- L'Allemagne a évité la récession au deuxième semestre mais le risque demeure pour 2015.
- L'Europe ne pourra pas faire l'économie d'un débat sur une stratégie de relance par les investissements.
- L'année 2015 marquera la fin de la croyance en la toute-puissance des banques centrales.
L'Allemagne a évité la récession au deuxième semestre mais le risque demeure pour 2015. Les derniers chiffres prouvent, sans surprise, que le pays ne peut pas rester durablement à l'abri du ralentissement économique généralisé dans l'Union monétaire. La publication d'un PMI manufacturier à 50, c'est-à-dire à l'intersection entre la phase d'expansion et la phase de contraction de l'économie, souligne qu'une dynamique baissière se met en place.
Il fait peu de doutes désormais que le PMI manufacturier pour décembre ressorte en contraction, faisant ainsi plier le PIB allemand pour le quatrième trimestre. Une croissance à 0% voire en baisse de 0.1% n'est pas du tout exclue sur la période.
Dans ces conditions, l'Europe ne pourra pas faire l'économie d'un débat sur une stratégie de relance par les investissements. Jusqu'à présent, toutes les initiatives dans le domaine se sont soldées par un échec cuisant. Le débat s'est focalisé sur des investissements en infrastructures par l'Allemagne sans qu'un plan de développement économique global pour la zone euro n'ait été pensé.
Cela impliquerait de cibler les secteurs d'avenir qui puissent faire l'objet d'une coopération industrielle européenne, d'étoffer très significativement les dépenses en R&D au niveau communautaire, et aussi de s'interroger plus sérieusement sur une éventuelle spécialisation économique des pays périphériques. Les gains en compétitivité de cette zone sont indéniables mais sont essentiellement liés à une baisse drastique du coût du travail qui a eu pour effet négatif d'accentuer le risque de déflation. L'avantage compétitif obtenu est de très court terme. Ces pays n'éviteront pas une montée en gamme et / ou une spécialisation sur certains segments de marché.
Pour qu'une politique de relance par les investissements soit efficace, il sera également nécessaire de s'émanciper temporairement des règles de la libre concurrence et d'instaurer une « préférence euro ». En effet, qu'on ne s'y trompe pas, si l'Allemagne se lance dans des projets d'infrastructures, il y a de plus fortes chances qu'elle fasse appel à des PME et à une main d'œuvre polonaises, comme c'est déjà le cas, plutôt qu'à des entreprises espagnoles ou portugaises. Il faut donc que l'Union ait une approche plus pragmatique et ait conscience de la nécessité de faire preuve de solidarité vis-à-vis des pays du Sud du continent.
Malheureusement, il y a fort à craindre que tout développement politique dans le sens d'une plus grande cohésion économique européenne n'aboutisse pas. Depuis le début de la crise, les responsables politiques européens se sont beaucoup reposés sur la banque centrale européenne. Les derniers chiffres allemands vont certainement encore accentuer la pression sur Mario Draghi pour qu'il se lance dans un QE souverain qui est vu d'un bon œil par de nombreuses capitales européennes.
A ce sujet, il n'y a rien à attendre d'ici la fin de l'année. Il serait absurde de croire que la BCE prenne de nouvelles mesures avant le résultat de la deuxième opération de TLTRO prévue le 11 décembre prochain qui lui permettra d'avoir une meilleure visibilité sur les besoins en liquidité du secteur bancaire européenne.
Si action dans ce sens il doit y avoir, elle n'aura lieu que l'an prochain. Cependant, au regard de l'impact somme toute faible des nombreuses mesures de la BCE, on peut anticiper avec certitude que l'année 2015 marquera la fin de la croyance en la toute-puissance des banques centrales. Les leaders européens n'auront d'autre choix que de faire face à leurs responsabilités et de reprendre le relais. Ils devront s'entendre pour aboutir à davantage d'intégration européenne ou accepter le scénario noir d'une longue stagnation économique dont les conséquences sociales et politiques sont imprévisibles.