit en matière de Crédit Impôt Recherche ?

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Par Larry Perlade Publié le 20 juin 2016 à 14h58
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@shutter - © Economie Matin
9 MILLIARDS €L'Etat dépense 9 milliards d'euros en aides pour la recherche et l'innovation chaque année.

Aujourd'hui, une entreprise peut effectuer une demande de Rescrit fiscal jusqu'à 6 mois avant le dépôt de la déclaration du CIR correspondant, pour s’assurer que son dossier CIR ne sera pas rejeté par l’Administration dans le cas d’un contrôle fiscal ultérieur.

Une démarche que NÉVA ne recommandait pas forcément jusqu’à aujourd’hui, tant elle présentait de lourds inconvénients. § La réforme du dispositif qui est en cours dans le cadre du Choc de Simplification, pourrait lui redonner de l’intérêt, à quelques réserves près…

L’éclairage de NÉVA

Une entreprise peut bénéficier d’un CIR dès lors qu’elle estime en remplir les conditions d’éligibilité. La procédure est dite déclarative, c’est-à-dire que l’entreprise calcule ses dépenses éligibles, calcule le montant du crédit d’impôt correspondant et l’impute directement sur le montant de l’Impôt Société qu’elle doit au titre de l’exercice écoulé, ou bien, si c’est une PME et qu’elle n’est pas redevable de l’IS, elle en réclame immédiatement le remboursement auprès du Trésor Public. Dès que le dossier est déposé, l’entreprise est réputée avoir une créance certaine sur l’Etat. Bien sûr, ce n’est pas tout à fait aussi simple : le montant du CIR sera en réalité validé, ou non, a posteriori, à l’issue d’un éventuel contrôle fiscal (le délai de prescription de trois ans s’applique dans ce cas). Le principe d’une procédure déclarative induit de fait un risque à courir.

Afin de sécuriser les dossiers et de permettre aux entreprises de limiter les aléas, l’administration fiscale a introduit il y a quelques années la possibilité de l’interroger sur le périmètre et l’éligibilité de ses dépenses au Crédit Impôt Recherche. C’est la procédure du Rescrit CIR qui autorise toute entreprise à demander l’avis de l’administration en amont au regard de la situation qu’elle lui présente, et non plus à attendre un verdict ultérieur. Cela permet en principe de sécuriser son CIR. L’entreprise interroge l’administration quant à l’éligibilité des travaux de R & D qu’elle prévoit de réaliser. Cet avis, une fois rendu, est opposable à l’administration, sous réserve bien entendu que les travaux réalisés ne s’écartent pas trop significativement des travaux projetés.

Et c’est là toute la difficulté !

Le Rescrit roulant : encore un effort, monsieur le législateur

C’est cette difficulté que tente de résoudre la réforme en cours du Rescrit CIR dans le cadre du Choc de Simplification promis par le gouvernement. L’administration a annoncé qu’à compter de la mi-2016, les entreprises pourront la réinterroger chaque fois que les contours de leurs projets de R&D évolueront. C’est le Rescrit CIR dit « roulant ».

L’idée est séduisante. Encore faudra-t-il en préciser les contours afin d’être sûr qu’elle apporte un surcroit de sécurité aux entreprises concernées, et qu’elle ne devienne pas une nouvelle « usine à gaz »…

Si les bénéficiaires du CIR sont des cibles désignées pour les contrôleurs du fisc, les possibilités de recours existent et, pourvu que leurs créances soient légitimes et solidement documentées, les entreprises redressées auront toujours intérêt à déposer des recours devant l’administration fiscale puis devant les tribunaux administratifs et auront le plus souvent, si le dossier est solide et bien défendu, gain de cause.

A l’inverse, dans le cadre d’un Rescrit, lorsque l’administration a rendu son verdict, aucun véritable recours n’est possible puisque l’Administration n’a fait que donner son avis suite à la demande qui lui a été faite ! Dès lors, le danger du Rescrit CIR roulant est qu’une insécurité fiscale encore plus grande ne s’installe : qu’advient-il d’une entreprise s’étant lancé dans des travaux de R & D suite à un premier Rescrit CIR positif dans le cas où celui-ci devient totalement ou partiellement négatif 3 mois, 6 mois, 9 mois plus tard dans le cadre d’une nouvelle sollicitation de l’Administration au titre du Rescrit CIR roulant ?

L’instauration du Rescrit CIR roulant met le doigt sur ce qui constitue le problème même du Rescrit en matière de CIR : alors qu’un Rescrit négatif est bloquant (qui, de bonne foi, pourrait imaginer déclarer un CIR après avoir reçu un Rescrit négatif ?), un Rescrit positif n’est nullement une garantie de validation du CIR : si c’était le cas, pourquoi imaginer la possibilité de reposer la question quelques mois plus tard ?

Dans ce contexte, et en l’absence de possibilités de recours équivalentes à celles qui existent dans le cadre « déclaratif », l’instauration d’un Rescrit CIR roulant apparaît non pas forcément comme une opportunité nouvelle offerte aux entreprises, mais peut-être au contraire comme le moyen pour l’Administration de refermer, au fil des sollicitations « roulantes » de l’entreprise, la porte ouverte par un Rescrit initial positif.

Un Rescrit initial négatif étant par définition une fin de non-recevoir, le Rescrit roulant ne concerne donc que les projets ayant reçu un Rescrit initial positif, et doit donc plutôt être vu comme un processus en entonnoir donnant le moyen à l’Administration de disqualifier certains projets à telle ou telle étape de leur évolution.

Nous attendons donc avec impatience de connaître les modalités d’application de ce nouveau Rescrit CIR roulant pour voir par quels moyens celui-ci ne se retrouvera pas handicapé dès l’origine par sa complexité de mise en œuvre, et surtout par quels moyens celui-ci ne finira pas par pénaliser les entreprises porteuses de projets de R & D là où il était censé leur offrir au contraire une nouvelle souplesse d’utilisation.

Si ces défis sont relevés, la réforme du Rescrit CIR prendra tout son sens…

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Larry PERLADE a créé NÉVA en 1995 pour accompagner les PME dans leurs recherches de financements publics. Depuis près de 18 ans, il est ainsi devenu un expert reconnu en financement de l’innovation et subventions R & D. Auparavant, il a été Vice-Président Directeur Général de FRED Joaillier USA et Secrétaire Général du groupe FRED Joaillier, avant de diriger le Centre d’Art Contemporain ARTCURIAL pour L'ORÉAL. Il a démarré son activité professionnelle chez Elf Aquitaine au Royaume-Uni. Larry PERLADE est diplômé d’HEC (1982), de l’Université de Berkeley (Californie) et de l’ESADE (Barcelone). 

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