La transition énergétique suppose le passage d’une économie carbonée à une économie reposant sur des énergies renouvelables avec pour objectif de stabiliser les émissions de carbone d’ici 30 ans et d’inverser la tendance pour revenir aux émissions du début de la période industrielle. Cela suppose un changement de grande ampleur à l’échelle internationale des modes de production de l’énergie et d’optimisation de leurs consommations.
Une telle mutation nécessitera l’engagement important de capitaux. Le besoin de financement en résultant, de l’ordre de 50.000 milliards de dollars, selon les évaluations de BlackRock, implique la mise en œuvre d’un plan de financement global indispensable pour résoudre les trois problèmes critiques qui entravent la nécessaire mobilisation de capitaux privés. C’est en ce sens que Larry Fink, PDG de BlackRock, s’est récemment exprimé à l’occasion de la COP 26.
Étendre les critères de transparence et de performance aux entreprises non-cotées
Première difficulté critique à lever pour qu’un plan de financement soit effectivement global : faire en sorte que les obligations de transparence et de performance en matière de décarbonation ne se limitent pas aux seules entreprises cotées mais s’étendent à l’ensemble des entreprises privées. Trop d’entreprises cotées, notamment les sociétés pétrolières et gazières cotées, sont aujourd'hui « massivement incitées » à vendre leurs actifs les plus polluants, souvent à des sociétés privées qui font l'objet d'un contrôle moins strict et divulguent beaucoup moins d'informations sur leurs opérations. L’instauration d’un « level playing field » commun à l’ensemble des entreprises, cotées ou non cotées, est une première condition nécessaire pour éviter une migration massive et néfaste des actifs les plus polluants vers les entreprises non cotées, rendant inopérante la nécessaire mise au rebut de ces actifs.
Un plan de relance partagé par l’ensemble des consommateurs explique Larry Fink
Deuxième difficulté critique à lever pour que ce plan de financement soit véritablement global, faire en sorte qu’il soit partagé par l’ensemble des consommateurs et pas simplement par ceux dont le pouvoir d’achat leur permettant de disposer de produits et services écologiques et décarbonés. Sans la mise en place de précautions nécessaires, la transition énergétique sera créatrice d’inégalités. Elle se traduira par des hausses de prix et, si aucune mesure compensatrice n’est mise en œuvre, par l’éviction des consommateurs ne disposant pas d’un pouvoir d’achat suffisant. Pour éviter que la consommation de produits et services décarbonés ne soit l’apanage d’une minorité privilégiée, une « prime verte », qui permettrait l’abaissement du surcoût occasionné par le recours à des énergies renouvelables, est un point de passage obligé pour que ce plan soit effectivement global. C’est notamment tout l’enjeu du programme Breakthrough Energy. Lancée par Bill Gates, cette organisation a annoncé en septembre avoir levé plus d’un milliard de dollars auprès de sept grandes entreprises, dont Arcelor Mittal, BlackRock et General Motors, pour financer le développement des énergies propres. Le projet s’attachera initialement à accélérer le déploiement de quatre technologies : le captage direct du carbone, l’hydrogène vert, le stockage d’énergie de longue durée et les carburants durables pour l’aviation.
Favoriser les partenariats publics-privés
Enfin, troisième condition, pour financer le cout de la transition énergétique de manière efficace s’adresser à l’ensemble des acteurs, en sollicitant l’intervention d’institutions publiques capables d’apporter des capitaux subordonnés de façon à protéger le rendement des capitaux privés. BlackRock lui-même s’est engagé en ce sens en créant le « Climate Finance Partnership », un fonds dédié au financement du d’infrastructures vertes dans les pays émergents, souscris par 22 investisseurs, dont les gouvernements Français et Japonais ; des organismes philanthropiques et des investisseurs institutionnels.
Larry Fink a appelé à la multiplication de ce type d’initiatives et à la refonte des institutions financières internationales, que sont le FMI et la Banque Mondiale, pour soutenir cette démarche. Depuis 80 ans ces deux institutions aident à financer le développement des pays émergents sur la base d’un modèle de finance bancaire intermédié. Il y a lieu de repenser leur rôle notamment pour attirer les capitaux privés nécessaires à la transition énergétique dans certains marchés et actifs présentant des risques pour les investisseurs institutionnels. Le BlackRock Investment Institute estime que le monde doit investir 1 000 milliards de dollars US par an dans des projets à faible émission de carbone dans les pays en développement afin de réaliser une transition équitable vers une économie mondiale nette zéro. Pour se faire, l’implication du FMI et de la Banque Mondiale est essentielle.