Le traitement de l'évasion fiscale tourne au casse-tête chinois pour le gouvernement et sa majorité. En fait, on sait très bien à Bercy que si l'on veut régler tout à la fois, on ne réglera rien !
La suppression des paradis fiscaux ne peut être le résultat que d'un accord international. Or, beaucoup de pays s'accommodent des paradis fiscaux. L'expatriation des contribuables vers des pays à la fiscalité plus généreuse ne disparaitra pas tant que les contribuables auront la possibilité de profiter des disparités fiscales.
L'expatriation fiscale n'existe que parce que le poids de l'impôt est trop élevé. Dans la plupart des cas, l'expatriation vers la Belgique ou la Suisse est parfaitement légale et elle est réglementée par des conventions internationales. Ces contribuables-là sont parfaitement en règle. Ils pourraient revenir en France si la fiscalité française était allégée.
L'évasion illégale de capitaux est, elle, plus difficile à débusquer et à réprimer. Elle consiste à mettre à l'abri du fisc, sans le déclarer à qui que ce soit, des capitaux généralement acquis dans des conditions douteuses. Ces opérations illégales sont rendues possibles par l'existence de paradis fiscaux qui organisent l'opacité et par des banques qui pratiquent un secret bancaire absolu. Dans ce cas, il y a fraude manifeste.
Le traitement de l'évasion fiscale illégale pourrait avancer très vite si on acceptait l'idée d'une amnistie fiscale pour les exilés qui consentiraient à revenir en France
La fraude fiscale et l'évasion représenteraient 1000 milliards d'euros en Europe. Tous les grands pays européens sont donc concernés. La France aurait près de 60 milliards d'euros à récupérer. Les spécialistes savent que l'amnistie fiscale permettrait d'en rapatrier une grande partie. Le retour est possible à condition de ne pas matraquer les exilés.
Il ne s'agit pas de les exonérer de toute sanction mais il faudrait :
- Que les conditions de retours soient clairement expliquées et garanties.
- Que les sanctions financières ne soient pas confiscatoires. Sinon les expatriés ne reviendront pas. Bercy a imaginé des sanctions limitées au paiement de l'impôt non réglé avec une pénalité de retard.
- Oublier toute sanction pénale. Parce qu'actuellement ce qui empêche un contribuable de rapatrier sa fortune c'est le risque d'aller en prison. Et c'est là où le bas blesse.
Ces trois séries de conditions sont actuellement inacceptables pour une majorité du Parti socialiste viscéralement attachée à la question morale. Quitte à bloquer la réforme. On préfère au PS, pour des raisons morales qui sont évidemment légitimes, avancer des menaces de sanctions et de pénalités. On va donc mettre en place une panoplie de sanctions très sévères mais qui ne pourront pas être appliquées. Faute de justiciables.
Tous les pays qui ont instauré une amnistie fiscale ont vu revenir une partie des exilés. A Bercy, comme dans le reste du gouvernement, on sait très bien qu'à vouloir punir les exilés, on ne les retrouvera pas.
L'idée est donc d'organiser une amnistie relative sans le dire trop fort. Politiquement, bonjour les dégâts.