A en croire les statistiques, le taux de chômage baisse. Les experts en arrivent même à discuter les « dixièmes » de pour cent pour montrer les progrès et la baisse sensible du chômage depuis un peu plus de deux ans. Les dispositions et les mesures mises en place par les gouvernants porteraient leurs fruits ?
Plus de 300.000 emplois ont été créés en 2017, moins de 150.000 en 2018. Combien d’emplois verront le jour en 2019 ? Quel a été l’impact de ces nouveaux emplois sur la réduction du taux de chômage en 2 ans ? Si on s’en tient aux chiffres officiels, la création d’emplois serait de l’ordre de 1% en 2017 et de 0,5% en 2018.
Un satisfecit très limité à prendre avec des pincettes !
Toutes catégories confondues, c’est plus de 6,5 millions de personnes qui sont inscrites à Pôle emploi. Près de 3 millions d’inactives (catégorie A) sont indemnisées. Le taux de chômage « moyen » calculé par l’Insee, se situerait à 8,8% aujourd’hui, à partir du rapport de la Dares. Une baisse nette estimée à 1,1% sur un an, fin 2018. Ce chiffre, que d’aucuns considèrent comme satisfaisant, est repris en boucle par les politiques dans les médias !
C’est une fausse « bonne » nouvelle que de se référer à la seule valeur moyenne globale de cet indicateur. En réalité, le taux de chômage varie de 6 à 20%, dépendant de nombreux facteurs :
1/ D’une région à l’autre, d’un département à l’autre, d’une agglomération à l’autre, la baisse d’activité, la désindustrialisation, les difficultés dans les milieux agricoles et l’absence croissante de services publics sont de lourds handicaps.
2/ Il en est de même pour la nature des offres d’emploi proposées, les besoins dans des professions suivant les secteurs, les catégories, les qualifications, les expériences et les formations requises pour les demandeurs d’emploi.
3/ L’âge est aussi un facteur déterminant. Autour de 21% pour les moins de 25 ans, le taux de chômage est autour de 8,5% pour les 25-49 ans, tandis qu’il se stabilise à hauteur de 6,5% pour les seniors...
En France, le nombre des 15-64 ans actifs est supérieur à 29 millions. Sachant que plus de 6,5 millions de personnes sont inscrites à Pôle emploi, le taux de « sans-emploi » estimé dépasse les 22% !
Qui peut croire qu’on puisse juger l’évolution de l’activité en France à partir d’un chiffre partiel « moyen », distillé tous les 3 mois, au gré du bon vouloir du « politique » sans commentaires officiels ? Vouloir le comparer à ceux de nos voisins allemands, britanniques ou des pays du Nord est un non-sens.
Autres indicateurs plus révélateurs : les taux d’emploi et d’activité…
On a tendance à oublier que dans l’évaluation du taux de chômage, seuls les chômeurs indemnisés sont pris en compte dans le calcul de cet indicateur. C’est pourquoi pour comprendre l’état de la France en matière d’emploi, il est préférable de réagir en termes de taux d’activité qui tient compte à la fois des personnes ayant un emploi et de celles qui contribuent par leur activité à l’apport de richesse.
Le taux d’activité et le taux d’emploi sont les indicateurs, pris en compte par le BIT (Bureau international du travail), validés par l’Insee. Apprécier le nombre de personnes entre 15-64 ans au travail permet de mieux prendre conscience de la réalité de la situation. La population active regroupe les travailleurs ayant un emploi et les personnes au chômage ou en recherche effective d’emploi. Le reste de la population est considérée comme inactive.
Pour la France métropolitaine, voici les projections de la population active (15-64ans) pour 2020 : le nombre potentiel d’actifs serait de 29,6 millions dont 1,9 million, hors norme, au-delà des 60 ans. Il inclue aussi les chômeurs ou en recherche d’emploi (> 6,5 millions). Parmi les actifs, les femmes représentent 48,1%, 10% concernent les jeunes de moins de 25 ans tandis que la part des seniors est de 16,8%. Le taux d’activité moyen serait de 71,5% (pratiquement inchangé sur les 5 dernières années). Le taux d’emploi en hausse atteindrait 67,7%. Par définition, concernant les seules personnes ayant un emploi, il est inférieur au taux d’activité.
D’après l’Insee, ci-dessous le taux d’emploi (TE) et le taux d’activité (TA) concernant quelques pays de l’UE, en 2015 :
Allemagne : 74% (TE) – 77,6% (TA) ; Belgique : 61,8% (TE) – 67,6% (TA)
Danemark : 73,5% (TE) – 78,5% (TA) ; Espagne : 57,8% (TE) – 74,3% (TA)
France : 63,8% (TE) – 71,2% (TA) ; Italie : 56,3% (TE) – 64% (TA)
Pays-Bas : 72,7% (TE) – 79,6% (TA) ; Suède : 75,5% (TE) – 81,7 (TA)
Royaume-Uni : 72,7% (TE) – 76,9% (TA) ; UE : 65,6% (TE) – 72,5% (TA)
A partir de ces données, on peut se permettre de mieux comparer les résultats de la France avec ceux de certains pays de l’Union européenne appartenant ou non à la zone euro.
La France est toujours en « recherche d’emploi »
Et pourtant, quoi qu’on en pense, quoiqu’on en dise, la France est toujours en « recherche d’emploi » pour une part importante des demandeurs ou jugés comme tels. La page n’est pas tournée. Le problème demeure.
La non-existence d'une solution-miracle pour l'emploi n'est pas une révélation. La croissance ne suffira pas surtout quand celle-ci est inférieure ou égale à 1,5% du PIB et que le voisinage européen est en recul.
Il ne faut pas oublier que c’est l’activité qui crée l’emploi et non l’inverse. On ne bâtit pas l'avenir sur l'inactivité forcée, indemnisée et entretenue qui génère le désespoir. C’est pourquoi, cet effort d'investissement et de mobilisation pour imaginer et créer de l'activité utile, accessible à tous, quelle qu'en soit sa forme, est tout à fait possible. Des gisements d'activité sont présents partout dans tous les secteurs et auprès de millions de petites entreprises et de multiples structures artisanales. Il faut les découvrir, les encourager et les stimuler.
Forcer la mobilisation est possible. L'entreprise, la formation et l'éducation sont les clés de voûte de ce dispositif. C’est à l'État et aux partenaires sociaux d’en être les garants vis-à-vis des citoyens. Encore faudrait-il qu’ils en aient conscience !