A force de pas y croire ou pour le moins de faire en sorte que l’ensemble des opinions en doute, les dirigeants européens ont pris le Brexit de plein fouet. Leur crédibilité en a pris un coup. L’intoxication était telle que même dans la nuit avant le résultat peu de gens y croyait. Les médias eux-mêmes en doutaient. La surprise a été générale. Politiques au Royaume –Uni et en Europe ont été fortement perturbés. Peut-être que le Brexit peut remettre en cause l’UE ? Personne ne le sait, mais tout le monde en parle…
Le Brexit a fini par l’emporter !
Malgré les clignotants et les alarmes, nul n’était convaincu que cela pouvait se produire. Depuis 43 ans, le Royaume-Uni avait rejoint l’UE. Toujours un pied « dedans », un pied « dehors », nos « amis » britanniques s’étaient satisfaits de cette situation équivoque. Pour des raisons internes, David Cameron avait sollicité cette consultation populaire, convaincu qu’il pouvait encore obtenir plus dans un statut privilégié. Décidés à renoncer à accepter une politique d’immigration et des directives économiques dictées par Bruxelles, les partisans du « Brexit », puisque la question était posée, se sont mobilisés. Ils ont, à la surprise générale, remporté le vote. Dans la précipitation chacun cherche à qualifier ce vote de « populiste ». Peu importe, le résultat est là. Le Royaume-Uni se déchire. Ce vote sur le « Brexit » a surtout révélé de profondes fractures, sociales, économiques, culturelles et aussi géographiques.
Et si démocratie « directe » faisait peur aux démocrates ?
Avec 51,8 % de « pour » et 48,2% de « contre », nos « voisins » britanniques se sont prononcés, avec un vote de démocratie directe, pour quitter l’Union européenne. Alors même que l’UE tente fébrilement d’en découvrir les conséquences et d’en tracer les démarches, le vote est déjà contesté. Si l’Angleterre (53,4%) et le Pays de Galles (52,5%) ont majoritairement voté le « Brexit », l’Ecosse (62%), l’Irlande du Nord (55,8%) comme Londres y étaient clairement hostiles. Tous ont de profondes raisons de vouloir voler de leurs propres ailes, seuls ou en rejoignant l’Eire, mais dans l’UE. L’image perçue est inquiétante pour l’équilibre du pays. Sur un plan géopolitique, certains parlent d’un rejet aux lourdes conséquences qui pourrait conduire à une dislocation.
Et si la démocratie directe faisait peur aux démocrates ? C’est ce qui ressort des premières impressions quand elle n’est pas favorable aux intérêts des perdants. De premières perturbations occupent l’actualité au Royaume-Uni. Une pétition nationale recueille déjà près de 4 millions de signatures, réclamant un nouveau référendum avec des modalités plus strictes comme une obligation d’une approbation avec un taux d’adhésion de 60% minimum. Ces partisans veulent nier le résultat, considérant que le score en faveur de « Brexit » n’est pas significatif et que les électeurs ont été trompés autour de faux arguments. Les contestataires indiquent que la plupart des « jeunes », synonymes d’avenir, tout comme le monde financier et une majorité du milieu des affaires étaient « contre » et ont plébiscité le « Remain ». En un mot, nos « voisins » ont l’air de découvrir la démocratie ! Ils espèrent que l’UE comprendra peut-être qu’il ne s’agit en fait que d’un simple malentendu, en préservant « ses » avantages tout en étant désormais les deux pieds « dehors » ?
L’UE sous le choc devra s’armer de patience dans l’inconnu…
Partout dans l’Union européenne, les réunions d’urgence se succèdent sur les conséquences du Brexit. Dans les principales capitales, de Berlin à Paris, en passant par Bruxelles, Madrid, ou Rome, le monde politique « national » et « européen » s’agite-t-elle avec une « apparente » ou une « réelle » détermination ? Tous les leaders fondateurs sont sur le « pont ». Angela Merkel, François Hollande, Matteo Renzi, pour ne citer qu’eux, avec Jean-Claude Juncker, Martin Schulz, Donald Tusk sont dans la turbulence. L’Union européenne se doit de réagir rapidement pour stabiliser les réactions erratiques venant de toutes parts. Mais encore faudrait-il savoir pour faire quelles propositions et en vue de quels objectifs pour quels résultats ? La crainte immédiate est de voir apparaître un effet domino de réactions. Autriche, Pays-Bas et Pologne, pour ne citer que ces nations, y songent déjà. La zone euro serait aussi concernée. Quand on voit la complexité du « système européen », il y a déjà de quoi être inquiet !
Dans la pratique, d’après l’article 50, tout pays susceptible de quitter l’Union européenne peut en faire la demande. Avec ce vote démocratique le Royaume-Uni a choisi. Ce sera le rôle du successeur de David Cameron de le confirmer. Si déjà, le remplacement de Premier ministre ne se fait qu’à l’automne, sachant que l’ensemble des négociations concernant des milliers d’accords remis en cause peut prendre plus de 2 ans ! Les fondateurs de l’Union sont plutôt pour la ligne dure et n’accepteraient pas de patienter au gré des demandeurs.
L’Europe doit être totalement repensée ?
Sachant que l’Europe s’est construite sans le Royaume-Uni, elle pourrait a priori poursuivre son « déroulé » sans lui. Mais cet incident de parcours est grave. La pression pour que l'Europe se reforme sera très forte et on voudra traiter le plus vite possible le cas d’Outre-Manche. Trop de problèmes, monétaires, fiscaux, sociaux, en matière de sécurité, de terrorisme et de défense, pour ne citer que ceux-ci, sont restés sans réelle solution satisfaisante, mobilisatrice et rassembleuse. La situation ne peut pas se contenter de faire du surplace sur fond d’une actualité migratoire en progression qui tient la « Une » des préoccupations nationales sur l’ensemble de l’espace Schengen.
Ce cumul de navigation à vue, sans perspective, ignorant les réactions populaires peut remettre en cause l’existence même de l’Union européenne et par voie de conséquence aussi celle de la zone euro. Alors l’Europe doit-elle être totalement repensée ? Dans tous les cas, il y a du travail, encore faudrait-il avoir compris où sont les problèmes avant de chercher les solutions ? A force de ne pas écouter les réactions, l’Union européenne finira-t-elle par entendre que l’on ne peut plus jouer seule sans écouter les avis des Nations ?