Un ministre du Budget censé lutter contre l'exil fiscal de ses compatriotes, et qui lui-même planque son argent dans un paradis fiscal... Un tel scénario devait inévitablement bousculer en profondeur le système ! Un an après l'affaire Cahuzac, il est temps de faire le point sur ce qui a changé en matière de lutte contre la fraude fiscale.
Un procureur financier pour traquer les délinquants économiques
D'abord, un nouveau poste a été créé via la loi sur la lutte contre la fraude fiscale, adoptée fin 2013 : celui de procureur financier, chargé de renforcer la lutte contre la grande délinquance économique et financière.
C'est une femme, la magistrate Eliane Houlette, qui a été nommée à ce poste. Elle a du pain sur la planche, avec déjà environ 110 dossiers à traiter. Procureur spécialisé, elle dispose d'une compétence nationale et est susceptible d'agir sur les affaires de corruption et de grandes fraudes fiscales. Sa mission : « conduire et coordonner toutes les enquêtes sur ces graves infractions » afin de concentrer les moyens et l'efficacité des procédures.
Avant cela, les parquets de Paris, Marseille, Lyon et Bastia possédaient des sections financières spécialisées mais aucun ne disposait de compétences nationales.
Ensuite, un nouvel « Office central de lutte contre la fraude et la corruption » a été créé. Il va vraiment pouvoir enquêter, en recourant à des « techniques spéciales d'enquête » comme la surveillance, l'infiltration, les sonorisations, la garde à vue prolongée.
Par ailleurs, la lutte contre l'exil fiscal a connu cette dernière année un nouvel élan : le successeur au Budget de Jérôme Cahuzac, Bernard Cazeneuve, en a fait son cheval de bataille : il a modifié les sanctions prévues pour les personnes faisant une demande de régularisation –elles doivent payer des impôts et pénalités de retard, une majoration de 30% pour les fraudeurs "actifs" ou de 15% pour les fraudeurs "passifs", ainsi qu'une amende annuelle de 3% pour les premiers, 1,5% pour les seconds-.
Plus de transparence dans la vie publique
L'affaire Cahuzac avait débouché sur une autre réforme : la refonte de la transparence de la vie publique. Chaque ministre avait été enjoint de publier son patrimoine, on s'en souvient.
Cette fois, une « Haute Autorité pour la transparence », indépendante, a été installée. Elle est notamment chargée de veiller à ce que les 8 000 responsables publics - ministres, membres de leur cabinet, parlementaires, grands élus locaux, hauts fonctionnaires et dirigeants d'entreprise publique - fassent des déclarations de patrimoine et d'intérêts au début et à la fin de chaque mandat pour prévenir tout enrichissement personnel.
Ils doivent les transmettre à l'institution (sous peine de se voir infliger une peine de trois ans de prison et une amende de 45 000 euros), qui les épluche, avec l'aide du fisc. Seules les déclarations des responsables politiques élus seront rendues publiques.
En cas de fraude avérée, les impétrants risquent notamment une peine allant jusqu'à dix ans d'inéligibilité pour atteinte à la moralité publique.
Bref, merci monsieur Cahuzac... ?!