La Chine veut étendre son contrôle sur les sociétés extractrices de matières premières

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Par Sylvain Fontan Modifié le 6 novembre 2013 à 8h04

L'émergence rapide de la Chine en tant que puissance industrielle majeure s'impose de plus en plus comme une des principales problématiques concernant les ressources naturelles mondiales. Au-delà des aspects purement économiques autour notamment de la gestion de l'offre et de la demande de ressources naturelles, cette question soulève également des points potentiellement problématiques dans une optique géoéconomique.

Stratégie et objectif de la Chine

Le gouvernement chinois est à la base de la stratégie du pays. En effet, le gouvernement chinois encourage fortement les entreprises nationales à acquérir des parts dans les multinationales opérant dans le domaine des ressources naturelles. Il encourage également les entreprises nationales à accorder des prêts aux investisseurs pétroliers et miniers. Enfin, il les aides à obtenir la conclusion d'accords d'approvisionnement de long terme dans ces mêmes secteurs.

La stratégie du pays vise à étendre le contrôle des industries extractrices mondiales. En effet, le but de ces diverses méthodes est de créer des liens entre la Chine et les différents opérateurs énergétiques mondiaux pour garantir autant que possible la sécurité énergétique du pays. Par conséquent, nouer des accords d'accès préférentiels est un moyen de permettre au pays de s'assurer de disposer d'une production énergétique "sûre", dans un contexte où l'offre est appelée à être de plus en plus contrainte et où la demande va continuer à augmenter. Le pays ambitionne donc ainsi de faire face à ses besoins énergétiques actuels et futurs qui conditionnement fortement le développement économique du pays.

Pression sur les marchés mondiaux

Les besoins Chinois entraînent une forte pression sur la gestion des ressources mondiales. Les deux côtés des marchés sont impactés :

  • Du côté de la demande, l'importance des volumes d'énergie et de minerais nécessaires à la Chine renforce considérablement la pression sur le système productif international de ces ressources.

  • Du côté de l'offre, les effets sont ambivalents : les besoins chinois peuvent exacerber les problèmes liés à une demande élevée (raréfaction, hausse des prix...), mais ils peuvent également paradoxalement réduire ces mêmes problèmes. En effet, cela peut réduire la difficulté à trouver des acheteurs pour écouler certaines productions, mais aussi et surtout cela peut permettre de rentabiliser les investissements visant l'amélioration du système de production (innovation, exploitation de gisements jusque-là non rentables, renouvellement du matériel d'exploitation...) afin d'augmenter l'offre disponible.

Dès lors, même si les besoins accrus de la Chine en termes de ressources énergétiques et minières créent des tensions sur ces marchés, il ne faut pas pour autant négliger les aspects potentiellement positifs, qu'ils soient localisés et/ou temporaires (permettre d'écouler des surproductions...), ou qu'ils soient d'ordre à améliorer les capacités de production.

Aspect géoéconomiques

La Chine est le deuxième consommateur au monde de pétrole après les Etats-Unis. En plus d'être le deuxième consommateur, la Chine est devenue le premier importateur de pétrole devant les Etats-Unis depuis cette année. Ainsi, le pays cherche naturellement à sécuriser ses routes d'approvisionnement énergétiques, qu'elles soient maritimes (Océan Indien et mer de Chine méridionale) ou terrestres (achats d'entreprises ou prises de participations dans des compagnies pétrolières, gazières ou minières étrangères). Tous ces aspects entraînent des tensions (Afrique), des contentieux territoriaux (Asie) et des intérêts grandissants (Moyen-Orient). Aujourd'hui, 70% de la consommation chinoise d'énergie est assurée par le charbon, présent en abondance sur le territoire national (avec des effets néfastes sur l'environnement de plus en plus importants). Dans le même temps, plus de 20% des importations chinoises de pétrole proviennent d'Afrique et 50% du Moyen-Orient, et son acheminées par voie maritime (le pays devrait d'ailleurs achever la construction de son premier porte-avions en 2015 pour sécuriser cette voie). Dès lors, la question de l'approvisionnement énergétique chinois est appelée à jouer un rôle central au cours des prochaines décennies, avec en toile de fond le futur "affrontement" entre ce pays et les Etats-Unis sur les aspects d'hégémonie mondiale.

D'autres problématiques sont soulevées. En effet, la politique chinoise en ce qui concerne la recherche de sécurisation des ressources naturelles peut amener à soutenir des régimes autoritaires (Birmanie avec la production et le transport de pétrole, de gaz et de minerais), des guerres civiles (soutien à la production de pétrole au Soudan), à soutenir les phénomènes de corruption (en Chine et en-dehors), à entretenir la dégradation de l'environnement, et plus largement à tout ce qui participe à la détérioration des standards de bonne gouvernance, que ce soit en Afrique, en Amérique latine, au Moyen-Orient ou dans le Pacifique-Sud.

La Chine détient un avantage fondamental : les terres rares. L'appellation "terres rares" correspond à un ensemble de métaux peu connus et très inégalement répartis sur le globale, qui sont indispensables à la production militaire mais aussi civile avec des produits tels que les télévisions, les Smartphones, les piles et aimants, les éoliennes, les moteurs électriques, etc. La Chine détient actuellement l'essentiel des réserves mondiales de terres rares (environ 50%) lui procurant ainsi un pouvoir d'action sur les prix mondiaux de ces métaux et rendant dépendants de nombreux pays. Typiquement, les Etats-Unis importent 90% de leurs besoins en terres rares de Chine, tout comme le Japon qui importe 90% de ces métaux indispensables à la production de plusieurs produits de haute technologie dont son industrie est très dépendante. La détention de ces ressources par la Chine lui octroie naturellement le contrôle sur les marchés internationaux, mais aussi la capacité à attirer des investissements étrangers et à apporter une plus grande valeur ajoutée à son industrie nationale.

Retrouvez d'autres décryptages économiques écrits par Sylvain Fontan sur son site : www.leconomiste.eu

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Sylvain Fontan, économiste et créateur du site www.leconomiste.eu   Parcours Professionnel   - Analyste-Investissement (Unigestion - Société de gestion d’actifs) - Analyste-Risque (RWE - Société de trading en énergie) - Analyste-Hedge Fund (BPER - Banque Privée Edmond de Rothschild) - Macroéconomiste (TAC - Laboratoire de recherche privé en économie et finance) - Chargé d’études économiques (OMC - Organisation Mondiale du Commerce) - Chargé d’études économiques (ONU - Organisation des Nations Unies)  

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