Le Premier Ministre au Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE)

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Par Jacques Bichot Publié le 16 septembre 2021 à 6h51
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@shutter - © Economie Matin
8%Le taux de chômage en France est d'environ 8%.

Ayant jadis présidé la Fédération des Familles de France, j’ai exercé à ce titre trois mandats au CES, le Conseil économique et social, institution qui s’est enrichie d’un E lorsque l’environnement est devenu un thème politiquement incontournable. Cela explique que j’ai eu la curiosité de regarder à la télévision la séance de ce jour (14 septembre), séance de « rentrée » consacrée au lancement d’une saisine gouvernementale. L’occupation de l’Hémicycle donnait à penser que les 175 membres du CES, nommés ou confirmés peu avant la césure estivale, étaient quasiment tous présents pour écouter le discours qu’a prononcé le Premier Ministre

Une institution discrète

Il faut savoir que le CESE travaille d’une part sur des sujets choisis par ses membres (« auto-saisines ») et sur des demandes émanant du Gouvernement. Pour cette rentrée, il s’agissait d’une saisine gouvernementale, relative à l’accompagnement du Gouvernement en matière d’emploi, de transition écologique et de rénovation démocratique. L’emploi est un thème récurrent – à l’époque où j’étais Conseiller, affecté à la section du travail, j’avais d’ailleurs proposé un rapport sur l’emploi des jeunes, qui posait alors des problèmes au moins aussi sérieux que de nos jours. Ce rapport, travaillé en section, a été l’occasion d’échanges très intéressants, mais je ne peux hélas pas dire qu’il ait servi à inspirer la politique de l’emploi de notre pays : je suppose qu’il a été sagement rangé dans les bibliothèques des organismes auxquels il a été transmis, et que bon nombre de ses exemplaires ont terminé en papier recyclé.

Nos gouvernants savent-ils se faire conseiller ?

Il n’est pas évident de conseiller nos gouvernants. Et réciproquement, il n’est pas facile pour ceux-ci de se faire utilement et correctement conseiller. Chaque personne ou organisme conseille naturellement ce qui lui paraît intéressant du point de vue de son intérêt personnel ou de ses préférences idéologiques. Demander conseil revient assez souvent à s’enquérir de ce qui plait à autrui, de façon à prendre des mesures qui seront suffisamment attractives pour être mises en œuvre sans trop d’oppositions. Par exemple, certains pensent qu’il n’y a pas assez de moyens mis en œuvre pour ceci et cela, disons l’instruction publique ou la lutte contre la pauvreté. Leurs « conseils » sont alors plutôt des tentatives pour faire prendre des décisions conformes à leurs aspirations, que des éclairages objectifs.

Les présidents, ministres et autres personnes ayant un certain pouvoir de décision sont donc, à juste titre, enclins à prendre avec des pincettes les avis qui leur sont donnés. Ils ont souvent autour d’eux davantage de personnes qui cherchent à les influencer que d’experts s’efforçant simplement de les éclairer. Les détenteurs de pouvoir n’ont pas affaire principalement à des conseillers mus par le pur souci du bien commun, mais à des personnes décidées à promouvoir habilement des analyses et des idées conformes, soit à leur intérêt personnel, soit aux intérêts d’une catégorie pour laquelle ils ont de la bénévolence.

L’acteur et le système

Cette expression a été utilisée par Crozier et Friedberg comme titre d’un ouvrage assez ancien (1977), mais dont l’intérêt n’a aucunement « des ans subi l’outrage ». Dans leur introduction, ils rappellent un classique, le dilemme du prisonnier. Tout acteur en relation avec un semblable et une autorité se trouve confronté à un problème : chercher à obtenir beaucoup du détenteur de l’autorité, au détriment de l’autre, devenu rival ; ou chercher un accord avec ce rival, de façon que chacun obtienne une part du gâteau. Tout décideur se trouve confronté à des situations de ce genre : des alliances entre concurrents, qui préfèrent obtenir à coup sûr (ou presque) un avantage moyen, que risquer de ne rien obtenir pour essayer de tout avoir.

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Jacques Bichot est économiste, mathématicien de formation, professeur émérite à l'université Lyon 3. Il a surtout travaillé à renouveler la théorie monétaire et l'économie de la sécurité sociale, conçue comme un producteur de services. Il est l'auteur de "La mort de l'Etat providence ; vive les assurances sociales" avec Arnaud Robinet, de "Le Labyrinthe ; compliquer pour régner" aux Belles Lettres, de "La retraite en liberté" au Cherche Midi et de "Cure de jouvence pour la Sécu" aux éditions L'Harmattan.

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