2017 : la croissance mondiale dans l’oeil du cyclone fiscal

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Par Stéphanie Villers Publié le 16 décembre 2016 à 5h00
Croissance Mondiale Previsions 2017 Pays
@shutter - © Economie Matin
40 milliards ?Pour dynamiser la croissance française, François Fillon veut baisser les charges des entreprises de 40 milliards d'euros.

2017 marque le début d’une nouvelle ère de dumping fiscal initié par Trump. L’ensemble des grandes puissances économiques vont emboiter le pas. Offrir une bouffée d’oxygène aux entreprises est une bonne chose, mais encore faut-il que ces dernières se mettent à investir pour soutenir la machine économique qui se veut en pleine mutation.

L’investissement se doit d’être stimulé dans les secteurs au potentiel de croissance élevé en laissant de côté la politique des grands travaux pour se consacrer davantage aux innovations portées par la révolution technologique.

Une nouvelle ère s’ouvre avec en fil conducteur la baisse massive de l’impôt sur les sociétés. Ce mouvement a été initié par Donald Trump, mais Theresa May a très vite emboité le pas. Le taux d’imposition devrait ainsi passer aux Etats-Unis de 35% à 15%. Il en sera de même pour la Grande-Bretagne, qui s’est engagée à maintenir son taux au niveau le plus bas des pays du G20. En France, le candidat François Fillon a déjà annoncé la couleur en proposant une réduction progressive de l’impôt sur les sociétés de 33.3% à 25% ainsi qu’une baisse des charges pour les entreprises, de 40 milliards d'euros.

L’objectif principal de ces mesures : redynamiser l’attractivité de chaque zone. Nous voilà donc lancés dans un vaste mouvement de dumping fiscal. Les grandes puissances économiques vont devoir s’y conformer en ajustant leur propre fiscalité si elles souhaitent rester dans la course. En d’autres termes, quel que soit le vainqueur de l’élection présidentielle en France, il devra s’adapter en abaissant le taux d’imposition sur les sociétés pour éviter de se tirer une balle dans le pied. L’Allemagne est déjà bien positionnée avec un taux global de 15,8%.

La fiscalité ne fait pas tout

La baisse massive d’impôts aura pour conséquence immédiate la diminution des recettes fiscales et la détérioration des comptes publics. Pour atténuer cette dégradation, il faudra soit baisser les dépenses publiques, soit laisser dériver les déficits sur quelques semestres en attendant que la dynamique de croissance créée de nouveaux emplois, stimule les revenus et les bénéfices pour, in fine, générer de nouvelles sources d’impôts. La tentation de mettre la pression sur les plus aisés en augmentant leurs taux d’imposition ne fait plus recette, même en France. La nouvelle tendance en matière de politique budgétaire se concentre sur le potentiel de croissance pour récolter plus de recettes fiscales.

Mais en économie, rien n’est automatique. En d’autres termes, il ne suffira pas de sortir l’artillerie lourde en matière fiscale pour stimuler la machine économique. La bouffée d’oxygène offerte aux entreprises en abaissant la fiscalité est nécessaire mais non suffisante car elle n’engage en rien ces dernières. Les firmes peuvent en effet préférer, faute de débouchés à leurs yeux, miser sur la valorisation de leurs titres plutôt que d’investir. Or, l’investissement est l’impulsion de la croissance. Sans les dépenses des entreprises pour moderniser l’appareil productif, pour innover et rester pionnier dans leur secteur, le chômage et l’emploi ne pourront être améliorés.

Depuis la crise de 2008, le rendement attendu d’un investissement semble avoir été défini à un niveau trop élevé, ce qui a conduit les entreprises à privilégier le rachat de leurs titres ou la distribution de dividendes. Ainsi, depuis les quatre derniers trimestres, les dépenses en investissement des entreprises américaines se contractent. Au troisième trimestre 2016, alors que la croissance du PIB enregistre une hausse de 3,2% en rythme annualisé, l’investissement marque un recul de 4,8%.

Le rendement à tout prix tue l’investissement

La faiblesse de l’investissement productif est devenue un frein chronique dans la plupart des pays développés. Pour la zone euro, il faudrait, selon le FMI, accroître les dépenses d’investissement de 10% à 15% pour retrouver des niveaux d’avant crise. La course aux rendements court terme dissuade bon nombre d’entreprises d’investir.

Si les politiques d’allègement fiscal constituent un plus pour stimuler l’effort d’investissement, elles resteront insuffisantes si elles ne sont pas accompagnées d’une prise de conscience et d’une incitation pour les entreprises à prendre en marche les mutations économiques qui s’opèrent. La révolution technologique réclame une mise à jour et une modernisation de l’appareil productif en phase avec l’apport des diverses innovations qui transforment notre façon de consommer, de produire et plus globalement nos modes de vie. Donc, certes, il faut investir mais pas n’importe où. Reprendre les recettes d’antan en misant notamment sur la politique des grands travaux à travers le développement des infrastructures ne pourra soutenir que artificiellement la croissance. Il faut davantage agir sur le potentiel de long terme avec un partenariat privé/public visant à accompagner ces transformations et offrir plus de latitude aux entreprises qui craignent un retour sur investissement trop tardif.

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Stéphanie Villers est économiste.

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