Espérance

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Par Hervé Goulletquer Publié le 24 décembre 2019 à 13h24
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@shutter - © Economie Matin
1120 MILLIARDS $La Chine détient 1 120 milliards de dollars de dette américaine.

Les dernières nouvelles en provenance de la politique économique chinoise sont favorables. Il en est de même de la dernière analyse de Graham Allison, le « pape » des relations sino-américaines. Il ne reste plus qu’à donner du crédit à la résolution des grands « patrons » américains, qui affirment se convertir au stakeholding, et ce sera vraiment Noël !

A la veille de Noël, le newsflow en provenance de Chine est favorable. Les propos du Premier ministre Li Keqiang font envisager une baisse du coefficient de réserves obligatoires des banques commerciales à venir rapidement et le ministère des finances publie la liste de 859 produits pour lesquels les droits de douane vont baisser. Ceux-ci, selon Bloomberg, pèsent 18% des importations. La double perspective de moins d’entraves aux échanges internationaux et de réglages monétaires toujours accommodants ne peut qu’être reçue positivement par les professionnels de marché. Dans ces conditions, les chiffres décevants sur l’activité commerciale dans le secteur des biens durables aux Etats-Unis en novembre dernier ne retiennent pas beaucoup l’attention.

L’article de Graham Allison, publié avant-hier dans The National Interest, est aussi à noter. Et le message envoyé est important. Pour rappel, Allison est ce professeur d’Harvard, qui a étudié les relations sino-américaines en se référant au piège de Thucydide (Ce qui a rendu, au Vème siècle avant notre ère, la guerre inévitable était la croissance du pouvoir athénien et la peur qui en résultait à Sparte). Au terme d’une étude sur la montée en puissance de la Chine dans le domaine de l’intelligence artificielle, il propose une distinction entre le comportement des milieux diplomatiques et celui du monde des affaires. Dans le premier, il est contradictoire d’être à la fois en situation de coopération et de concurrence ; dans le second, le rapport est courant. Samsung n’est-il pas à la fois le premier fournisseur et le premier concurrent d’Apple ? Et Allison de conclure que le choix pour les Américains et les Chinois est entre la coexistence inconfortable et la destruction mutuelle. Comme quoi il ne serait pas inéluctable de tomber dans le piège de Thucydide !

La perspective ne peut que conforter le regard du marché qui, au cours de l’année qui s’achève, a plutôt cru que la Chine et les Etats-Unis finiraient par s’entendre. Ce choix en faveur de l’approche de la « bouteille au moins à moitié pleine » et la confiance mise dans l’action des banques centrales expliquent la trajectoire favorable épousée par le prix des actifs. Et ceci malgré des conjonctures économique et politique compliquées.

Tous ces points ont été longuement discutés dans l’Eco du Matin tout au long des mois et trimestres écoulés. Un autre l’a peut-être moins été et je voudrais profiter de cette dernière livraison de l’année pour le faire. Au cœur de l’été dernier (le 19 août pour être précis) la Business Roundtable, un groupe de pression américain regroupant des dirigeants de grandes entreprises et à l’idéologie plutôt conservatrice, publiait un communiqué dans lequel elle affirmait que les actionnaires n’avaient plus à être les premiers bénéficiaires de l’activité engagée. Les membres de l’association s’engagent à gérer leurs affaires au bénéfice de toutes les parties prenantes à la vie de l’entreprise : clients, employés, fournisseurs, l’écosystème public et associatif et les actionnaires.

On se croirait revenu plus de 20 ans en arrière, avec Tony Blair, Premier ministre du Royaume-Uni et son souhait de passer d’une organisation de la sphère productive au service des shareholders à une autre qui mettrait les stakeholders au centre. Bien sûr, les critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) et l’approche ISR (Investissement Socialement responsable) « tracent leur chemin », façonnent les esprits et participent d’une prise conscience. Et puis, la crise des démocraties occidentales, sur fond de montée des inégalités et d’expression d’un mécontentement grandissant des citoyens, ne peut pas être passée sous silence.

Il faut évidemment prendre acte du « changement de pied » de la Business Roundtable. Mais quelle sera la profondeur des modifications au niveau de la répartition de la richesse créée ; surtout quand, dans un environnement plus adverse qu’aujourd’hui, il y aura moins à distribuer ? On ne la sait pas encore. Mais en ce jour d’espérance, il faut croire à un monde plus juste.

Cet Eco du Matin, vous l’avez compris, est le dernier de l’année. Stéphane et moi vous souhaitons de bonnes fêtes et vous donnons rendez-vous début janvier.

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Hervé Goulletquer est stratégiste de la Direction de la gestion de La Banque Postale Asset Management depuis 2014. Ses champs d’expertises couvrent l’économie mondiale, les marchés de capitaux et l’arbitrage entre classe d’actifs. Il produit une recherche quotidienne et hebdomadaire, et communique sur ces thèmes auprès des investisseurs français et internationaux. Après des débuts chez Framatome, il a effectué toute sa carrière dans le secteur financier. Il était en dernier poste responsable mondial de la recherche marchés du Crédit Agricole CIB, où il gérait et animait un réseau d’une trentaine d’économistes et de stratégistes situés à Londres, Paris, New York, Hong Kong et Tokyo. Il est titulaire d’une maîtrise d’économétrie, d’un DEA de conjoncture et politique économique et diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris.

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