Ce n’est pas cher, c’est l’État qui paye

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Par Charles Sannat Publié le 10 novembre 2014 à 12h49

Je souhaitais revenir sur l'allocution présidentielle de mi-mandat de la fin de la semaine dernière une fois la poussière retombée et les commentaires à chaud et bien souvent inutiles, dissipés.

Un président profondément pathétique dans un exercice l'étant tout autant...

TF1, qui sait exceller dans l'art de la télé-réalité, a donc fait un casting pour sélectionner quelques français. Pas trop quand même. 4, c'est bien 4. Ils ont posé des questions au président qui a répondu systématiquement à côté.

Le chômage ? Pas bien, il faut lutter contre le chômage et il s'y emploie blablablablablabla.
Les jeunes. C'est bien d'être jeune et blablablablablabla.
Les vieux ? C'est triste d'être vieux, alors blablablablablabla.

Les annonces... et la besace du Père Noël !

Tous les journalistes, gentils et plutôt braves gars, nous avaient prévenus. Le président viendra avec des annonces, il n'aura pas les mains vides, pensez donc, c'est une allocution de mi-mandat... et quel mandat !

Alors il a annoncé des trucs comme assister un peu plus encore les déjà assistés avec l'argent que l'on n'a pas, ce qui l'a logiquement amené à promettre aux autres que les impôts « promis, juré, craché » n'augmenteraient plus jamais... foi de socialo. Pendant ce temps, à l'Assemblée nationale, les députés rivalisent de créativité fiscale avec une efficacité redoutable.

Je ne suis pas contre l'assistanat, je suis même pour que tout le monde soit riche, beau, en bonne santé et tout le tralala. Le petit problème c'est que tout cela doit être financé d'une façon ou d'une autre, par l'impôt, par la dette ou par la création de monnaie. Quelle que soit la méthode choisie, il ne faut pas se leurrer, il faut payer à un moment ou un autre.

La création monétaire et la dévalutaion. On ne peut plus puisque nous avons fermé notre planche à billets pour la refiler aux Allemands (d'ailleurs, la BCE est en Allemagne, ce qui n'est pas un hasard).

La dette ? On peut toujours essayer d'aller « encore plus loin, encore plus vite selon la même trajectoire tout en gardant le cap » comme dirait l'autre nodocéphale élyséen, mais cela semble un peu compliqué. Bruxelles n'est pas forcément d'accord et les marchés qui nous prêtent finiront par tousser.

Alors il nous reste les impôts. Cet imbécile économique profond nous avait promis « l'inversion de la courbe du chômage »... Inversion qui, au bout de deux ans et demi, se fait toujours attendre avec des résultats chaque mois de plus en plus déplorables. C'était une évidence économique que je vous ai à mainte reprises commentée dans ces colonnes. Le chômage ne peut pas baisser, ne baissera plus ou de façon que très momentanée, la robolution va débouler sur nous dès 2015, bref, nous avons définitivement perdu la bataille de l'emploi, avec ou sans croissance qui ferait son retour, croissance qui refuse obstinément de revenir depuis maintenant plus de 7 années actant ainsi le fait qu'il ne s'agit pas d'une crisounette conjoncturelle mais bien d'un changement complet, radical, de système économique.

Alors notre handicapé des concepts économiques a fait, en étant très insistant, la plus stupide des promesses qu'il ne fallait surtout pas faire. Il nous a promis... qu'il n'y aurait plus d'augmentation d'impôts, une promesse qu'il sera incapable de tenir plus de 6 mois. Effet d'annonce uniquement ou effet sémantique. Certes, il peut nous expliquer que créer une nouvelle taxe sur quelques machins que ce soit ce n'est pas les « impôts sur le revenu », que les taxes locales, régionales, départementales ne sont pas des impôts et que ce n'est pas sa faute à lui si tout cela augmente, surtout que l'État se désengage et donne de nouvelles compétences aux régions dans une hypocrisie évidente, il n'en restera pas moins que les impôts au sens large ne peuvent qu'augmenter.

Une grande vision pour la France... les JO !

Moi qui écris à longueur de temps que notre pays a besoin d'un grand projet, d'une grande vision de l'avenir, d'un immense changement de l'ensemble de ses structures et de son fonctionnement, que nous devons redéfinir collectivement ce que nous voulons faire croître et ce que nous souhaitons voir décroître, bref, qu'il faut que nous prenions le changement par la main avant qu'il ne nous prenne par le cou, je devrais être content que le président soit conscient de cette nécessité.

Le problème c'est que ce bougre d'âne décidément ne comprend jamais rien ou que personne autour n'arrive à expliquer à cet autiste politico-économique habitué génétique des motions de synthèses et du non-choix qu'une vision pour la France ce n'est pas d'accueillir les JO ni en 2024 ni plus tard et encore moins de se farcir l'Exposition universelle.

Il n'y a donc personne pour lui dire qu'il est totalement, complètement, magistralement à côté de la plaque. C'est quoi organiser les JO ? C'est 20 milliards d'euros de dette en plus prise en charge par la collectivité pour construire des équipements dont personne ne se servira par la suite et permettant au privé de faire tout plein de bénéfices sur le dos des con-tribuables de la planète entière. C'est partout dans le monde le même cirque à chaque fois. On commence par un budget prévisionnel de 3 milliards, cela se termine dans la panique la veille de l'ouverture avec 28 milliards de dépenses...

D'ailleurs, la « mairesse » de Paris ne s'y est pas trompée, tient bien à sa réélection et ne souhaite pas tripler l'endettement de sa ville qui, en outre, a une fâcheuse tendance à augmenter depuis 10 ans...

Enfin, il nous achève avec un « ce n'est pas cher, c'est l'État qui paye »...

Cet ectoplasme de la finance d'école élémentaire, où l'on devrait apprendre à simplement tenir le budget d'une famille, n'a toujours pas compris que l'État, bougre d'idiot intégral, c'est nous. Les moyens de l'État c'est l'addition des moyens de chaque citoyen et comme on est de moins en moins nombreux à pouvoir financer vos âneries, eh bien les moyens de l'État vont devoir connaître une nette diminution... Désormais, dans notre pays, nous sommes, au sens fiscal du terme, riches à partir de 2 000 euros net de revenu mensuel. C'est un résultat pitoyable.

Alors François ne voit pas de problème. Lorsqu'il met en place un nouveau dispositif, il explique doctement à la télé que ce n'est pas cher, c'est l'État qui paye... Et une grande partie des problèmes de notre pays vient de cet état d'esprit, de l'absence de respect du bien commun, de l'intérêt général. Économisons chacun pour que la sécu perdure. Économisons chacun pour que l'assurance chômage perdure... Mais non, c'est la gabegie autorisée, puisqu'au plus haut niveau de l'État, la pensée dominante c'est « ce n'est pas cher c'est l'État qui paye ».

Préparez-vous parce qu'il va vraiment nous mener dans le trou...

Charles Gave s'est fait connaître par un ouvrage dont le titre résume l'histoire de notre pays Des lions menés par des ânes. Nous sommes des lions et il existe dans ce pays une créativité, une richesse intellectuelle, conceptuelle, littéraire, artistique, il existe une main-d'œuvre remarquablement qualifiée. Nous sommes un tout « petit » pays et pourtant nous maîtrisons toutes les technologies, nos ingénieurs conçoivent, nos ouvriers œuvrent et fabriquent, nous sommes capables du meilleur. Dans nos villes, dans nos campagnes, des solidarités nouvelles se développent, les gens se retrouvent et je vous incite fortement à vous rapprocher de ce tissu associatif bouillonnant actuellement. AMAP, monnaie locale, système d'échange, bourses, marchés, partout dans les villes, les banlieues et les campagnes, c'est la France qui actuellement se met en mouvement.

Cela est très porteur d'espoir même si nous passerons vraisemblablement par un effondrement et une forme de chaos plus ou moins durable. Cette allocution présidentielle doit véritablement vous faire prendre conscience que malgré toute la sympathie (réelle) que je peux avoir pour ce bonhomme (le président), il est un âne menant des lions. Il n'a rien compris et ne comprendra que trop peu et bien trop tard. Il ne fera rien. Il n'est capable de rien. Il n'est pas le seul. Ses prédécesseurs, de gôche comme de droâte, n'ont pas plus été à la hauteur.

Il est déjà trop tard et c'est avec cette phrase que je conclus depuis quelques temps mes articles. La raison est très simple. Il est trop tard pour les réponses et les solutions collectives menées et portées par les politiques au pouvoir, quel que soit leur bord politique.

Alors mes chers lions, laissez les ânes braire, il est déjà trop tard. Préparez-vous et restez à l'écoute.

À demain... si vous le voulez bien !!

Au coffre Le Contrarien Charles Sannat

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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