La visite du ministre brésilien de l’environnement fin septembre en Europe est restée très discrète. Mais elle n’a pas échappé à l’ONG Greenpeace qui a dénoncé une « tournée de propagande ».
Propagande assumée
Après avoir assisté à l'Assemblée générale de l'ONU à New York, Ricardo Salles, ministre brésilien de l’environnement, est arrivé en France fin septembre avec la ferme intention de calmer les esprits : « Nous voulons clarifier, fournir des données complètes car, ces derniers mois, de nombreuses informations sur les incendies en Amazonie étaient inexactes », a déclaré le ministre de Jair Bolsonaro à l’AFP. Une déclaration suivie de rencontres informelles (non inscrites sur son agenda officiel) avec divers représentants d’entreprises françaises dans le cadre d’une tournée européenne.
L’objectif du ministre est simple : arrondir les angles et rassurer ses investisseurs. Car au-delà de l’image du Brésil écornée après les passe d’armes de cet été (en août, le président français Emmanuel Macron avait critiqué Bolsonaro sur le non-respect de ses engagements sur le climat. En retour, le président brésilien avait dénoncé une "ingérence" de la France), il est surtout question de business pour le plus grand pays d’Amérique du sud.
Sur Twitter, le 26 septembre, Ricardo Salles a donc enterré la hache de guerre : « Lors de cette réunion avec les plus grandes entreprises françaises ayant des investissements au brésil, nous réaffirmons nos liens historiques d’amitié, de partenariat et de travail mutuel ainsi que les nouveaux défis dans le domaine de la bio économie en Amazonie », écrivait le ministre sans préciser les noms de ses interlocuteurs. Aucune entreprise française n’a d’ailleurs confirmé avoir vu le Brésilien, pourtant tout à fait affirmatif sur son agenda : « Je vais rencontrer des investisseurs potentiels intéressés par les richesses de la forêt amazonienne », avait-il assuré. Parmi les entreprises concernées figureraient les champions de l'industrie pharmaceutique, des cosmétiques et de l'agro-industrie dont les transformateurs de graines oléagineuses.
Rencontres discrètes
Ces rencontres informelles ont été dénoncées par Greenpeace, pour qui cette visite est « une contre-attaque du gouvernement brésilien qui tente d’apaiser les tensions qu’ont soulevées, à juste titre, les incendies en Amazonie. En envoyant son Ministre de l’Environnement en tournée à la rencontre des grandes entreprises, Jair Bolsonaro tente de préserver les relations commerciales de son pays et de redorer l’image du gouvernement brésilien mais il ne dupe personne », a dénoncé Suzanne Dalle, experte agriculture pour Greenpeace France. « La situation sur place est catastrophique, on assiste à un véritable démantèlement de la gouvernance environnementale » ajoute-t-elle.
Les militants français de l’ONG ne se sont pas arrêtés à des déclarations. Le 26 septembre, une vingtaine d’entre eux ont fait irruption devant la résidence de l’ambassadeur du Brésil (dans le 16ème arrondissement de Paris) munis d’une banderole rappelant explicitement la responsabilité du gouvernement brésilien dans la déforestation avec le message « Bolsonaro – Amazon killer » et de pancartes fustigeant également la complicité du gouvernement français et de grandes entreprises du secteur privé. Les militants ont ensuite envoyé une centaine d’alarmes sonores dans la cour intérieure de la résidence, « une façon de rappeler au Ministre de l’Environnement brésilien que son inaction climatique ne passera pas sous silence », a précisé le communiqué de l’organisation.
Tournée européenne
Une action qui n’a cependant pas stoppé le ministre brésilien dans sa campagne européenne puisqu’il s’est ensuite rendu en Allemagne où il a rencontré les représentants de BASF, Bayer et Volskwagen et au Royaume-Uni où il a échangé avec des investisseurs issus des secteurs miniers, énergétiques, pharmaceutiques et financiers.
Dans la même période, la ministre brésilienne de l’agriculture, Tereza Cristina da Costa, se rendait à Abu Dhabi pour défendre la culture des OGM dont le Brésil se fait le champion. Elle a souhaité une coopération avec les États du Golfe dans le secteur de la recherche-développement sur les aliments génétiquement modifiés et d'autres domaines de l'agriculture : « La culture GM peut être étendue à de nombreuses autres cultures telles que la tomate, la carotte et d'autres légumes », a déclaré la ministre tout en évoquant les recherches en cours dans son pays.
Avant sa visite aux EAU, la ministre s'est rendue en Égypte, en Arabie Saoudite et au Koweït dans le cadre de sa tournée au Moyen-Orient.
"Je compte sur une coopération active dans le secteur de l'agriculture avec les États du Golfe, qui sont des partenaires importants du Brésil. Nous entretenons également une relation privilégiée avec les Émirats arabes unis", a-t-elle déclaré à l'agence de presse des Emirates (WAM).
Pas de doute, le Brésil est en pleine campagne de séduction auprès de ses investisseurs étrangers.