Financement des entreprises : mobilisation générale

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Par Pierre Delville Modifié le 30 juillet 2014 à 13h59

Le 16 juin dernier, Michel Sapin réunissait un Comité bien spécial : la Place de Paris 2020. Alors que les sources de financements se raréfient pour les entreprises, les marchés financiers sont en plein essor et la bourse de Paris se retrouve au centre des attentions. En parallèle, la BCE a apparemment décidé de traiter le mal à la racine en baissant ses taux jusqu'au négatif pour que les banques oublient leurs règles prudentielles et accordent plus de prêts.

L'économie française inquiète

Des investissements en baisse et une dette des administrations publiques en hausse. Si le compte-rendu de la situation économique française de l'Insee, sobrement intitulé « L'Économie française », annonce de (très) légères éclaircies du côté du chômage et de la consommation, le paysage économique hexagonal dans son ensemble reste malheureusement nuageux. Des prévisions mitigées ressenties par les chefs d'entreprises du pays, patrons de PME en tête. Selon le dernier baromètre Ifop, 90 % d'entre eux se déclarent pessimistes quant à une possible reprise de l'économie française. Plus inquiétant encore, l'étude précise que « moins d'un patron de PME sur quatre (24 %) déclare que les 50 premières mesures du choc de simplification à destination des entreprises, annoncées le 14 février dernier, lui inspirent confiance ».

Les entrepreneurs des Petites et Moyennes Entreprises françaises ont en effet toutes les raisons de s'inquiéter si on se réfère aux derniers chiffres publiés. Depuis le mois de janvier, leur chiffre d'affaires a baissé de 3 %, les prix des fournisseurs ont augmenté de 2 % et, plus importants encore, les problèmes de financement ont gagné 5 %. Presque 6 mois après l'annonce du fameux pacte de responsabilité de François Hollande, 67 % des chefs d'entreprises déclarent avoir encore cruellement besoin de financement.

Face à ce constat sans appel, Michel Sapin, ministre des Finances et des comptes publics a installé le Comité « Place de Paris 2020 » le 16 juin dernier. « Le développement d'une industrie financière qui assure le financement de l'économie, dans ses différentes composantes, et notamment celui de nos entreprises, de manière compétitive et sûre est un enjeu majeur pour la France » a-t-il affirmé. Une solution s'impose pour le ministre, apparemment convaincu de l'utilité des marchés financiers régulés pour regonfler l'économie réelle, « il faut une place financière de Paris forte pour assurer le financement de l'économie, des entreprises ».

La bourse de Paris concentre de nombreux espoirs

Jusqu'à aujourd'hui, le crédit bancaire représentait 70 % du financement des entreprises. La nouvelle réglementation, dite de Bâle III, est cependant passée par là et les banques sont désormais contraintes à une extrême prudence. Toujours selon le baromètre de l'Ifop, 75 % des dirigeants français observent depuis plusieurs mois un durcissement des conditions de financement des banques. Une frilosité des banques qui tombe mal alors que les besoins de financement du pays avoisineront les 100 milliards d'euros par an à l'horizon 2020 selon Paris Europlace. Les entreprises ont dû trouver d'autres solutions de financement et sollicitent aujourd'hui les marchés financiers. Un phénomène qui place la place boursière de Paris au centre des stratégies gouvernementales pour une reprise de l'économie française, mais également européenne.

La visée européenne de ce Comité ne fait aucun doute. Dominique Cerutti, directeur général d'Euronext, explique en effet que « le ministre (Michel Sapin) a commandé un rapport « Place de Paris 2020 » afin de profiter de ce changement pour construire cette politique industrielle des marchés financiers de la zone euro, où la France jouera un rôle moteur ». Rappelons que la bourse de Paris est le principal actif d'Euronext, qui vient d'être introduit en bourse le 20 juin. Comprenant les bourses d'Amsterdam, de Bruxelles, de Paris et de Lisbonne, le groupe a repris sa liberté et se recentre sur l'Europe. À l'échelle nationale, l'IPO d'Euronext devrait satisfaire les autorités françaises. Les marchés du groupe étant régulés par des autorités locales, ces dernières auront ici une occasion d'avoir une influence sur le financement de l'économie réelle. À eux de ne pas la rater.

Rachat d'actifs et taux négatifs, la BCE sort le grand jeu

En parallèle, pour lutter contre les conséquences des nouvelles règles prudentielles bancaires concernant les crédits, la Banque Centrale Européenne a elle aussi décidé de mettre la main à la pâte et de combattre la déflation qui rôde autour de l'Europe. Le 5 juin dernier, elle a annoncé une série de mesures visant à relancer la croissance dans la zone euro et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'y va pas avec le dos de la cuillère. Cette dernière semble en effet s'accorder parfaitement avec Michel Sapin qui déclarait il y a quelques jours vouloir veiller « à ce que les entreprises (...) trouvent auprès de leurs banques, ou directement sur les marchés financiers, les prêts à faible coût dont elles ont besoin ».

Pour cela, la BCE tente le tout pour le tout et a pris une décision historique : abaisser son taux de dépôt de 0,10 % à -0,10 %. Une mesure non sans conséquence pour les banques supposée favoriser une augmentation des prêts bancaires. En parallèle, Vitor Constancio, vice-président de la BCE, a assuré que son institution était prête à lancer une vaste campagne de rachats d'actifs financiers si l'inflation ne connaît aucun rebond dans les mois à venir. Une mesure dite « non conventionnelle » aujourd'hui désirée par de nombreux économistes et chefs d'entreprises. Une politique industrielle des marchés financiers de la zone euro serait-elle en train de se construire sous nos yeux ? Si tel est le cas, la France pourrait bien y jouer un rôle central, aussi inattendu qu'espéré.

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Titulaire d'un BTS Commerce international, il travaille en tant que chargé de mission à l'international et s'est spécialisé sur un travail de prospection et de veille, afin de détecter les nouvelles opportunités en France et sur les marchés étrangers.

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