Sur fond de commémorations du 11 novembre, Emmanuel Macron part en « itinérance ». Les questions historiques ne devraient pas faire oublier les crises économiques de l’est, le nord de la France ou le sort du Rafale.
Macron en visite pour célébrer la Grande Guerre
Expositions, conférences, inaugurations… Le mois de novembre sera chargé pour Emmanuel Macron, qui se prépare à effectuer une « itinérance sur le champ de bataille de la Grande Guerre ». Le président de la République sera à Strasbourg le 4 novembre, puis à Morhange (Moselle) et Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle) le 5. « Chaque jour, il assistera à une cérémonie et visitera un lieu emblématique », précise-t-on à l’Élysée.
Le chef de l’État devrait également effectuer des visites en compagnie d’acteurs économiques. Il est notamment attendu à Notre-Dame de Lorette le 8 novembre et le lendemain à Lens, où il devrait ouvrir « une séquence axée sur le bassin minier, territoire meurtri par les conflits mondiaux et qui a subi également les différentes crises économiques », annonce La Voix du Nord.
Comme l’avait annoncé en juillet Claude-France Arnould, ambassadrice de France à Bruxelles, le président français devrait également effectuer une visite d’État en Belgique à l’invitation du roi Philippe. « Nous nous réjouissons de cette invitation qui mettra en pleine lumière ce qui nous unit et ce que nous devons apprendre l’un de l’autre », affirmait Mme Arnould tout en annonçant la visite d’autres chefs d’État européens à Paris : « Le 11 novembre prochain, le président de la République invite à Paris ses homologues, pas simplement pour commémorer le centenaire de l’Armistice, mais pour contribuer à tenir la promesse que nos pays s’étaient faite il y a cent ans : "plus jamais cela" ».
Avions de combat : un sujet épineux
C’est donc dans ce contexte de commémorations et de ratification des liens d’amitié entre pays européens, que l’épineux sujet du remplacement des F-16 belges devrait être abordé. Un appel d’offres avait en effet été lancé en mars 2017 afin de remplacer les avions de combat de l’armée belge, qui devront être progressivement retirés du service entre 2023 et 2030. Or, le F-35 américain a longtemps fait figure de favori. Mais il n’est pas facile « lorsqu’on est ouvertement pro-européen, pays d’accueil des institutions européennes, de choisir un avion américain contre deux autres candidats européens : le Rafale français et l’Eurofighter », analyse le magazine Air&Cosmos. Et pourtant, selon la Libre Belgique, « les sources (…) politiques, gouvernementales, militaires et industrielles convergent pour indiquer que le F-35 décrochera la timbale ».
Pas facile, en effet. D’autant que la négociation a connu de nombreux rebondissements dont l’avionneur français Dassault a particulièrement fait les frais, comme l’avait dénoncé son PDG, Eric Trappier, devant la commission de la défense de l’Assemblée nationale en février : « Si je prends la Belgique, siège de l’Europe, tout était tracé pour acheter américain », fustigeait celui pour qui l’Europe de la défense ne sera possible « sans un minimum de solidarité européenne sur les achats d’armement ».
« Du pipeau »
Ce qui n’est pas le cas pour l’instant : « On a comparé un F-35 qui n’avait pas encore fait son premier vol, dont le prix n’était pas garanti puisqu’il n’était même pas encore connu des forces américaines, à un Rafale qui a fait une évaluation complète à Istres, avec un engagement sur les prix "backé" par les autorités françaises, avec un engagement sur les compensations à hauteur de 100 %. Et malgré tout, le F-35 a gagné avec une note de 6,97 contre 6,95 au Rafale », s’irritait M. Trappier, pour qui « tout ça, c’[était] du pipeau ».
En avril, après la révélation par la presse belge de « manœuvres en coulisses » qui faisaient craindre des risques de « corruption », l’opposition socialiste avait demandé la suspension de la procédure d’achat des nouveaux avions. Ce qui avait fait dire à certains que le Rafale, proposé en dehors de cette procédure d’appel d’offres « entachée », avait à nouveau ses chances.
Mais si les informations de certains médias s’avéraient exactes, c’est probablement vers Eric Trappier qu’il faudra se tourner pour chercher des explications : « L’appel d’offres a été fait une fois le choix du F-35 effectué, sous pression des socialistes hollandais », Hollandais qui se seraient donné le rôle de « VRP du F-35 en Europe », avion dont l’armée de l’air néerlandaise serait à l’origine de la notation.
Si la Belgique choisissait de se tourner vers le F-35 américain avant la visite d’Emmanuel Macron, ce dernier, favorable à la relance du projet européen, ne manquerait sans doute pas d’exprimer sa contrariété. Cette annonce prématurée apparaitrait en effet comme suspecte et donnerait l’impression que la partie américaine redoute qu’Emmanuel Macron obtienne gain de cause auprès du Premier ministre belge Charles Michel. Si le choix de la Belgique n’est, en revanche, pas annoncé avant sa visite, il est fort probable que le président de la République profitera de son séjour en Belgique pour militer en faveur du remplacement du F-16 par le Rafale. Un remplacement qui contribuerait à relancer le projet d’une Union européenne de la Défense.