C’est vous qui paierez l’impôt sur les sociétés d’Apple

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Par Ferghane Azihari Modifié le 20 septembre 2016 à 7h26
Apple Remboursement Impots Irlande Euros
@shutter - © Economie Matin
13 milliards ?Apple a été condamné à verser 13 milliards d'euros à l'Irlande.

L’impôt pèse toujours sur quelqu’un : actionnaire, employé, consommateur. La concurrence fiscale est un système sain qui conduit à baisser les prélèvements sur les activités productives et créatrices de richesse. La sanction fiscale d’Apple n’enrichira personne.

La récente décision de la Commission européenne de contraindre Apple à rembourser 13 milliards d’euros à l’Etat irlandais a fait le tour du monde en raison du caractère colossal de la sanction infligée. L’exécutif européen accuse le gouvernement irlandais et la firme californienne de s’être mis d’accord sur un traitement fiscal spécial qui violerait la législation sur les aides d’Etat. Comble de l’ironie, c’est le gouvernement irlandais qui, dans un premier temps, a fait appel de la décision pour demander à ne pas être obligé de réclamer la somme en question, de peur d’affaiblir l’attractivité de l’Irlande. La procédure est donc loin d’être terminée mais les médias se sont empressés de relayer la “bonne nouvelle” à l’image du Monde qui, dans un éditorial, oppose nos intérêts, supposés défendus par la Commission européenne, à ceux d’Apple.

Les choses sont en réalité plus compliquées. Le Brexit a entamé la crédibilité de l’eurocratie qui a besoin de réaffirmer son autorité en faisant un exemple. C’est aussi un excellent moyen de flatter nos plus bas instincts de contribuables largement éprouvés par l’irresponsabilité fiscale de ceux qui nous gouvernent. Nous avons en effet développé le triste réflexe de demander une égalisation de la pression fiscale par le haut plutôt que de militer pour un plus grand respect de la propriété de chacun. Une telle manière de voir les choses sert bien sûr les responsables politiques. Ces derniers cherchent à faire diversion pour dissimuler leur piètre gestion tout en jetant en pâture à l’opinion publique une entreprise qui, malgré tous ses défauts, a contribué à générer bien plus de richesses en quelques décennies que toutes les administrations européennes réunies.

Les bureaucrates exploitent notre ignorance économique en nous poussant à réclamer une stricte harmonisation de l’impôt sur les sociétés en Europe sans réaliser que c’est bien nous qui paieront la facture.

L’impôt sur les sociétés pèse d’abord sur les employés

Seules les personnes physiques supportent le poids de l’impôt. Les sociétés ne sont que des fictions juridiques. Toute charge imposée à ces sociétés se répercute finalement sur les personnes physiques avec lesquelles elles échangent. Dans le cadre de l’impôt sur les sociétés, la répartition de la charge se fait principalement entre les travailleurs, les actionnaires, et les consommateurs selon des proportions qui dépendent des équilibres de marché et plus précisément des sensibilités de chacun aux variations de prix. Ces équilibres varient pour chaque secteur.

Déterminer avec précision la répartition finale du poids de l’impôt entre ces différents intervenants est donc un exercice difficile même si de récents travaux de l’Epicenter – un réseau d’instituts de recherche en Europe – émettent l’idée que l’impôt sur les sociétés est principalement supporté par les travailleurs (et avance le chiffre de 57%). En effet, le poids de l’impôt sur les sociétés sera principalement supporté par les travailleurs sous la forme de salaires plus faibles. Dans d’autres cas, les actionnaires porteront l’essentiel de la charge. Cela se manifestera par moins de dividendes. Enfin, dans d’autres scénarios, c’est le consommateur qui sera sollicité via l’augmentation du prix final du produit vendu. Le consommateur, le travailleur et l’actionnaire se partagent donc le poids de l’impôt sur les sociétés et il arrive parfois qu’ils constituent une seule et même personne.

Les bienfaits de la concurrence et de l’optimisation fiscale

Les politiciens cherchent à faire croire que les entreprises qui minimisent leur facture fiscale agissent contre nos intérêts. C’est pourtant le contraire. L’optimisation et la concurrence fiscales permettent à des sociétés comme Apple de mieux rémunérer le capital et le travail, ce qui accroît les incitations à entreprendre, à épargner et à investir. La capacité des entreprises à innover et à délivrer des produits destinés à satisfaire les consommateurs au moindre coût s’en trouve accrue. L’optimisation fiscale permet de réduire la quantité de ressources qui seront utilisées par les politiciens et les bureaucrates pour accroître leur pouvoir via des services publics à la productivité douteuse. En diminuant la capacité des gouvernements à interférer avec le commerce, l’optimisation fiscale permet de sauvegarder un certain niveau de prospérité qui serait plus faible autrement. La concurrence fiscale joue dans ces conditions un rôle décisif.

Tous les Etats européens se sont dotés d’un cadre législatif officiellement destiné à prévenir l’apparition de monopoles, d’ententes, de cartels… Etrangement, ces mêmes gouvernements refusent d’appliquer à leurs activités la même logique. Les diverses organisations multilatérales que sont l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), l’Union européenne (UE) ainsi l’Organisation mondiale du commerce (OMC) tendent à réduire la concurrence fiscale à l’échelle mondiale. Pourtant, cette concurrence permet réellement de réduire le parasitisme de l’administration. Plutôt que de souhaiter une harmonisation fiscale en Europe, il serait au contraire plus opportun de stimuler davantage la concurrence juridictionnelle afin qu’elle conduise à une diminution constante des prélèvements obligatoires sur les activités productives. Il reste à espérer que la sortie du Royaume–Uni de l’Union européenne relance ce processus.

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Étudiant en droit et en science politique à l’université de Paris-Est Créteil Val-de-Marne, Ferghane Azihari est coordinateur local pour Students for Liberty, un réseau international destiné à promouvoir l’économie de marché. Il est également chargé de mission pour l’École de la Liberté, une plateforme de recherche et d’éducation destinée à faire connaître la tradition libérale à travers le prisme de toutes les sciences humaines. Il publie régulièrement pour le magazine Contrepoints en France, l’Institut Ludwig von Mises aux États-Unis. Il est également rédacteur chez Young Voices. Ses centres d’intérêt se portent plus particulièrement sur les politiques européennes, les relations internationales, la fiscalité et plus généralement les rapports entre le droit positif et la concurrence.

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