Chypre: Du rêve au cauchemar et de l’État providence à l’État rapace

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Par Simone Wapler Modifié le 26 mars 2013 à 0h19

« Laissez-nous rêver » proclamait une des pancartes des manifestants chypriotes du samedi 23 mars.

Chypre : encore une île européenne qui coule et qui menace d’emporter l’euro. Les technocrates comme Mario Draghi pensent que l’euro est « irréversible », comme le Titanic passait pour insubmersible. Pourtant, les marchés financiers s’affolent. Ils ont du mal à comprendre pourquoi des gens refusent de se laisser voler 10 % ou 20 % de leurs avoirs en banque, sachant que sinon ils perdent 100% de ces avoirs puisque lesdites banques feraient faillite.

Si Chypre reste dans l’Europe et que sa population paie d’une façon ou d’une autre les 7 Mds€ pour compléter les 10 Mds€ apportés par l’Europe (c’est à dire vous, membre de l’internationale des contribuables de la zone euro), aucun des problèmes courants n’est pourtant résolu :

· Portugal et Grèce toujours en dépression

· Banques espagnoles en faillite

· Italie ingouvernable avec banques malades

· Irlande faisant défaut. Dans un silence médiatique assourdissant, début mars, l’Irlande a froidement transformé une dette de 30 Mds€ sur 10 ans avec remboursement annuel de 3 Mds€ en une obligation à 40 ans, à intérêt annuel de 3% (dont le principal est remboursé d’un bloc à échéance).

· France sombrant dans le déficit, la récession et le chômage.

Avec ou sans Chypre, l’euro fait peur

A ces problèmes connus s’ajoutera désormais le doute sur la sécurité des capitaux en euro.

La Russie a prévenu que si les dépôts de ses ressortissants et administrations étaient touchés, elle reverrait sa politique de réserves de change. Ce qui veut dire que les 400 Mds€ d’obligations européennes aux mains de la Banque centrale Russe pourraient être convertis dans d’autres placements, monnaies ou or.

Si Chypre sort de l’Europe, il s’avèrera que l’euro n’est pas irréversible. L’expérience sera regardée avec beaucoup d’intérêt tant par les pays faibles que par une Allemagne lassée de tout financer. Là encore, les capitaux étrangers vont se raréfier vers une monnaie incertaine. Alors que l’Europe a besoin d’emprunter tous les jours près de 2,2 Mds€ pour sa survie, Le Figaro du 22 mars prévoyait 300 Mds€ de fuite des capitaux comme conséquence du désastre chypriote.

« Laissez-nous rêver », c’est bien ce qu’ont fait des autorités et des hommes politiques depuis plus de 40 ans et pas seulement à Chypre. Le rêve a été acheté à crédit. C’était simple et facile, les taux d’intérêt baissaient donc la dette pouvait augmenter sans que cela coûte plus cher.

Aujourd’hui, les dettes sont abyssales, les souscripteurs se font rares et donc les taux ne peuvent rester si bas. Le rêve va devenir cauchemar. L’État providence va muer en État rapace et prédateur. Il ira prendre l’argent où il se trouve, dans vos comptes en banque, dans votre assurance-vie, dans vos livrets, dans votre épargne retraite.

Dans un État de droit, un nouvel impôt doit être voté par des élus du peuple. Mais en cas de panique, la violence légale s’applique. Nous serons soumis à la démocratie barbare qui prend par la force ce qu’il lui faut.

« Laissez nous rêver »: la démocratie implique que les gens aient le droit d’avoir un pays géré par des politiciens charlatans qui leur promettent le bonheur en distribuant de l’argent emprunté chaque jour. Petit problème, ce rêve ce n’est pas la vraie vie et va connaître une issue tragique. Pour ceux qui sont réveillés, il est urgent de prendre des dispositions pour éviter que l’État fasse main basse sur votre argent.

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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